Qui ne risque rien n'est rien… sur le chemin de Damas, alors que les opinions ont cédé face aux faits…
on ne le dit assez : un âge n'en chasse pas un autre, tous les âges qu'on a vécu coexistent à l’intérieur de soi, ils s'empilent, et l'un prend le dessus au hasard des circonstances.

samedi 14 avril 2018

Pourquoi Trump personnellement ne voudrait pas la guerre…



Russie Politics, sous la signature de Karine Bechet-Golovko, nous livre une analyse séduisante, tentant de faire comprendre chez Donald Trump une stratégie, derrière un comportement apparemment impulsif et désordonné… l'art de la négociation d'un homme rompu aux traquenards du monde des affaires… Malgré un entourage dont il a tout à craindre, Donald Trump a l'immense chance d'avoir face à lui un partenaire tout aussi habile dans la conception et l'organisation de ses plans, le joueur d'échec Vladimir Poutine… Deux hommes dont les intérêts fondamentaux convergeraient… Deux acteurs majeurs aux qualités exceptionnelles qui seraient une chance pour notre monde et la paix, malgré la médiocrité des seconds couteaux, notamment May et Macron, susceptibles de n'importe quel acte inconsidéré par soif de reconnaissance…





Les gazouillis du président américain D. Trump ont ce mercredi soir 11 avril monopolisé l'attention et des politiciens et des analystes : y aura-t-il ou pas la guerre ? Ce n'est quand même pas une question secondaire. Et justement l'importance de la question a empêché une réponse binaire, simpliste. En trois gazouillis, D. Trump a envoyé deux messages. Un à la Russie et un à l'intérieur. Mettant chacun face à ses contradictions.

Lorsque l'on parle de D. Trump, l'on donne souvent l'image d'un impulsif, voire d'un fou, d'un déséquilibré. Il est violent dans ses sorties, donne effectivement l'impression de suivre le vent du moment, l'humeur passagère et de faire ce que le porte-parole du Kremlin appelle de la "diplomatie sur Twitter", des gazouillis qui effectivement ne font pas sérieux. Pour autant, tout ne semble pas aussi simple, voire simpliste que cela.

Quelques remarques préliminaires sur la communication politique

Quant aux capacités de D. Trump : rappelons quand même qu'il est à la tête d'un empire qu'il a assis et développé. Arriver à ce niveau demande de la stratégie, de la vision à long terme et aussi de la violence. Un fou impulsif et stupide n'y serait pas parvenu. Cette approche ressort surtout de la fantasmagorie médiatique. Ce qui ne veut pas dire que Trump soit un ange de sagesse et de calme. Mais entre ces deux extrêmes, il existe une quantité incroyable de possibilités qu'il serait bon d'envisager avec un peu plus de lucidité.

La "diplomatie par tweet" est devenu un élément de la communication publique dans un monde post-moderne, où la rapidité de réaction est considérée par beaucoup comme une qualité politique. Ainsi, nombre de chefs d'État y vont de leurs gazouillis (dont beaucoup sont totalement inutiles, voire contre-productifs), les élus divers et variés montrent "leur implication dans la vie publique", les organes publics expliquent au bon peuple qu'ils agissent, les porte-paroles vont parfois même assez loin dans le privé sur les différentes plateformes, notamment Facebook.

Mais en ce qui concerne Trump, l'on glisse plus dans la "gouvernance du tweet", car étant en guerre contre la bulle globaliste néolibérale (dite néocon aux États-Unis), bulle tenue par les médias qu'il qualifie de Fake News, les tweets sont alors devenus une technique de contournement. Au demeurant assez efficace dans ce cas particulier. Ce qui ne signifie pas que cette méthode puisse être efficace dans d'autres contextes.

Trump met les "élites" globalistes face à leurs contradictions :

Dans le cas de la guerre en Syrie, qui comporte une dimension virtuelle incontournable, D. Trump a porté les premiers coups sur ce plan, mettant les deux mondes en parallèle et les "élites" face au problème. Trois gazouillis en trois heures, à chaque gazouillis le public a le temps de la réflexion, de la réaction, de l'émotion.



Gazouillis émis par Trump le mercredi 11 avril



Premier temps : la Russie a promis de réagir, mais nous avons nous aussi des super-armes et l'on va faire la guerre, la vraie. Pas celle confortable des divans, pas celle en col blanc des sanctions. Non, celle des bombes, des soldats, des morts et du sang. Vous l'avez dit : Assad est un monstre, "un animal", on va aller le tuer. Alors, on y va ?

Premier mouvement, Trump entre la danse, puisqu'il ne peut pas l'éviter. Et il pousse le mouvement à l'extrême, à l'absurde. C'est un moyen à la fois de faire peur (but atteint) et de discréditer l'option.

