Qui ne risque rien n'est rien… sur le chemin de Damas, alors que les opinions ont cédé face aux faits…
on ne le dit assez : un âge n'en chasse pas un autre, tous les âges qu'on a vécu coexistent à l’intérieur de soi, ils s'empilent, et l'un prend le dessus au hasard des circonstances.

lundi 16 décembre 2019

Palmyre, les murs anciens revivront !…



Khalid al-Asaad toujours présent…

Départ tôt de Homs… Une autorisation officielle de nous rendre à Palmyre nous a été délivrée. Les autorités locales de Sécurité de Syrie en ont été informées. La zone étant désormais sécurisée, nous ne serons pas escortés tout au long du trajet quoique soumis à de nombreux points de contrôle.
Palmyre est située à 220 km au Nord-Est de Damas. Contrairement à nos précédents passages sur cette route, nous avons le sentiment de tout danger potentiel écarté…cependant la route entre Damas et Palmyre, la plus directe, traçant vers le Nord-Est et passant par Ed-Dumayr, El-Basiri, Khunayfis, reste toujours zone militaire aussi c'est à partir de notre étape à Homs que nous bifurquerons vers l'Est pour rejoindre Palmyre. 



Nous circulons dans la steppe de Syrie… Une steppe qui couvre près des deux tiers de la superficie du pays ; c’est le prolongement-Nord du terrible désert d’Arabie, un désert de roche où les températures avoisinent les 38° en été, où les précipitations ne dépassent guère 15 cm. La région n’est pourtant pas aussi désertique qu’on l'imaginerait : maigre végétation, de l’herbe borde la route, nourrissant, nous dit-on, les gazelles de la steppe. C’est cette végétation qui a permis aux Bédouins d’élever depuis des millénaires leurs troupeaux de moutons, de chèvres, de chameaux. Un mode de vie longtemps rythmé par les changements de saison. Un désert toujours habité par des tribus nomades, progressivement sédentarisées. Rares villages dispersés tout au long de la route. Plus ou moins abandonnés.


Soudain, une citadelle… Le château arabe, Qala'at ibn Maan. Il annonce Palmyre…

Soudain, une citadelle juchée au sommet d'une colline apparaît… le château arabe, Qala'at ibn Maan. Il annonce Palmyre…

Le château arabe, Qala'at ibn Maan, domine toute l’oasis de Tadmor

Surgit du désert tel un mirage, Palmyre, entourée de l’oasis de Tadmor, les longues palmes vertes de ses dattiers s'étalent telles un rempart contre l'immensité du désert, à perte de vue l'écrin foisonnant de dizaines de milliers de palmiers, oliviers, grenadiers…

Habitée dès le paléolithique, Palmyre connut son âge d’or aux IIe et IIIe siècles après J.-C., grâce à son rôle d’étape carava­nière. Au cœur de la steppe, Palmyre, reine du désert, exhale un parfum de légende. Parfum d'aventures et de mystères, évocation des caravanes chargées d'épices et de soie ; parfum de femme aussi, celui de la fière Zénobie, souveraine arabe qui osa défier l'Empire romain.




Nous envahit alors une pensée pour tous ces héros liés à l'histoire récente de Palmyre et dont le souvenir habitent ces lieux… C'est presque religieusement que nous nous aventurons alors sur le site… Un pèlerinage… Nous entrons en des lieux sanctifiés où notre présence insouciante serait presque sacrilège. Nous pensons d'autant plus fort à ce jeune soldat russe Aleksander Prokhorenko, à tous ces autres martyrs syriens… Ahmad Ali Al-Kousa, 18 ans, originaire de Homs… Shaheed Abbas, 17 ans, combattant du Hezbollah… et tous les autres martyrs, inconnus de nous, qui ont donné leur vie à Palmyre, et sans le sacrifice desquels nous ne serions là aujourd'hui…




En ville… En mars 2016 un des hôtels annonçait une réouverture en mars 2017, pour notre prochain voyage !





Ruines de la réception d'un hôtel…


Une ancienne boucherie…

Dans cette cage au centre de la ville étaient exposés les prisonniers de l'État islamique


Sur la place centrale de la ville, là où étaient parqués les prisonniers de l'État islamique


On remarquera encore une inscription : "мин нет" certifiant le déminage opéré par l'armée russe…
Les Russes savent faire du bon boulot.





