Qui ne risque rien n'est rien… sur le chemin de Damas, alors que les opinions ont cédé face aux faits…
on ne le dit assez : un âge n'en chasse pas un autre, tous les âges qu'on a vécu coexistent à l’intérieur de soi, ils s'empilent, et l'un prend le dessus au hasard des circonstances.

lundi 23 janvier 2017

Pèlerinage à Palmyre, avec la Communauté Syrienne de France…



Pourquoi ne pas laisser courir le diable si vous pouvez en profiter ?
(12 décembre 2016)
"… Une surprenante 'distraction' des aviations alliées qui a permis à l’État islamique de réinvestir Palmyre en traversant le désert…"
Washington fait occuper à nouveau Palmyre par Daesh
Daesh a repris Palmyre à l’issue d’une attaque surprise, entre le 9 et le 12 décembre 2016.
5 000 jihadistes sont arrivés de manière coordonnée à la fois de Rakka et de Mossoul pour prendre en étau le millier de soldats syriens défendant la ville. L’Armée arabe syrienne a eu juste le temps de faire évacuer des civils et de détruire son arsenal avant de se replier.
Les États-Unis ont poussé Daesh à envahir la partie sunnite de l’Irak, en juin 2014, afin de couper les communications terrestres entre Téhéran et Damas, ultime étape de la « route de la soie ». Une fois pris Mossoul (Irak), Daesh s’était étendu à Palmyre (Syrie) en mai 2015. Ses troupes avaient alors franchi la frontière sous les yeux des forces états-uniennes qui n’étaient pas intervenues et n’avaient pas même donné l’alerte. Cependant, la ville avait été libérée en mars 2016.
Pour que Daesh puisse occuper à nouveau Palmyre, les forces états-uniennes ont à la fois ouvert une route vers le désert syrien depuis Mossoul —qu’elles sont censées encercler—, et ont cessé leurs bombardements de la province de Rakka.
Massée à Alep, l’Armée arabe syrienne n’a pas eu le temps d’envoyer des renforts à Palmyre qui est rapidement tombée face à des assaillants, cinq fois supérieurs en nombre.

Daesh à Palmyre : la coalition occidentale a-t-elle laissé courir le diable ?


* * *

Pèlerinage à Palmyre, avec la Communauté Syrienne de France


Pour accéder à la carte inter-active présentant la situation en Syrie le 2 novembre 2016  cliquez sur le lien : Agathocle de Syracuse

Départ tôt de Damas… Toujours avec notre chauffeur, Abou Seliman, engagé à Tartous… Les autorités de Sécurité de Syrie ont été informées de notre désir de nous rendre à Palmyre. Nous avons obtenu leur accord et avons reçu l'assurance d'être escortés tout au long du trajet ; un relai sera pris à la limite de chaque secteur. Effectivement à chaque relai nous étions déjà attendus et pris en charge avec sympathie et bonne humeur… Cela malgré les dangers potentiels…


Impératifs de sécurité : au départ de Damas emprunter la route direction Nord, vers Homs


Daesh est jamais très loin : au plus proche 9 km, au plus loin 23 km.
Tout près compte tenu de la rapidité de leurs engins de déplacement.

Palmyre est située à 220 km au Nord-Est de Damas. Or cette route entre Damas et Palmyre, la plus directe, traçant vers le Nord-Est et passant par Ed-Dumayr, El-Basiri, Khunayfis, n'étant pas sécurisée nous avons dû remonter vers Homs au Nord puis, là, bifurquer vers l'Est. Après Homs nous nous sommes ainsi engagés dans un couloir (voir la carte) dans lequel les troupes de Daesh n'étaient jamais très loin, tant au Nord qu'au Sud, puis à l'Est une fois arrivés à Palmyre. Une présence estimée pour la plus proche à 9 km et jamais plus éloignée de 23 km : tout près compte tenu de la rapidité de leurs engins de déplacement.




Une escorte vigilante et déterminée… mais aussi pleine de bonne humeur !




Nous étions alors entrés dans la steppe de Syrie… Une steppe qui couvre près des deux tiers de la superficie du pays ; c’est le prolongement-Nord du terrible désert d’Arabie, un désert de roche où les températures avoisinent les 38° en été, où les précipitations ne dépassent guère 15 cm. La région n’est pourtant pas aussi désertique qu’on l'imaginerait : maigre végétation, de l’herbe borde la route, nourrissant, nous dit-on, les gazelles de la steppe. C’est cette végétation qui a permis aux Bédouins d’élever depuis des millénaires leurs troupeaux de moutons, de chèvres, de chameaux. Un mode de vie longtemps rythmé par les changements de saison. Un désert toujours habité par des tribus nomades, progressivement sédentarisées. Rares villages dispersés tout au long de la route. Plus ou moins abandonnés.


Soudain, une citadelle… Le château arabe, Qala'at ibn Maan. Il annonce Palmyre…

Soudain, une citadelle juchée au sommet d'une colline apparaît… le château arabe, Qala'at ibn Maan. Il annonce Palmyre…

Surgit du désert tel un mirage, Palmyre, entourée de l’oasis de Tadmor, les longues palmes vertes de ses dattiers s'étalent telles un rempart contre l'immensité du désert, à perte de vue l'écrin foisonnant de dizaines de milliers de palmiers, oliviers, grenadiers…

Habitée dès le paléolithique, Palmyre connut son âge d’or aux IIe et IIIe siècles après J.-C., grâce à son rôle d’étape carava­nière. Au cœur de la steppe, Palmyre, reine du désert, exhale un parfum de légende. Parfum d'aventures et de mystères, évocation des caravanes chargées d'épices et de soie ; parfum de femme aussi, celui de la fière Zénobie, souveraine arabe qui osa défier l'Empire romain.




