Qui ne risque rien n'est rien… sur le chemin de Damas, alors que les opinions ont cédé face aux faits…
on ne le dit assez : un âge n'en chasse pas un autre, tous les âges qu'on a vécu coexistent à l’intérieur de soi, ils s'empilent, et l'un prend le dessus au hasard des circonstances.

dimanche 7 janvier 2018

Une prière à la Vierge Marie, Shaghoura de Mahradeh… avec la Communauté syrienne de France, octobre 2017



Après nous avoir reçus au siège de la défense locale de Mahardeh en compagnie de notre amie Nena Awadmosa et du député Maher Qaourma,  Abouna George Shibly, que nous avons déjà rencontré lors de précédents voyages,  nous conduit à son église dédiée à la Vierge Marie…


Abouna George Shibly entouré de Nena Adwadmosa et du député Maher Qaourma au siège de la défense locale de Mahardeh

Cette église de Mahradeh abrite, tout comme celle de Sednaya, une Shaghoura particulièrement vénérée… C'est devant cette Shaghoura que l'Abouna dira avec le groupe de la Communauté syrienne de France qu'il reçoit une prière à la Vierge Marie… Visite de l'église, contemplation des icônes… À l'extérieur, l'Abouna nous indique un puits donnant sur l'église primitive souterraine…







La Shaghoura de Mahardeh


















Arrivée sur le parvis de l'église Saint George…


Puits vers l'église des temps primitifs


*   *   *

À Mhardeh [ محردة ], malgré la guerre, la vie ne perd jamais ses droits…
Mhardeh, ville chrétienne à la merci d’Al-Nosra

Cities and towns during the Syrian Civil War 



 *   *   *

Autres étapes du 8ème voyage de "solidarité avec le peuple syrien"
de la Communauté syrienne de France, octobre 2017



Mahardeh, ces enfants de 3 à 6 ans qui n'ont encore connu que la guerre… avec la Communauté syrienne de France, octobre 2017



Bonheur de se ressourcer lors d'un nouveau séjour à Mahardeh [محردة]… Retrouvailles avec notre amie Nena Awadmosa, qui déjà avait reçu deux fois la Communauté syrienne de France en 2015, qui d'autres fois alors qu'elle jugeait que la situation à Mahardeh était trop dangereuse pour que nous osions nous y aventurer était néanmoins venue à notre rencontre lors de notre passage à Hama…
En ce mois d'octobre 2017, Mahardeh connaissant une belle accalmie, Nena nous a conviés habiter en sa demeure. Toujours aussi discrète qu'efficace, Nena nous a aussi accompagnés dans toutes nos visites de Hama à Mahardeh.
Merci à la directrice de la crèche Rouna Zahlouk ainsi qu'à toutes les éducatrices et enfants de la crèche Martyr Karim Faracha de Mahardeh qui nous ont fait vivre des instants inoubliables d'intense émotion… Nous leur offrons quelques jouets collectés avant notre départ de France… Bonheur de voir se dessiner une joie non feinte sur le visage de ces enfants. C'est pourtant avec une profonde tristesse que nous songeons que ces bambins âgés de 3 à 6 ans n'ont encore connu que la guerre… Quel sera leur futur ?





Avant cette visite de la crèche, le soir de notre arrivée nous avions rendez-vous avec la comédie au Centre culturel de Mahardeh… Une comédie musicale "Gens de papier" ["#ناس_من_ورق"] inspirée de Fayrouz [فيروز]… Une belle représentation donnée par des artistes de talent… Des chansons qui vont droit au cœur de chacun, Syriens comme visiteurs… Merci à tous ces artistes exprimant face à la guerre pas encore vraiment terminée cette volonté de vivre quoi qu'il advienne… Notre présence est remarquée. En ces temps où les visiteurs étrangers se font rares, en ces temps où l'Occident est plutôt réputé pour son hostilité, cette seule présence ne peut qu'apporter un brin de réconfort à nos hôtes ici et, comme nous le constaterons, partout ailleurs…


Il était plus prudent d'acheter ses billets à l'avance
au très fréquenté Café Shop EMOJI de Mahardeh
















Les membres  du groupe "familiers" de Mahardeh ne peuvent ce soir-là que se remémorer cette nuit d'août 2015 pendant laquelle jusqu'au petit matin nous avions participé à une fête de mariage… Nous savions que pendant que les uns s'adonnaient à la fête, mangeaient, buvaient, chantaient, dansaient… d'autres, comme aujourd'hui,  prenaient leur tour de garde territoriale près des rives de l'Oronte à moins de deux kilomètres de là, sur l'une des multiples lignes de front de Syrie… Au théâtre ou de garde, tous, hommes ou femmes, auront sans doute participé dans la journée à de longues heures d'entraînement au maniement des armes… autant qu'ils auront peut-être répété avec la chorale de l'église…