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Comment ne pas avoir une pensée tout particulière pour Khalid al-Asaad, ancien directeur du site archéologique décapité le mardi 18 août par les voyous de l’État islamique. Ces islamistes qui ont ensuite suspendu le corps ensanglanté de Khalid al-Asaad à une colonne romaine sur une des principales places du site antique et diffusé les photos sur les réseaux sociaux. Nous ne savons où… Laquelle ? Nous n'osons le demander… Khalid al-Asaad est partout présent à Palmyre.

Khalid al-Asaad reste ici bien présent

Le musée archéologique présentait une belle sélection de bustes funéraires, de sarcophages et de momies, retrouvés dans la vallée des Tombeaux. On pouvait aussi y voir des pièces de monnaie frappées à l’effigie de Zénobie et deux belles mosaïques provenant des villas proches du temple de Bêl. Devant l'entrée siègeait un lion monumental (fin du 1er siècle avant JC) provenant du temple de la déesse Allat, qui se trouvait à l'entrée de la colonnade transversale. Le musée ethnographique se trouvait près du temple de Bêl. Il était consacré au mode de vie bédouin à travers des costumes, des exemples d’artisanats et la reconstitution d’un intérieur. Ces deux musées ont été saccagés, pillés, leurs plus belles pièces ont été vendues à l'étranger via la Turquie…





































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Inscription de Daesh sur le temple de Bêl : "Restera"
Le logo de l'État islamique étant : "Restera et Élargira" - "باقية وتتمدد"











Du théâtre, vue sur la Grande Colonnade et le château arabe Qala'at ibn Maan



Le théâtre avant la dernière occupation par l'État islamique


Le théâtre





Anciennes canalisations


Un pressoir


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Après que les djihadistes aient pris le contrôle de Palmyre en mai 2015, l’État islamique (EI) a décapité le mardi 18 août Khalid al-Asaad, ancien directeur du site archéologique. Le directeur général du département des Antiquités et des Musées de Syrie (DGAM), Maamoun Abdulkarim, a confirmé cette information. Les islamistes ont ensuite suspendu le corps ensanglanté de Khalid al-Asaad à une colonne romaine sur une des principales places du site antique et diffusé les photos sur les réseaux sociaux.



Khalid al-Asaad, âgé de 82 ans, chef des Antiquités de Palmyre de 1963 à 2003, a dirigé pendant quarante ans le site des ruines romaines de Palmyre.  L’universitaire a collaboré au fil des années avec des archéologues français, américains, allemands et suisses, a indiqué Maamoun Abdulkarim. 

Khalid al-Asaad a été décapité sur une place de Palmyre devant des dizaines de personnes. "Daesh [acronyme en arabe du groupe État islamique] a exécuté l'un des plus éminents experts du monde antique. Il parlait et lisait le palmyrien et nous nous adressions à lui, quand nous recevions de la police des statues volées pour qu'il détermine si elles étaient vraies ou fausses", a déploré M. Abdelkarim.

Des images montrant le corps de Khalid al-Asaad accroché à une colonne et la tête coupée sur le sol, ont circulé sur des sites djihadistes. Une pancarte attachée au corps identifie la victime comme étant Khalid al-Asaad, accusé par les djihadistes d'être un partisan du régime pour avoir représenté la Syrie à des conférences à l'étranger "avec des infidèles" et d'avoir été le directeur des "idoles" à Palmyre, ainsi que d'avoir été en contact avec les responsables du régime. 

Selon Maamoun Abdelkarim, le supplicié a été interrogé pendant un mois avec son fils Walid, l'actuel directeur des Antiquités de la ville, car les djihadistes voulaient connaître la cachette où se trouverait prétendument l'or. "Mais il n'y a pas d'or à Palmyre", a-t-il dit. 
"Cette famille est remarquable car l'autre fils Mohamad et le gendre de Khalil ont participé activement au sauvetage de 400 pièces antiques au moment de la conquête de la ville par les djihadistes", a ajouté le directeur général des Antiquités et des Musées de Syrie (DGAM). "Nous avions supplié Khalid de quitter la ville, mais il a toujours refusé. 'Je suis de Palmyre et j'y resterai même s'ils doivent me tuer', nous disait-il", a ajouté le directeur des Antiquités de Syrie.