Le château arabe, Qala'at ibn Maan, domine toute l’oasis de Tadmor

Plus personnel, nous envahit une pensée pour tous ces héros liés à l'histoire récente de Palmyre et dont le souvenir habitent ces lieux… C'est presque religieusement que nous nous aventurons alors sur le site… Un pèlerinage… Nous entrons en des lieux sanctifiés où notre présence insouciante serait presque sacrilège. Nous pensons d'autant plus fort à ce jeune soldat russe Aleksander Prokhorenko, à tous ces autres martyrs syriens… Ahmad Ali Al-Kousa, 18 ans, originaire de Homs… Shaheed Abbas, 17 ans, combattant du Hezbollah… et tous les autres martyrs, inconnus de nous, qui ont donné leur vie à Palmyre, et sans le sacrifice desquels nous ne serions là aujourd'hui…


Et comment ne pas avoir une pensée tout particulière pour Khalid al-Asaad, ancien directeur du site archéologique décapité le mardi 18 août par les voyous de l’État islamique. Ces islamistes qui ont ensuite suspendu le corps ensanglanté de Khalid al-Asaad à une colonne romaine sur une des principales places du site antique et diffusé les photos sur les réseaux sociaux. Nous ne savons où… Laquelle ? Nous n'osons le demander… Khalid al-Asaad est partout présent à Palmyre.

Temple de Football


Inscription de Daesh sur le temple de Bêl : "Restera"
Le logo de l'État islamique étant : "Restera et Élargira" - "باقية وتتمدد"




Théâtre


Sur la scène du théâtre, là où ont été commis et exhibés certains des crimes les plus odieux de l'État islamique


Du théâtre, vue sur la Grande Colonnade et le château arabe Qala'at ibn Maan


En ville… L'un des hôtels annonçait une réouverture en mars 2017, pour notre prochain voyage !


On remarquera l'inscription figurant systématiquement sur chaque immeuble : "мин нет". Les Russes savent faire du bon boulot.

* * *

Le musée archéologique présentait une belle sélection de bustes funéraires, de sarcophages et de momies, retrouvés dans la vallée des Tombeaux. On pouvait aussi y voir des pièces de monnaie frappées à l’effigie de Zénobie et deux belles mosaïques provenant des villas proches du temple de Bêl. Devant l'entrée siègeait un lion monumental (fin du 1er siècle avant JC) provenant du temple de la déesse Allat, qui se trouvait à l'entrée de la colonnade transversale.Le musée ethnographique se trouvait près du temple de Bêl. Il était consacré au mode de vie bédouin à travers des costumes, des exemples d’artisanats et la reconstitution d’un intérieur. Ces deux musées ont été saccagés, pillés, leurs plus belles pièces ont été vendues à l'étranger via la Turquie…






* * *


Au carrefour, face à l'entrée de la base russe



Signalisation de la base russe







* * *


Cartes :




* * *



Palmyre libérée : une reconquête symbolique et stratégique (1/2) #DébatF24 du 29 mars 2016



Palmyre libérée : une reconquête symbolique et stratégique (2/2) #DébatF24 du 29 mars 2016



Le groupe État islamique a repris la ville antique de Palmyre, le dimanche 11 décembre 2016

La ville antique syrienne de Palmyre a été reprise par l'État islamique, a reconnu dimanche 11 décembre 2016 le gouverneur de la province de Homs à la télévision d'État. L'armée syrienne s'est redéployée autour de la ville… Le vendredi 20 janvier 2017, le Professeur Maamoun Abdulkarim, directeur général des Antiquités et Musées de Syrie (DGAM) a révélé que selon des images satellite deux nouveaux sites avaient été détruits par les djihadistes de l'État islamique, le Tétrapyle et la façade du Théâtre romain, daté du premier siècle de notre ère, qui lors de la première occupation de la ville de mai 2015 à mars 2016 avait été utilisé pour des exécutions publiques.

Le Tétrapyle, l'un des plus célèbres monuments de Palmyre, a été érigé à l’époque de Dioclétien à la fin du IIIe siècle. C’est un soubassement carré soutenant quatre ensembles de quatre colonnes à chaque coin. Sur les 16 colonnes, une seulement était d'origine tandis que les autres avaient été reconstruites par le service des Antiquités syriennes en 1963. Les colonnes originales étaient en granit rose venu d’Égypte.











*   *   *


Entretien avec le Professeur Maamoun Abdulkarim, directeur général des Antiquités et des Musées de Syrie (DGAM) - (juin 2015)



*   *   *

Iconem : Posts tagged Syria
Iconem : Notre mission


*   *   *




Triade palmyrénienne : le dieu lunaire Aglibôl et le dieu du soleil Malakbêl entourant le dieu suprême Beelshamên
[Ier siècle ap. J.-C., trouvée près de Bir Ouereb, dans le Ouadi Miyah, Syrie, acquise en 1945 par le musée du Louvre]




Un prêtre arabe catholique de Syrie a invité à Damas le "président d’un grand pays" …