Deuxième temps : la Russie peut être un bon partenaire économique, on peut avoir des intérêts communs et arrêter l'escalade de l'armement.

Deuxième mouvement, après avoir dangereusement fait monter les enchères, Trump propose une alternative qu'il veut "win-win". Finalement nous ne sommes pas obligés de faire la guerre, la vraie, de s'y embourber, si vous le voulez on peut réagir de manière civilisée. Et pas un mot sur Assad.

Troisième temps : le problème fondamental est un problème intérieur, ces "élites" démocrates et globalistes qui constamment accusent de collusion avec la Russie au lieu de donner la possibilité au pays d'être gouverné normalement.

Troisième mouvement : l'ennemi est intérieur, il est ceux qui n'acceptent pas la victoire de Trump, la véritable alternance politique et empêche donc de gouverner normalement. La hargne déployée par les médias et les politiques contre ce président est sans précédent.

Un message à la Russie

En plus du message intérieur, deux des gazouillis peuvent être interprétés comme un message à la Russie.



Nouveaux gazouillis de Trump le jeudi 12 avril


N'oublions pas que le but de Trump est de restaurer et préserver la prééminence américaine. Or, lors du dernier discours devant le Parlement fait par le président russe V. Poutine, la démonstration dans un style post-moderne (vidéos proches d'un jeu vidéo, terminologie, concours pour trouver des noms aux armes, etc.) des nouvelles armes, elles, bien réelles a mis en danger cette prééminence américaine.

Trump a d'abord attaqué sur le style "nice, new and smart". Le coup a porté, la formulation a été très mal prise en Russie. Trump se moque de la mode, cette mode qu'il ne faut surtout pas manquer. Ne pas être en retard, sur le fond certes, mais surtout sur la forme. C'est un soufflet qui a touché au but.

Sur le fond, il faut mettre les deux gazouillis ensemble : si vous jetez le gant, il faut aller jusqu'au bout. Sinon, vous vous pliez à nos règles politico-économiques, on stoppe le réarmement et on fait du business.


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D'une certaine manière, Trump s'est adressé aux trois forces qui lui posent problème : la Russie difficile à classer qui ne conteste pas la globalisation que Trump combat et qui constitue un danger pour la domination américaine tout en étant un interlocuteur incontournable ; les militaristes qui veulent une guerre à tout prix, oubliant les bourbiers afghan et irakien, et la différence entre se battre contre des groupuscules et une armée nationale ; les globalistes des deux bords, qui font le jeu des militaristes en Syrie, alors qu'ils ont peur de la guerre réelle.

Par ces trois sorties et en différant sa décision réelle sur le conflit syrien, Trump a mis chacun face à ses contradictions. Il a porté le conflit sur le plan virtuel, permettant aux uns et aux autres d'en saisir toutes les implications, avant qu'il ne devienne réel. Si réellement ce schéma est le résultat d'une volonté politique, c'est une manœuvre extrêmement intelligente.

Surtout qu'une forme d'équilibre des forces armées a été atteint en Syrie : les USA ne peuvent attaquer massivement le pays sans toucher la Russie et provoquer une escalade du conflit, ce que ne veulent pas les globalistes ; la Russie ne peut laisser bombarder sans répondre, en coulant un bâtiment de guerre ou un avion américain, et provoquant aussi l'escalade du conflit. Cette forme d'impasse de la solution militaire peut conduire à une sortie politique sur ce dossier. Sans pour autant régler la question plus générale du rapport entre les USA et la Russie.



Karine Bechet-Golovko : Russie, la tentation néolibérale


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N'oublions pas que nous restons au Moyen-Orient… La Syrie est voisine du Liban, alors gardons toujours présent à l'esprit cette boutade, plutôt cet avertissement, d'Henry Laurens il n'y a pas si longtemps, en 1982 : « Si vous avez compris quelque chose au Liban, c’est qu’on vous l’a mal expliqué »… …




La Syrie, lieu d’une infinie complexité - source : Infographie Le Figaro


Tout cela est bien complexe… Lire aussi :
James Cogan : Les médias américains exigent une agression à grande échelle contre la Syrie

Israël Shamir : Les Russes n’en reviennent pas (traduction Marie Poumier)


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Sauver la face… une opération bidon contre la Syrie
Frappes contre la Syrie: de la provocation au ridicule

Intimidés par la Russie, les USA, la Grande-Bretagne et Macron se limitent à une frappe symbolique pour sauver la face


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Pour rigoler avec le Bazar-Henri Lévy… le seul "philosophe" à avoir lu intégralement et s'être référé à Jean-Baptiste Botul… jusqu'à quel point la démence s'affiche ! Incroyable !




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