Tard, après le spectacle Mahardeh reste encore animée, ici au Café Shop EMOJI



*   *   *



À la maison la Défense nationale de Mahardeh [الدفاع الوطني في محردة]
veille (discrètement) à notre sécurité…



*   *   *











L'accueil et le sourire de Rouna Zahlouk, la directrice de la crèche…






Sourires d'enfants… source d'énergie et détermination au combat… source de solidarité et fraternité…






































*   *   *









*   *   *





En remerciement envers la Communauté syrienne de France pour sa visite, les enfants ont confectionné une décoration affectueusement remise à chacun des membres du groupe…


Jean-Claude reçoit sa décoration des mains d'un enfant…







Simon Aw Wakil, chef de la Défense nationale de Mahardeh [الدفاع الوطني في محردة] nous a accompagnés pendant toutes nos visites…











*   *   *


Un abri, aménagé avec le soutien de la Communauté syrienne de France, où se rassembleront les enfants en cas de bombardement…


Ne jamais perturber les enfants… Ne jamais troubler la joie de vivre des enfants…
Toute descente dans l'abri devient un moment de fête et de jeux !

En sous-sol un abri a été aménagé, avec le soutien de la Communauté syrienne de France, où les enfants sont rassemblés lorsque les sirènes annoncent des bombardements en cours… Les enfants y sont conduits sans affolement, tout est fait pour leur épargner la peur… Dans l'abri ils seront invités à des jeux et à chanter… Un moment de danger sera ainsi mué, autant que possible, en instant de joie enfantine…


*   *   *

À Mhardeh [ محردة ], malgré la guerre, la vie ne perd jamais ses droits…
Mhardeh, ville chrétienne à la merci d’Al-Nosra

Cities and towns during the Syrian Civil War 


 *   *   *

Autres étapes du 8ème voyage de "solidarité avec le peuple syrien"
de la Communauté syrienne de France, octobre 2017





Face au courage d'une Mère syrienne, Mère de cinq martyrs… avec la Communauté syrienne de France, octobre 2017




La diffusion en 2012 de la série "Omar Ibn Al Khattab Al-Farouq" a révélé la légende de la poétesse, la forte Al-Khansa, et le martyre de ses quatre fils dans la bataille d'Al-Qadisiya… Quoique le contexte soit tout autre, cette histoire ne peut laisser indifférent les proches ou ceux seulement sensibles à la douleur de toutes ces mères syriennes qui ont offert à la mère patrie un ou plusieurs de leurs garçons…

La Syrie, par leurs portraits affichés dans les rues et les places publiques de leur ville, honore chaque jour ses martyrs, toujours et partout présents… L'intimité de chaque foyer abrite les photos-souvenirs en hommage aux enfants de la maison tombés pour la patrie… Un jour particulier, le 5 mai de chaque année, est dédié aux martyrs. Mais c'est peut-être le premier jour du printemps, le 21 mars, que la célébration des martyrs connaît la plus grande émotion… Ce 21 mars en Syrie est la fête des Mères… Qui sinon ces mères courageuses portent davantage les souffrances de la perte de leurs fils ? 






Parmi ces courageuses grandes dames syriennes ayant offert leurs fils à leur chère Syrie, l'une d'entre elles l'une d'entre elles se distingue… Zia Ali Al-Hamoui [ضياء علي الحموي ] qui a offert en martyrs ses cinq fils : Nimr [نمر],  Faouz [فوز],  Mohammed [محمد ],  Rahim [ رحيم ],  Digam [ضيغم].





Zia Ali Al-Hamoui, mère des martyrs, mère de tous les martyrs, "Mère la Victoire" du nom de son second fils Faouz [فوز] tombé pour la patrie nous a fait l’honneur de nous recevoir chez elle dans son village entourée des siens et notamment de sa fille sœur et de certains de ses petits-enfants… C'était dans le village de Teldra [تلدرة] non loin de Salamyeh [السلمية], à environ 33 km au sud-est de Hama. C'était lors de notre dernier voyage avec la Communauté Syrienne de France en octobre...