Nous avons répondu à l'invitation
avec la Communauté Syrienne de France

Dès le mois de mai 2012 les RR.PP. Élias Zahlaoui et Jean-Paul Devedeux adressaient chacun une lettre ouverte au président François Hollande… "président d'un grand pays" comme il se qualifiait lui-même tout enorgueilli de ses nouvelles fonctions… Hélas, le premier entretien télévisé sur France 2 de ce "président d'un grand pays" signa une immense déception pour tous ceux qui attendaient une révision de la politique française à l'égard du monde arabe, au Moyen-Orient et en Syrie en particulier après les désastreuses initiatives du gouvernement précédent hypnotisé par leur gourou Bernard-Henri Lévy… Lettres ouvertes qui invitaient François Hollande à prendre sérieusement connaissance des dossiers. Quoi de plus normal pour un président normal prenant ces nouvelles fonctions. François Hollande était invité à Damas pour s'informer. Il y aurait était reçu par le président Bachar el-Assad. Reçu, lui-même ou n'importe quel émissaire élyséen de confiance. Que nenni ! Pas plutôt entré en fonction, le matin même de cet entretien, un 29 mai - date dont il ignore sans doute encore la signification profonde pour tout Syrien - coup de canon ! Le "président d'un grand pays" EXPULSE l'ambassadrice de Syrie en France, madame Lamia Chakkour !

Une relecture aujourd'hui de ces lettres ouvertes écrites en 2012 leur conserve toute leur actualité. C'est dire tout le temps perdu. Cinq années pour rien. Alors qu'au printemps 2012, "président d'un grand pays" vous aviez l'opportunité de prendre en mains toutes les cartes qui vous auraient permis de changer le cours de l'Histoire, une histoire dont à présent vous ne sortez que par une porte dérobée !

Que de temps perdu ? Du temps perdu pour contribuer à résoudre des conflits. Cinq années, malheureusement, pendant lesquelles tout un peuple a continué de souffrir. Pendant lesquelles les Syriens ont dû continuer à se battre et à mourir vaillamment en martyrs… Cinq années pendant lesquelles des millions de Syriens parmi les plus pauvres ont dû être déplacés. Cinq années pendant lesquelles des centaines de milliers d'autres Syriens ont été jetés sur les routes de l'exil…

Votre refus de vous informer des dossiers pour combattre de front le terrorisme islamique toutes tendances confondues, votre complicité progressivement affirmée avec ces fanatiques a certes contribué à accroître le malheur au Proche-Orient, mais par là-même vous avez aussi attiré la désolation sur le "grand pays" dont vous vous enorgueillissiez tant d'être le "président" il y a moins de cinq ans. Ces milliers de réfugiés qui affluent sur le sol français n'auraient-ils pas pu être évités. Et surtout - la question doit être posée - une autre politique n'aurait-elle pas pu faire que la France ne soit frappée par une série sanglante d'attentats ? De "Charlie Hebdo", du "Bataclan", de la "Promenade des Anglais", de la décapitation du père Jacques Hamel dans son église de Saint-Etienne-du-Rouvray quelles sont les incuries qui ont fait que ces drames aient pu se produire en France ? Un jour il conviendra de l'établir.

Scandalisés, nous le sommes d'autant plus que dès les premiers jours de votre entrée en fonction la main vous était tendue, une invitation pressante vous était lancée pour prendre sereinement connaissance des dossiers affranchi de l'hypnose de toute coterie. Vous n'avez rien voulu entendre !


Le père Élias Zahlaoui reçoit la Communauté Syrienne de France en son église Notre-Dame de Damas Koussour

Vous n'avez rien entendu. Mais ces lettres ouvertes des RR.PP. Élias Zahlaoui et Jean-Paul Devedeux étaient largement diffusées sur les réseaux sociaux et lues par de nombreux Français. Parmi ces Français certains ont pris au mot l'invitation qui vous était lancée à vous-même de vous rendre en Syrie. Ces Français ont voulu voir, s'informer, comprendre sur place et indépendamment de la propagande servie par une presse fonctionnarisée par des subventions publiques et une dépendance à des ressources publicitaires servies par des groupes financiers dont les centres de décision résident à l'étranger. Malgré les obstacles s'offrent à quiconque veut se rendre en Syrie légalement, par les passages les plus officiels et contrôlés, de nombreuses voies…

Un certain nombre d'entre nous ont voyagé accompagnés par la Communauté Syrienne de France… En Syrie tous ont pu librement circuler là où les restrictions dues à leur sécurité le permettaient… Ils ont pu entrer en contact librement avec des Syriens partout et de tous les milieux, ils ont été reçus par des personnalités politiques, religieuses, militaires, culturelles, de l'entreprise, du journalisme, de l'enseignement, de la santé, de la sécurité, des organisations humanitaires… Nous sommes tous revenus libres de témoigner selon nos rencontres, nos observations, notre expérience personnelle… et chacun d'entre nous s'en fait un devoir, en privé, en public, sur les réseaux sociaux, dans les grands médias quand nous y sommes reçus !

Que nos remerciements les plus vifs aillent aux RR.PP. Élias Zahlaoui et Jean-Paul Devedeux pour nous avoir éveillés, un éveil sans lequel nombre d'entre nous n'auraient pas fait le voyage…

Témoignons d'une attention toute particulière pour le père Élias Zahlaoui qui a bien voulu nous recevoir longuement lors de notre dernier passage à Damas. Un entretien ô combien passionnant, enrichissant, vivifiant… Que le père Élias Zahlaoui soit chaleureusement remercié pour l'aide qu'il nous a apportée à un moment crucial de notre voyage… Souhaitons lui de pouvoir encore servir longtemps son pays, la Syrie !


*   *   *


الأب الياس زحلاوي


Damas, le 30 mai 2012

« La vie, la liberté et la dignité sont pour TOUS ! »

Je m’en voudrais, en ce 30 mai 2012, de troubler l’euphorie de votre récent succès aux élections présidentielles, tout autant que la joie de vos électeurs, et l’espoir, après tout, des Français, maintenant que vous êtes, pour cinq ans, le Président de la République Française.

