Après avoir tenté d'ignorer le choix des Ivoiriens à l'élection présidentielle du 28 novembre dernier, et bombé le torse contre la communauté internationale pour son secours apporté à une population en détresse, Laurent Gbagbo lance une opération de séduction. Dans une intervention radio télévisée sur les antennes des chaînes publiques le 21 décembre 2010, il se présente en homme de dialogue, en faiseur de paix. Presque en humaniste. Gbagbo "tend la main à l'opposition, à Ouattara ainsi qu'à la rébellion armée qui le soutien". Mieux, il rappelle qu'on ne doit pas vouloir le pouvoir pour le pouvoir ; qu'il faut vouloir le pouvoir pour servir le peuple. Et de souligner, avec un accent pas loin du messianisme, "je ne veux pas que le sang d'un seul Ivoirien soit versé. Je ne veux pas de guerre". Alors qu'on attendait le battu sur le terrain qui grandit les perdants, c`est-à-dire la reconnaissance de la victoire sans bavure de l'adversaire, Gbagbo a voulu se fabriquer un manteau de pasteur. A moindre frais.
Les élections et le choix des Ivoiriens pour Alassane Ouattara, il les noie dans sa lecture, à lui, des élections. Une opération qui se résume au respect du verdict du Conseil constitutionnel. "La plus haute juridiction du pays qui n'est pas comparable à la Commission électorale indépendante, CEI, un simple organe administratif". Gbagbo reste donc droit dans ses bottes. Il a gagné les élections et demeure le président élu du pays ! Ceux qui lui contestent cette qualité sont contre la Côte d'Ivoire et cette attitude explique la guerre que ces derniers livreraient au pays. La ligne de défense n'a pas bougé. La souveraineté et la légalité ne se discutent pas. Et quand le Conseil constitutionnel de Côte d'Ivoire a parlé, tout le monde doit se coucher et digérer le verdict. Pour suivre Gbagbo, point n'était besoin d'aller aux élections. Grand électeur, souverain disposant du droit suprême, le Conseil constitutionnel composé de copains, qui se sont comportés en vrais coquins, pouvait le dispenser de cela...
En réalité, le discours de l'ancien chef de l'Etat montre une seule chose : Gbagbo est en retard sur la compréhension des événements et la dynamique en cours. Le fait accompli ne marche plus. Personne à l'intérieur comme à l'extérieur du pays n'accepte et n'acceptera son braquage électoral. Et comme il doit s'en rendre compte, malgré sa désespérante fuite en avant, en plus des Ivoiriens, le monde entier est en marche pour lui imposer le verdict des urnes et installer Alassane Ouattara, le président démocratiquement choisi par la population.
En s'adressant aux Ivoiriens par les médias audiovisuels publics qu'il a caporalisés et instrumentalisé, Gbagbo, certains le rêvaient, devait simplement se remettre dans le sens de l'histoire. Accepter et partir par la grande porte. Il en avait encore l'opportunité malgré les Ivoiriens tués, massacrés par les miliciens à sa solde. Avec un tel sang versé, et les horreurs commises sur les pauvres civils en plein sommeil, sous le couvre-feu, par la machine à tuer de Gbagbo, ce dernier ne peut pas se présenter en victime d'un complot, et jouer le martyr de la communauté internationale. Ce serait un recyclage trop facile. Même indécent. Au fond, parce qu'il ne voulait rien offrir, Gbagbo n'a rien offert. Rien qui puisse faire avancer la sortie de la crise. Une situation créée par son entêtement à confisquer le pouvoir.
En un mot comme en mille, Gbagbo a parlé trop tard. Un mur de morts et un fleuve de sang se sont dressés désormais entre lui et les Ivoiriens. Ses semblants de propositions sont en deça de la gravité de la situation. Gbagbo sait qu'il n'est plus président de Côte d'Ivoire. Il sait que les Ivoiriens le vomissent. Il sait que ses jours à la tête de ce régime tenu par quelques généraux sont comptés. Dans ces conditions, sa sortie radio télévisée du 21 décembre dernier apparaît, à bien des égards, comme un Adieu !
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