Chris Doyle, directeur du Council for Arab-British Understanding (Conseil pour l’entente arabo-britannique), a confirmé au Guardian que l’archéologue, qui était détenu par l’EI depuis plus d’un mois, avait été interrogé sur les trésors antiques et avait été "exécuté après avoir refusé de coopérer".

La version rigoriste de l'islam sunnite prônée par l'État islamique proscrit formellement la visite de sites archéologiques ou historiques et considère les statues humaines ou animales comme de l'idolâtrie.  Une conception rigoriste qui n'empêche pas les islamistes de piller les œuvres d'art et de tenter de les commercialiser sur les marchés internationaux. C'est ce refus de coopérer dans la livraison de trésors supposés cachés qui aura prétexté le martyre de Khalid al-Asaad. Paix à son âme.

La DGAM annonce le décès du chercheur en archéologie Khalid al-Asaad, ancien directeur des Antiquités de Palmyre




"Ma première rencontre avec Khalid se déroula à Palmyre en 1995. À l'époque, j'étais étudiant en thèse me spécialisant en période classique romaine, période à laquelle Palmyre s'est développée (pendant les trois premiers siècles après J.-C). Khalid était un grand professeur avec de très grandes qualités humaines. Je suis allé le voir au Musée de Palmyre pour lui demander certaines informations concernant ma recherche. Pendant sa carrière aux Antiquités de Palmyre, sa porte a toujours été ouverte aux collègues et aux étudiants.

En 2002, quand j'étais en charge du Département des affaires des musées de Syrie (DGAMS), j'ai eu l'honneur de travailler avec Khalid. Il était à la fin de sa carrière avant de prendre sa retraite en 2003. Durant cette période, nous nous sommes vus fréquemment. Khalid était un mélange d'érudit et de gentleman. Nous avons développé et mis en place plusieurs projets, et malgré nos 35 ans d'écart, nous sommes devenus de grands amis.

Nous nous sommes souvent contactés depuis la crise en 2012, mais c'est à notre dernière communication téléphonique en mai dernier que je pense le plus, après que Palmyre est tombé entre les mains de l'EI. Comme je le priais de quitter Palmyre pour Damas, il refusa en me disant qu'il y était né, qu'il resterait, et qu'il ne laisserait pas tomber sa ville. Il était courageux, audacieux et sa longue expérience a beaucoup apporté à l'équipe chargée de la mission de secours pour l'évacuation des richesses du musée de Palmyre, juste avant l'entrée de l'EI. Son fils Mohamad et le personnel du musée ont travaillé dur pour sauver les objets archéologiques et c'est ainsi qu'une grande majorité est conservée désormais à Damas.

Mon ami Khalid al-Asaad est né le 1er janvier 1934, il avait appris la langue araméenne de Palmyre et a œuvré toute sa vie pour que le site de Palmyre soit reconnu comme une institution archéologique de haut niveau scientifique, tout en apportant support et assistance aux missions archéologiques étrangères ou conjointes qui travaillaient dans la région.

Son principal souci était la protection du site et de sa région, afin de transmettre ce patrimoine aux générations futures. En développant les participations aux expositions archéologiques internationales ainsi qu'aux multiples séminaires, il assurait la diffusion de l'histoire de Palmyre au monde entier. Toute sa vie il l'a dédiée à sa ville, même après sa retraite. Il n'a pas quitté sa ville antique et l'EI l'a capturé. Il a été décapité car il aurait refusé de dire où se trouve un trésor caché, un trésor d'or caché, énorme mensonge propagé dans Palmyre quand l'État islamique est arrivé.

La vérité, c'est qu'il a été tué d'une façon sauvage parce qu'il a refusé de légitimer leur pouvoir à Palmyre, et qu'ils se sont vengés en envoyant un message pour terroriser le peuple de Palmyre.

Khalid al-Asaad est aujourd'hui un martyr de Palmyre, et doit devenir un symbole de résistance contre le terrorisme."