Aussi ai-je tenu à vous écouter de bout en bout, hier soir 29 mai, lors de votre interview sur TV5. Je nourrissais le vague espoir de voir définitivement tournée, la politique de cirque de votre burlesque prédécesseur. À vous écouter, je me suis rapidement surpris à m'interroger sur le bienfondé de mon attente. Il m'a fallu vite déchanter. Je restais ébahi devant votre visage bon enfant, pendant que vous vous permettiez de prononcer des jugements péremptoires, sur tout et sur tous, sans la moindre nuance, ni hésitation.

Mais quand je vous ai entendu parler de la Syrie et de son Président, j'ai bien cru entendre la voix même des Maîtres qui vous ont juché sur ce premier poste de France, dans l'unique but de mener à bien le projet de destruction de la Syrie, que votre prédécesseur a été incapable de conduire jusqu'au bout.

Pour une première à la Télévision, c'en était bien une ! Je vous attends de pied ferme, lors des tout proches désenchantements des Français. Pour ma part, vieux connaisseur de la France et des Français, je me suis surpris à me dire : quelle dégringolade !…

M. le Président, avant de poursuivre, il est une coïncidence historique que je me dois de vous signaler, et que vous ignoriez sans aucun doute. Sinon vous auriez évité de vous laisser interviewer, un 29 mai ! En effet, il est un autre 29-Mai, au cours duquel la France s'est misérablement déshonorée.

C'était en 1945. En ce jour même, la France « MANDATAIRE », s'est permis de bombarder le Parlement Syrien à Damas, pour, ensuite, laisser ses soldats noirs, assassiner les 29 gendarmes, en poste, dans ce haut-lieu de la démocratie. Le saviez-vous ? M. le Président, n'est-il pas temps, pour la France, et, donc, pour vous-même, de réfléchir pour de bon sur cette ignoble politique qui, depuis 1916, année des accords aussi secrets que honteux, appelés depuis « Accords Sykes-Picot », la conduit sur les ordres du Sionisme, à détruire la Syrie et le Monde Arabe ?

N'y avait-il de clairvoyant et de noble, dans toute la France d'alors, que M. Aristide Briand, ministre des Affaires étrangères, pour avoir donné à votre Consul Général à Beyrouth, M. Georges Picot, en date du 2 novembre 1915, en prévision de ces accords, cette consigne claire et perspicace : « Que la Syrie ne soit pas un pays étriqué… Il lui faut une large frontière, faisant d'elle une dépendance pouvant se suffire à elle-même » ?

Pour une Syrie « se suffisant à elle-même », et telle que l'avait, déjà, tracée, en 1910, une carte géographique émanant de ce même ministère des Affaires étrangères, vous devez savoir ce qu'il en fut, après qu'elle fût amputée, au Nord-Ouest de la Cilicie, au Nord-Est de la région de Mardine, dans ce qui est l'Irak actuel, de Mossoul, à l'Ouest du Liban, au Sud de la Jordanie et de la Palestine, pour être décapitée, en 1939, d'Antioche et du golfe d'Alexandrette, offerts en cadeaux à la Turquie ! [...]

M. le Président, il est aussi une question capitale, que je me dois, en tant que citoyen arabe de Syrie, de vous poser, ainsi qu'à tous les « leaders » occidentaux : « Pourquoi vous faut-il systématiquement assassiner les peuples arabes et musulmans ? »

Vous l'avez déjà fait en dressant, entre 1980-90, l'Irak contre l'Iran, cet Irak, dont le malheureux Saddam Hussein était qualifié de « Grand Ami », tant par Donald Rumsfeld que par Jacques Chirac ! Ce fut aussitôt après, le guet-apens du Koweït, entraînant la guerre contre l'Irak, suivi d'un blocus de 13 ans, qui a causé à lui seul, d'après les rapports américains mêmes, la mort de 1 500 000 enfants irakiens ! Ce fut ensuite la chevaleresque « guerre contre le terrorisme »… en Afghanistan ! Aussitôt suivie d'une nouvelle guerre contre l'Irak.

Quant à l'immortelle épopée de l'OTAN, en Libye, conduite par « le général-philosophe », Bernard Henri Lévy, elle vint, à nouveau, compléter ces horreurs, sous prétexte de protection des droits de l'homme ! Et voici que, depuis 15 mois, tout l'Occident s'acharne contre la Syrie, oubliant une infinité de problèmes très graves, à commencer par le conflit israélo-arabe, qui menacent, réellement, la survie de l'humanité !

Or, toutes ces tragiques politiques occidentales, vous les pratiquez sans honte et sans vergogne, sous couvert de tous les mensonges, de toutes les duplicités, de toutes les lâchetés, de toutes les contorsions aux Lois et Conventions Internationales. Vous y avez en outre engagé ces instances internationales, que sont les Nations-Unies, le Conseil de Sécurité et le Conseil des droits de l'Homme, alors qu'elles n'ont existé que pour régir le monde entier vers plus de justice et de paix !

Seriez-vous donc, en Occident, en train de nourrir l'espoir stupide de mettre fin de cette façon à l'Islam ? Vos savants et vos chercheurs ne vous ont-ils pas fait comprendre que vous ne faites que provoquer un Islam outrancier, que vous vous obstinez d'ailleurs à financer, à armer et à lâcher avec nombre de vos officiers, un peu partout dans les pays arabes, et surtout en Syrie ? Ne vous rendez-vous pas compte que ce faux Islam se retournera, tôt ou tard, contre vous, au cœur de vos capitales, villes et campagnes ?