Elle nous raconte alors, tantôt d'une voix forte et déterminée, tantôt  avec plus d'émotion dans la voix, l'histoire du martyre de chacun de ses fils… 
- Nimr, le Tigre, est tombé au champ d'honneur le 19 décembre 2011, à Alkswa dans la campagne près de Damas alors qu'il servait dans les rangs de l'Armée arabe syrienne…
Faouz, la Victoire, est tombé  un mois et demi après, le 6 février 2012, lors d'une attaque terroriste dans la province de Hama…
- Son troisième fils Mohammed a pris le chemin du martyre le 10 mai 2012 alors qu'il repoussait des attaques terroristes dans la campagne de Salamyeh…
- A suivi Rahim, tombé en martyr le  26 février 2015 dans la province de Quneitra… 
- C'est le 29 août 2017 que le martyr Digam protégeant sa ville Teldra et sa famille a été tué lors d'une brutale incursion terroriste… 

Zia Ali Al-Hamoui conclut en nous disant : "J'ai donné cinq martyrs, et j'ai encore trois enfants jeunes !"… Les djihadistes sont à 500 mètres dans la campagne face à sa maison.

Mère Victoire comme toutes les mères de Syrie, Zia Ali Al-Hamoui reste déterminée, quoi qu'il arrive et avec l'aide de Dieu, à faire face au terrorisme jusqu'à la mort pour la paix en Syrie. Sa confiance en la loyauté et la proximité du président Bachar el-Assad est entière. 























*   *   *

لأم : ضياء علي الحموي
الأب : فواز أحمد الحرك
المكان : السلمية قرية تلدرة

لما استشهد نمر .. ابني الأول .. ركضت ع خزانة المونة .. و كسرت كل القطارميز ، الله خلا الخزانة كلها توقع و تنكسر حتى غضبي يتفتت معها و صوتي ما يطلع .. انا ابني شهيد .. و لازم ما صرخ و الألم يغلبني لأنو الشهادة أكبر من انو نكافيها بالبكي 

و لما استشهد ابني التاني.. فوز .. كنت عازمتو عتبولة و مقالي متل ما بيحب .. و بعدني ناطرتو عالغدا .. سمعت وقتها انفجار ، الأرض تحت رجلي هزت و رج معها قلبي .. و ما كان قلبي عميكذب 

شهيدي التالت .. محمد .. خلق ب 6 ايار الساعة 11 و استشهد ب 6 ايار الساعة 11 و عروسه بعدها ناطرته ليشتروا التلبيسة بعد يومين ... بس العرس الكبير كان بيلبقلو أكتر

ابني رحيم الشهيد الرابع .. أخد كل حزني. . كان ابن 16 سنة .. و تار بلده و أخواته ما بيغيب عن باله لحظة ، آخر مرة غص و هو طالع عالدرج .. قلتلو كيف ما بتودعني .. ركضت كأني نسمة هوا ..ضميته و حسيته عميشم ريحتي حتى تبقى بذاكرته و عرفت انو ما رح يرجع .. كانت الدني برد كتير بس روحي نار ولعانة. . و لهلق بعدها 

ضيغم .. ابني و شهيدي الخامس .. مخترع .. دفعولوا ملايين لياخدوا اختراعه لبرا و ما رضي .. ترك كل شي بالشام .. و رجع تطوع بالسلمية ليسد الفراغ اللي تركوه أخواته. . و بليلة سودة هجموا فيها الوحوش سمعت رصاص كسر كل العتم . . ركضت .. وصلت عالمشفى ، ما كانوا بدهون يخلوني فوت قلتلهم انا منيحة .. فتت و كان رابط سلك عصدره لانو رصاصة دخلت بقلبه .. فكيتلو السلك و قريت الفاتحة لروحه و روح 11 شهيد ملقحين جنبو عالارض

و حمدت ربي انو ولادي استشهدوا و الرصاص بصدرهم مو بالظهر .. خلقوا رجال و ماتوا رجال .. و العالم بتشهد بأخلاقهم و أوادميتهم 

هي كانت كلمات ام فوز .. امرأة بحجم سورية .. و بتشبها كتير .. ولادة الحياة و كتير من العنفوان بقدر ما هي ولادة الشهدا 
كانت الغصة رح تقتلني و انا عمأسمع حديثها .. بس كل كلمة ( الحمدلله ) منها ، كل نظرة بعيونها حاملة جبروت جبال تعطيني قوة لتمنع الدمع ينزل
كرمال أم الفوز .. عظيمة هذا الزمان .. و كرمال كل أمهات الشهداء يلي صبرهم مد بعمر الأرض عنا ملايين من السنين
كرمال الدم الطاهر اللي فتح بواب الحزن بالقلوب و حوله لطاقة ع منخلق منها الحياة رغما" عن أنف الموت كل يوم .. ما لازم نهدر هالتضحيات ، و لا نتخاذل او نضعف ، و لا نسكت عن غلط أو تسيب .. و لا نسمح لطير طاير يمس كرامتنا و بعدها موجودة بفضلهم 
يا خجلتنا من الزمان لو ما طلعنا قد الحمل ... متل سنديانة السلمية .. ام الفوز 