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Palmyre, les murs anciens revivront !…



Le 5 mai 2016 l'orchestre Mariinsky dirigé par le chef russe, Valery Gergiev, donnait un concert triomphal dans le théâtre de Palymre, reprise à l'État islamique par l'Armée arabe syrienne appuyée par la Russie. Le concert s'intitulait "Avec une prière de Palmyre : la musique fait revivre les murs anciens"…






The Art Newspaper : La Russie et la Syrie signent un accord pour restaurer l'ancienne ville de Palmyre

La collaboration menée par le Musée de l'Ermitage a été officialisée fin novembre à Damas…


Mahmoud Hammoud et Mikhail Piotrovsky signent l'accord à Damas © Avec l'aimable autorisation du Musée de l'Ermitage

La Russie et la Syrie s'associeront pour créer un plan directeur pour restaurer le Musée national de Palmyre comme base pour relancer la ville antique de Syrie. Le Musée d'État de l'Ermitage et l'Institut d'histoire de la culture matérielle de l'Académie russe des sciences ont signé des accords à Damas avec la Direction générale des antiquités et des musées de Syrie (DGAM).

Le directeur de l'Hermitage, Mikhail Piotrovsky, était en Syrie pour la cérémonie avec la directrice adjointe de l'institut Natalya Solovyova. L'Hermitage a publié hier une déclaration sur son site Internet disant: "Les deux accords sont une étape tangible dans le développement significatif des liens entre les musées et la recherche entre la Russie et la Syrie."

Parmi les objectifs à long terme de l'accord figurent l'Ermitage et le Musée national d'Oman travaillant ensemble pour restaurer 20 antiquités syriennes, principalement de Palmyre; une campagne internationale pour restaurer Palmyre, gravement endommagée par État islamique d'Iraq et du Levant ; et la formation d'un groupe international d'experts sous les auspices de l'Unesco et de la DGAM, conjointement avec la Fondation Hermitage et Aga Khan.

La Russie a intensifié sa présence dans ce pays ravagé par la guerre après le retrait brutal des troupes américaines par le président Donald Trump en octobre. L'Hermitage et l'institut ont mené une expédition conjointe en 2016 avec une escorte militaire russe et ont ensuite présenté à la Syrie un modèle 3D du site. Deux agences de voyages russes annoncent des voyages en Syrie, dont Palmyre.

Mikhail Piotrovsky a déclaré cette semaine que la première étape serait la restauration du serait du Musée national de Palmyre, qui est "d'une valeur particulière pour l'ensemble du complexe". Mais il était prudent quant aux perspectives à court terme du site archéologique. "Nous nous préparons pour après-demain, il n'est pas encore possible de faire quoi que ce soit demain", a-t-il déclaré.

Située au nord-est de Damas, Palmyre contient les ruines monumentales de ce qui était autrefois une grande ville oasis dans le nid du désert syrien connu pour être l'un des centres culturels les plus importants du monde antique. Un site du patrimoine mondial de l'UNESCO , l'architecture de cette civilisation a souvent combiné les influences gréco-romaines et perses avec les traditions locales. Cependant, le site avait été ciblé pour être délibérément détruit par l'État islamique d'Iraq et du Levant et en 2014, une grande partie de la ville et des bâtiments religieux historiques à proximité ont été endommagés. Au cours de 2015, l'État islamique a détruit l'ancienne statue du Lion d'Al-lāt , le temple de Baalshamin, l'arche monumentale et la tour d'Elahbel, parmi de nombreux autres sites historiques.

Cependant, c'est loin d'être la première tentative de préserver l'histoire de Palmyre; de nombreuses tentatives ont été faites pour numériser et recréer les structures et les illustrations qui s'y trouvent, y compris la création d'une archive numérique.



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Hommage à Khalid al-Asaad, martyr de Palmyre, symbole de résistance face au terrorisme





Cartes :



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L'Institut français du Proche-Orient présente dans ses archives ouvertes de nombreuses photos des trésors de Palmyre :

Archives ouvertes de l'Ifpo : Palmyre

https://medihal.archives-ouvertes.fr/IFPOIMAGES/search/index/?q=palmyre&docType_s=IMG&submitType_s=file&rows=50&page=1





« Bâtir un Empire. Une exploration virtuelle des mondes romains »… du 20 décembre 2019 au 8 mars 2020. Un voyage immersif au cœur de sites archéologiques, à la découverte des modèles urbains et architecturaux des cités romaines, si différents et à la fois si semblables…

Une exposition réalisée en collaboration avec :
       

       




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Autres étapes parmi les derniers voyages de "solidarité avec le peuple syrien"
de la Communauté syrienne de France






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