Pour tout cela, laissez-moi vous rappeler, moi simple citoyen de Syrie, que cet Islam que vous armez et dressez contre le Monde Arabe, en général, et la Syrie, en particulier, n'a rien à voir avec le véritable Islam, celui-là même que la Syrie a connu, lors de la Conquête arabe, ainsi que l'Égypte et, enfin, l'Espagne. Faut-il vous rappeler que les historiens occidentaux, dont des historiens juifs, ont dû reconnaître que l'Islam conquérant s'est révélé être le plus tolérant des conquérants ?

Ou ne seriez-vous, leaders occidentaux, dans vos différents pays, repus d'opulence et de « grandeur », que les vils exécuteurs des projets sionistes, depuis ces fameux Accords Sykes-Picot, et l'ignominieuse « Promesse Balfour », jusqu'à ce jour, et pour longtemps, semble-t-il, toujours empressés d'apporter à Israël, tous les soutiens possibles, connus et secrets, à tous les niveaux, aussi bien politiques et diplomatiques, que militaires, financiers et médiatiques ?

Oui, pourquoi vous faut-il assassiner et détruire des peuples entiers, pour qu'ISRAËL, SEUL, puisse enfin vivre et survivre ? Est-ce de la sorte que vous cherchez à réparer votre terrible complexe de culpabilité vis-à-vis des juifs, dû à un antisémitisme plus que millénaire et proprement occidental ? Vous faut-il le faire au prix de l'existence même de ces peuples arabes et musulmans, au milieu desquels les juifs avaient mené une vie quasi normale, faite de cordialité, voire, de riche collaboration ?

Si mes interrogations vous paraissent exagérées ou outrancières, permettez-moi de vous prier de lire ce qu'ont écrit sur l'emprise du Sionisme aux États-Unis, des hommes comme John Kennedy et Jimmy Carter, et des chercheurs courageux et connus, comme Paul Findley, Robert Dole, David Duke, Edward Tivnan, John Meirsheimer, Stephen Walt, Franklin Lamb, et surtout Noam Chomsky.

Pour ce qui concerne l'emprise du Sionisme en Europe, je m'en tiens aujourd'hui à la France seule. Vu la responsabilité qui est la vôtre, vous est-il permis d'oublier ou d'ignorer ce qu'ont, si courageusement, écrit : Roger Garaudy, Emile Vlajki, Pierre Leconte, Régis Debray, et surtout les juifs Michel Warshawsky, Stéphane Hessel, Serge Grossvak et le professeur André Noushi ?

Si par impossible, tous ces noms ne vous disaient rien, laissez-moi vous rappeler quelques noms si connus en Israël même, qu'il serait malhonnête de les ignorer et d'ignorer ce qu'ils ont osé dire depuis quarante, voire, cinquante ans, et certains bien avant la « création » d'Israël : Martin Buber, Albert Einstein, Yshayahou Leibowitz, Israël Shahak, Susan Nathan, Tanya Rheinhart.

Pour finir, laissez-moi vous rappeler un texte trop connu pour passer inaperçu. Il date du mois de février 1982. À lui seul, il constitue et condense l'implacable dictat sioniste, imposé depuis des dizaines d'années, à toute la politique occidentale. Il a paru dans la revue sioniste « KIVOUNIM », publiée à Jérusalem. Il s'agit d'un article intitulé « Stratégie d'Israël dans les années 1980 », et il porte la signature de M. Oded Yinon. Je me contente d'en citer un seul paragraphe, reproduit (p.62) dans un livre récent, intitulé « Quand la Syrie s'éveillera… », paru, à Paris, chez Perrin, en 2011. Ses auteurs sont Richard Labévière et Talal El-Atrache. On y lit textuellement :
« La décomposition du Liban en cinq provinces, préfigure le sort qui attend le monde arabe tout entier, y compris l'Égypte, la Syrie, l'Irak et toute la péninsule Arabe. Au Liban, c'est un fait accompli. La désintégration de la Syrie et de l'Irak en provinces ethniquement ou religieusement homogènes, comme au Liban, est l'objectif prioritaire d'Israël, à long terme, sur son front Est ; à court terme, l'objectif est la dissolution militaire de ces États. La Syrie va se diviser en plusieurs États, suivant les communautés ethniques, de telle sorte que la côte deviendra un État alaouite chi'ite ; la région d'Alep un État sunnite ; à Damas, un autre État sunnite hostile à son voisin du nord ; les Druzes constitueront leur propre État, qui s'étendra sur notre Golan peut-être, et en tout cas dans le Hourân et en Jordanie du Nord. Cet État garantira la paix et la sécurité dans la région, à long terme : c'est un objectif qui est maintenant à notre portée ». […]

M. le Président, pour finir, laissez-moi vous prier vivement de chercher à vous rendre personnellement compte, de tout ce dossier, et à mesurer la responsabilité que vous y assumez, avant qu'il ne soit trop tard. Un ami, prêtre français, fin connaisseur de la Syrie, le Père Jean-Paul Devedeux, vient de vous écrire en ce jour même. Sa lettre est une invitation pressante qu'il vous adresse, pour une meilleure connaissance des Arabes, en général, et de la Syrie, en particulier. L'enjeu est de taille.

Veuillez, donc, vous libérer du « rôle » que vous êtes en droit de rechercher, et, surtout, de celui que l'on cherche, immanquablement, à vous imposer.

La Syrie, « seconde patrie de tout homme civilisé » comme l'a si bien dit votre grand savant André Parot, et terreau de toutes les civilisations, mérite une visite. Elle ne manquera pas de vous étonner, et même de vous captiver. Ayez le courage de la connaître de près. Vous en reviendrez porteur d'un projet de politique nouvelle, clairvoyante et juste, faite d'équilibre humain, qui repose sur les droits et devoirs de TOUS, à l'égard de TOUS ! La vie, la liberté et la dignité sont, pour TOUS !