صبر جميل و بالله المستعان
المجد و الخلود لأرواح الشهداء و لذويهم الصبر و السلوان

Source : أم الأولياء الصالحين : الأول .. أنا ابني شهيد .. التاني بعدي ناطرتو عالغدا
الثالث العرس الكبير بيلبقلو أكتر .. الرابع : أخد كل حزني .. والخامس الرصاص كسر العتم


La mère : Zia Ali Al-Hamoui [ضياء علي الحموي]
Le père : Fawaz Ahmed Al-Harak [فواز أحمد الحرك]
Lieu : Village de Teldra [تلدرة], Salamyeh [السلمية]

Quand mon fils Nimr [نمر] est tombé martyr pendant l’offensive sur Salamyeh, j’ai couru vers le buffet à provisions et j’ai cassé tous les bocaux… Dieu de par sa volonté a fait tomber le buffet qui s'est brisé… pour que ma colère se brise avec lui… et aussi ma voix. Mon fils est tombé en martyr [شهيد ]...  Je ne dois pas crier quand la souffrance m’accable… La Chahadeh [الشهادة ] est plus grande récompensée par des larmes.

N.B. : La Chahadeh [الشهادة ] est le Martyre… Quand un homme tombe au combat pour la défense de la mère patrie, il est Chahid [شهيد ]… aux parents du Chahid l'on dit : Félicitation pour la Chahadeh.

Quand mon deuxième fils Faouz [فوز] est tombé en martyr,  je venais de l'inviter à manger un taboulé et une friture… J’ai alors entendu une explosion, la terre sous mes pieds a tremblé… et mon cœur s'est mis à palpiter... Mon cœur m’a jamais trompée. J’attends toujours que mon fils Faouz vienne déjeuner avec moi…

Mon troisième martyr c’est Mohammed [محمد ]. Il est né un 6 mai à 11 heures, et il est tombé en martyr un 6 mai à 11 heures. Il était fiancé et sa fiancée l’attend toujours pour acheter le talbisseh [التلبيسة]… Cet achat du talbisseh était prévu pour le 8 mai... mais ce que nous avons fait pour son enterrement lui convient encore plus… il était le marié...

N.B. : Le talbisseh  [التلبيسة] est ce que l’homme offre à sa fiancée le jour des fiançailles :  une alliance, une bague, un collier et des boucles d’oreilles, en or bien sûr. En Syrie, quand un jeune-homme célibataire tombe en  martyr, on dit lors de son enterrement que c’est son mariage.

Mon fils Rahim [ رحيم ] est le quatrième martyr… Lui a pris toute ma tristesse. La vengeance pour son pays et ses frères ne l'avait jamais quitté. La dernière fois qu'il est venu me rendre visite, en montant les escaliers avant de partir  il avait un goût amer… Je lui ai dit :  "Comment ?  Tu pars sans me dire au revoir ?"… J’ai couru vers lui comme un courant d’air, je l’ai embrassé et j’ai alors senti qu’il respirait intensément mon odeur comme s'il voulait qu’elle reste imprimée en sa mémoire. J’ai su qu’il ne reviendrait plus. À cette époque il faisait très froid, j’ai senti en mon âme des flammes envahir mon corps, pour toujours.

Digam [ضيغم] mon fils est le cinquième martyr. Il est un inventeur. Des étrangers lui ont proposé des millions pour acheter son invention, mais il a refusé. Il a tout quitté à Damas, il est retourné ici et s'est présenté comme volontaire dans l’Armée syrienne à Salamyeh pour combler le vide laissé par ses quatre frères martyrs.

Et dans cette nuit noire, les monstres nous attaquent… J’ai entendu des tirs de balles briser l’obscurité de la nuit. J’ai couru vers l’hôpital… Ils ne voulaient pas me laisser entrer, j’ai leur dit que je vais bien. Je suis entrée dans sa chambre, il était branché par un fil posé sur sa poitrine… Une balle s'était logée dans son cœur.  J’ai retiré le fil… Et j'ai alors lu la Fatiha [الفاتحة], pour lui ainsi que pour les 11 martyrs qui gisaient près lui… …

[Un très grand merci à Rima pour cette traduction.]



*   *   *

Ayons une pensée pour toutes les mères courageuses du Moyen-Orient…

La Syrie rend partout hommage aux martyrs victimes d'une agression étrangère…











Les djihadistes sont à 500 mètres en face de la maison de Mme Zia Ali Al-Hamoui




 *   *   *

Autres étapes du 8ème voyage de "solidarité avec le peuple syrien"
de la Communauté syrienne de France, octobre 2017