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vendredi 26 août 2016

"Que dire à un jeune de 20 ans"… Hélie Denoix de Saint Marc s'adresse à la jeunesse…




Hommage à Hélie Denoix de Saint Marc : « Que dire à un jeune de vingt ans ? »


Le commandant Hélie Denoix de Saint Marc s'est éteint le lundi 26 août 2013. Avec lui, c'est une figure emblématique qui disparaît. Malgré une vie mouvementée : résistant à 16 ans puis déporté, guerre d'Indochine, guerre d'Algérie, Putsch des généraux, prison… Hélie Denoix de Saint Marc était en paix avec lui-même. Il a mené une vie en accord avec son éthique, sans jamais démordre des principes qu'il avait fait siens. Dans un monde où « tout vaut tout », il a eu la force de rester en dehors des trahisons et des coups bas. Hélie Denoix de Saint-Marc a traversé la deuxième moitié du 20ème siècle, tel un aristocrate. Dans « Les sentinelles du soir » il déclarait vouloir « Simplement essayer d'être un homme ». Cette sérénité, cette droiture se retrouvent dans ses écrits. « Que dire à un jeune de vingt ans ? ». Ce texte est extrait du livre « Toute une vie » paru en 2004. Il a pour but de donner des conseils et des préceptes de vie, aux jeunes adultes, qui souhaitent réussir leur vie autrement, qu'en gagnant de l'argent, mais on y trouve aussi une critique des déviances de notre temps. À travers ce texte, c'est une part de l'âme et de l'esprit européens qui transparait, c'est un code de conduite, valable de Moscou à Brest, d'Athènes à Oslo. C'est un homme, riche de son expérience personnelle et de sa vie, qui écrit. Il lègue un trésor, les secrets du comportement, de la tenue, et du style qui doivent être ceux de l'homme européen, ceux d'un homme libre.



Quand on a connu tout et le contraire de tout,
quand on a beaucoup vécu et qu’on est au soir de sa vie,
on est tenté de ne rien lui dire,

sachant qu’à chaque génération suffit sa peine,
sachant aussi que la recherche, le doute, les remises en cause
font partie de la noblesse de l’existence.

Pourtant, je ne veux pas me dérober,
et à ce jeune interlocuteur, je répondrai ceci,

en me souvenant de ce qu’écrivait un auteur contemporain :

« Il ne faut pas s’installer dans sa vérité
et vouloir l’asséner comme une certitude,
mais savoir l’offrir en tremblant comme un mystère ».

À mon jeune interlocuteur,

je dirai donc que nous vivons une période difficile où les 
bases de ce qu’on appelait la Morale
et qu’on appelle aujourd’hui l’Éthique,

sont remises constamment en cause,

en particulier dans les domaines du don de la vie,
de la manipulation de la vie,

de l’interruption de la vie.

Dans ces domaines,

de terribles questions nous attendent dans les décennies à venir.
Oui, nous vivons une période difficile

où l’individualisme systématique,

le profit à n’importe quel prix,

le matérialisme,

l’emportent sur les forces de l’esprit.

Oui, nous vivons une période difficile
où il est toujours question de droit et jamais de devoir
et où la responsabilité qui est l’once de tout destin,
tend à être occultée.

Mais je dirai à mon jeune interlocuteur que malgré tout cela,
il faut croire à la grandeur de l’aventure humaine.

Il faut savoir,

jusqu’au dernier jour,

jusqu’à la dernière heure,

rouler son propre rocher.

La vie est un combat

le métier d’homme est un rude métier.
Ceux qui vivent sont ceux qui se battent.

Il faut savoir

que rien n’est sûr,

que rien n’est facile,

que rien n’est donné,

que rien n’est gratuit.

Tout se conquiert, tout se mérite.

Si rien n’est sacrifié, rien n’est obtenu.

Je dirai à mon jeune interlocuteur

que pour ma très modeste part,

je crois que la vie est un don de Dieu

et qu’il faut savoir découvrir au-delà de ce qui apparaît comme l’absurdité du monde,
une signification à notre existence.

Je lui dirai

qu’il faut savoir trouver à travers les difficultés et les épreuves,
cette générosité,

cette noblesse,

cette miraculeuse et mystérieuse beauté éparse à travers le monde,
qu’il faut savoir découvrir ces étoiles,

qui nous guident où nous sommes plongés

au plus profond de la nuit
et le tremblement sacré des choses invisibles.

Je lui dirai

que tout homme est une exception,
qu’il a sa propre dignité

et qu’il faut savoir respecter cette dignité.

Je lui dirai

qu’envers et contre tous

il faut croire à son pays et en son avenir.

Enfin, je lui dirai

que de toutes les vertus,

la plus importante, parce qu’elle est la motrice de toutes les autres
et qu’elle est nécessaire à l’exercice des autres,
de toutes les vertus,

la plus importante me paraît être le courage, les courages,

et surtout celui dont on ne parle pas
et qui consiste à être fidèle à ses rêves de jeunesse.

Et pratiquer ce courage, ces courages,
c’est peut-être cela


Hélie de Saint Marc

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