Nouveau Président de la France, je vous souhaite d'en prendre l'initiative. Vous n'y serez pas perdant autant que vous l'êtes, en ce moment, et moins que vous le serez demain, si vous vous défilez !

M. le Président, en vous confiant cet espoir, je vous dis mon respect. »

Père Élias Zahlaoui

Église Notre-Dame de Damas Koussour – Damas


*   *   *



R.P. Jean-Paul Devedeux (15 novembre 2015) :
« J’ai vécu en Syrie et il faut comprendre pourquoi on en est arrivé là.
Les grandes puissances ont oppressé l’Orient.
Tout le monde joue un double jeu et favorise l’émergence
de cette secte qu’est Daech, qui manipule et téléguide des jeunes.
C’est du lavage de cerveaux. »


R.P. Jean-Paul Devedeux
Paroisse Saint-Bernard
3, rue Théodore de Bèze
21000 Dijon

À Monsieur François Hollande
Président de la République française

Ce 30 mai 2012

Monsieur le Président,

Mon nom, bien sûr, ne vous dira rien, pas plus que mon histoire ou encore ma fonction. Je suis prêtre à Dijon et, comme tout citoyen en tentative de responsabilité, essaie de suivre, à défaut de comprendre, la souvent tragique et douloureuse actualité, notamment internationale.

M’est avis que je transgresse quelque peu la loi émanant de nos Écritures, à savoir : « Que le soleil ne se couche pas sur votre colère. » Mais tout de même…

Si je m’accorde la liberté de vous écrire, c’est pour vous dire à tout le moins ma déception.

Nous attendions « l’Esprit Saint » et, une fois de plus, c’est « l’église qui est venue… » J’entends l’église républicaine, civile, laïque. Distante, sentencieuse, asphyxiante, partisane. Anachronique décalque de celle, cléricale, que nous avons connue et dont nous avons souffert.

Je voudrais vous parler d’un pays qui m’est cher pour le connaître depuis 30 ans et y avoir passé un certain nombre d’années, à savoir la Syrie. Force est de reconnaître que vous nous promettiez le changement, or l’une de vos premières décisions, l’une des premières de vos paroles indiquent que, non seulement vous ne vous démarquez pas du gouvernement autiste dont vous réclamiez la chute à cor et à cri, mais que vous œuvrez pour le dépassez en zèle.

Je n’ai aucune sympathie particulière pour Bachar el-Assad, mais il reste vrai que je reste profondément écœuré par la malhonnêteté, l’incompétence, à moins que ce ne soit, plus sûrement, la volonté d’intoxication de quasiment tous les médias hexagonaux qui, chaque jour, nous rebattent les oreilles jusqu’au comique avec les mêmes poncifs manifestement monolithiques, partiaux, copiés-collés.

Profondément écœuré par l’encombrant, le messianique monsieur Lévy qui, ce soir encore à la télévision, se livrait dans un décor versaillais, ni plus ni moins qu’à une obscène incitation à la violence, pour ne pas dire au meurtre. Je crois pouvoir vous assurer, que même s’il prend plaisir à s’afficher avec des opposants d’opérette, il n’est pas plus apprécié par la majorité des Syriens que ne l’était le ministre des Affaires étrangères du précédent gouvernement à qui j’ai eu l’occasion, il y a peu, de faire part de la même indignation.

Vous répétez à l’envi que vous êtes le « Président d’un grand pays », or…

Permettez-moi de vous dire combien je suis stupéfait par votre langage approximatif : qu’est-ce que « la Syrie » !!! Le bon peuple, en majeure partie fidèle à son Président, fier de lui… que cela plaise ou non à l’indéboulonnable conformisme occidental… le gouvernement, l’armée, les terroristes infiltrés ? À parler trop et trop vite, nul n’échappe à l’amateurisme.

Permettez-moi de vous demander quelle connaissance vous avez des Arabes, de la Syrie, de ce qu’il s’y passe réellement, de ce que souhaitent en matière de régime beaucoup de gens qui y vivent, notamment les étudiants, sans parler des minorités. Savez-vous pourquoi ils tiennent à leur président ? Avez-vous parlé avec lui des problèmes auxquels il était affronté ? Pensez-vous vraiment qu’il éprouve quelque jouissance que ce soit à « massacrer son peuple » ?

Permettez-moi de vous demander pourquoi ces anathèmes, ces menaces, toujours proférés derrière des micros ou devant des caméras ? Comme si notre « grand pays » était à ce point invalide de la rencontre, du dialogue d’homme à homme, de la cordialité sans recherche de réciprocité ? Est-ce là l’image que vous voulez donner aux jeunes, l’une de vos priorités à ce que j’ai cru comprendre, d’une France responsable, engagée dans la construction audacieuse, prophétique d’un millénaire dont tellement d’indices nous portent à croire qu’il est mort-né… par cupidité, prédation, soumission, couardise, absence d’idéal digne de ce nom.

Permettez-moi de vous demander ce que notre « grand pays » peut gagner à la pratique, toujours bilatéralement avilissante, de l’humiliation infligée notamment à Madame Lamia Chakkour.

Le mot « expulsion » peut-il apparaître autrement que l’étiquette de la honte apposée sur le peuple syrien comme sur les Français ? Imaginez-vous seulement à quel point, et de façon tout à fait paradoxale, un simulacre de démocratie pourrait apprendre d’une dictature !

Monsieur le Président, une dernière chose. Croyez-vous ou feignez-vous de croire que toutes ces sanctions et autres rétorsions contre « le régime d’Assad » affectent vraiment ledit régime. Il n’y a que notre omniprésent « philosophe » du ressentiment militant et des viles suggestions qui puisse le croire et le professer ! Vous vous apitoyez, et comment ne le ferait-on pas, sur les enfants martyrs d’un pays que d’innommables intérêts ont mis à feu et à sang… or, hélas, par impuissance ou par dépit, vous êtes en train de saigner à blanc tout un peuple, parfaitement adulte, que vous prétendez défendre, conscientiser, libérer… malgré lui. Comment croire à des professions de foi qui se veulent humanitaires si elles n’ont pas tout à la fois pour visée et application un champ homogène ?

Mille pièges, mille fatales amitiés, mille intérêts fallacieux, mille facilités, mille séductions vous sont en embuscade. Nous voulons vous croire capable de les voir, de les stigmatiser, de les contourner pour contribuer à faire avec tous ce que vous ambitionnez pour la France, unir, réunir, faire œuvre de cosmique communion. D’aucuns appelaient cela la « Civilisation de l’amour ».

Nous n’en attendons pas moins du « Président d’un grand pays ».

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de tous mes vœux et de mon profond respect.

R.P. Jean-Paul Devedeux

*   *   *


Sources : Lettre ouverte d’un prêtre arabe de Syrie à Mr François Hollande (30 mai 2012)

Lettre ouverte d’un prêtre arabe de Syrie à Sa Sainteté le Pape Benoît XVI (30 juillet 2012)

Lettre ouverte du père Jean-Paul Devedeux à Mr François Hollande (30 mai 2012)

Hollande annonce l'expulsion de l'ambassadrice de Syrie (29 mai 2012)

Témoignage du père Élias Zahlaoui, prêtre à Notre-Dame de Damas, quartier de Koussour

Questions ouvertes du Père Élias Zahlaoui à Laurent Fabius

Bruchez Anne, « La fin de la présence française en Syrie : de la crise de mai 1945 au départ des dernières troupes étrangères », Relations internationales, 2/2005 (n° 122), p. 17-32

"La fin de la présence française en Syrie : de la crise de mai 1945 au départ des dernières troupes étrangères" : autres publications sur un sujet proche

Pierre Magnan : Quand la Syrie était administrée par la France

Soheila Ghaderi-Mameli, « L'histoire mouvementée des frontières orientales de la Turquie », Confluences Méditerranée, 2/2005 (N°53), p. 91-102

"L'histoire mouvementée des frontières orientales de la Turquie" : autres publications sur un sujet proche


*   *   *






Hollande annonce l'EXPULSION de l'ambassadrice de Syrie en France, 29 mai 2012
(pour visionner cette vidéo sans quitter ce site cliquez  "ICI")







"Mémoire de la Patrie" à la Citadelle de Damas, la Communauté Syrienne de France était invitée…




Lundi 7 novembre 2016,  à la Citadelle de Damas
l'exposition "Mémoire de la Patrie" était inaugurée,
 la Communauté Syrienne de France était invitée… 





Cette exposition, au cœur de la Citadelle de Damas, s'est nommée "Homeland's Memory" ("Mémoire de la Patrie) afin de marquer la reconnaissance de la Nation au courage et à l'endurance du peuple syrien qui, en dépit de l'agression subie par le pays, est toujours resté appliqué au travail, a souligné le ministre de l'Économie et du Commerce extérieur, Adeeb Mayyaleh lors de son allocution inaugurale.

Le ministre a aussi promis que le gouvernement persévèrera dans son soutien aux artisans syriens qui œuvrent vaillamment à garantir un avenir toujours meilleur à la glorieuse histoire du savoir-faire national.

"L'artisanat syrien ne mourra jamais", ont répondu les participants à l'exposition, soulignant l'importance de la coopération entre toutes les parties concernées dans le pays pour promouvoir des villages patrimoniaux, soutenir l'économie nationale, développer l'apprentissage et le perfectionnement dans l'artisanat, appuyer l'exportation des produits vers l'étranger.

Alors que le patrimoine traditionnel de l'artisanat reflétant l'étonnante diversité de la Syrie a lui été gravement affecté par la guerre de terreur menée contre la Nation, une réflexion pour une relance  de ce secteur clé et ses activités s'imposait avec urgence. Cette exposition, organisée par l'Établissement général des marchés et foires internationaux en coopération avec la Fédération générale des artisans, s'inscrit dans cette perspective.

De nombreuses photos-souvenirs, des médailles, des timbres de la Foire internationale de Damas - de 1950 à 2007 - sont exposés au public dans la section "Patrimoine et documentation".  Un riche diversité de réalisations artisanales sont offertes à la vente mais surtout présentées afin de susciter de fructueux contacts entre les différents agents de la filière…


Le patrimoine artisanal exposé à la Citadelle de Damas - معرض عن التراث في قلعة دمشق

L’ancienneté et la réputation de l’artisanat syrien restent solidement établies. Ses produits tels les métaux ouvragés, les verres, les tissus étaient déjà fort appréciés des cours européennes du temps des croisades. Le travail du bois de valeur a rayonné aux IXe et Xe siècles jusqu’au Maroc et en Andalousie à l’ouest,  en Perse et Inde à l’est. La position de la Syrie au nœud des grandes routes du commerce telle la Route de la soie, tout en facilitant les exportations, impliquait également une grande compétitivité et une spécialisation dans le travail de certains métaux. Des centres de production hiérarchisés et spécialisés surtout à Alep et Damas mais aussi à Hama, Homs, Deir ez-Zor offraient de larges gammes de produits couvrant la demande des citadins, des villageois mais aussi des nomades.

Selon un rapport adressé à l'Unesco en 1999, l’image de l’artisanat syrien paraissait assez contrastée : dans certains secteurs, des savoir-faire immémoriaux semblaient malheureusement devoir inexorablement disparaître, alors que certains autres manifestaient de surprenantes facultés d’adaptation et menaient avec succès des offensives commerciales sur les marchés étrangers. Le mobilier en bois incrusté de nacre ou mossaddaf, et les coffrets et petits meubles en marqueterie de bois de noyer et de noisetier avec incrustations de nacre, d’ivoire et d’os étaient recherchés et faisaient preuve d’adaptations remarquables à la vie moderne. La fabrication du verre, ancienne de quelque 4000 ans, connaissait une véritable renaissance et la production s’accroissait pour répondre aux besoins d’acheteurs nationaux et étrangers. En matière de tissage par contre les évolutions semblaient contrastées. Le brocart aurait du mal à s’imposer dans le prêt-à-porter, et malgré les essais d’adaptation du damas les opinions quant à sa survie seraient mitigées, alors que l’aghabani serait largement vendu à l’intérieur et exporté dans le Proche-Orient et même en Europe et que les toiles de Hama qui servaient à fabriquer les anciens sacs d’avoine servaient à réaliser des sacs de plage, des dessus de lits et des rideaux destinés aux visiteurs et aux résidents étrangers.

L'étude citée, comme d'autres, montre toute l'attention portée à l'artisanat syrien, patrimoine vivant d'une nation et âme d'une culture plurimillénaire et immortelle… Aussi quand ce patrimoine connaît des difficultés, comme aujourd'hui en ces temps de guerre, les pouvoirs publics en symbiose avec les organisations professionnelles et culturelles se montrent-ils vigilants et par leur action affirment leur détermination à assurer à cet artisanat toute la vitalité et le dynamisme nécessaires à sa pérennité… C'est le sens profond de cette exposition : "Homeland's Memory".               

Cette visite de l'exposition à la Citadelle ne pouvait que nous inciter à découvrir ou retourner ailleurs dans Damas à la rencontre de la richesse de cet artisanat… Des lieux que les lecteurs de cet article se feront également une joie de découvrir… le palais Azem pour ses superbes collections… l'envie d'acheter des produits aussi beaux qu'utiles répondant aux goûts de chacun nous conduira ensuite au marché artisanal jouxtant la Takiya as-Soulaymaniya [جامع التكية السليمانية], puis de rue Droite [الشارع المستقيم] à la rue Hanania [الشارع حنانيا]… Ceux qui seront moins attachés à la rareté et l'exclusivité des produits trouveront leur bonheur à bien moindre prix au souk al-Qabaqbieh [سوق القباقبية] et son prolongement vers la rue el-Noufara [الشارع النوفرة]… et en de très nombreux autres points dans Damas.


























L'art de la poterie reste très vivace


*   *   *

« Si la population de Damas aime sa ville d’un amour réel mais non défini, il faudra lui faire prendre conscience de toutes les richesses qu’elle renferme, richesses artistiques et historiques que représente cet ensemble unique de monuments, alliant grandiose romain au charme efféminé du XVIIIe s. en passant par la pureté et le rigorisme des monuments arabes du XIIème au XIVème siècles.

Il faudra que les habitants de DAMAS se rendent compte qu’une citadelle de SALAH ED DINE, comme celle de DAMAS vaut bien un LOUVRE de PARIS et qu’elle doit [...] servir à la mise en valeur de la ville en rentrant dans la vie propre de DAMAS non comme des pièces archéologiques mais comme une partie toujours vivante de la Nation. » [les majuscules sont celles d'Écochard]
Michel Écochard, Plan directeur de Damas (1936), rapport justificatif, Préambule 


En allant vers la Citadelle, depuis le souk Hamidiyé : les remparts, Saladin…


Cette visite de l'exposition était aussi une occasion de découvrir la Citadelle et de nous intéresser à son très ancien passé… Venant du souk Hamidiyé, nous découvrons face aux remparts ouest la statue équestre de Saladin… 



Située à l'angle nord-ouest de la vieille ville, la citadelle de Damas [قلعة دمشق] est loin d'être aussi imposante que son homologue d'Alep [حلب]. Elle a été construite sur un terrain plat sans défenses naturelles et bordée par la rivière Barada [نهر بردى] au nord.


Vers l'entrée nord de la Citadelle, anciennes maisons au bord de la Barada


La Citadelle de Damas a été construite sous le chef de guerre turkmène, gouverneur de Damas, Atsiz ben Aûq al-Khwarizmî [أتسز بن اوق الخوارزمي] en 1076, sur le site d'un ancien castrum ou camp militaire romain. Les fortifications n'ont pu être achevées au cours de son gouvernorat mais sous le suivant, celui de Taj ad-Dawla (Tutuş) [تاج الدولة أبو سعيد]. La Citadelle a été agrandie et modifiée plusieurs fois au cours des siècles suivants, et a dû être restaurée après de nombreux sièges par les Croisés et les armées musulmanes rivales.

Après plusieurs tentatives infructueuses, Nour ad-Din Mahmûd el Mâlik al Adil [نور الدين "الملك العادل" محمود بن زنكي] s'empare de Damas en 1154 et établit sa résidence en la Citadelle. Pendant son règne il apporte des améliorations significatives aux fortifications de la ville ainsi que des restaurations s'imposant après le tremblement de terre de 1170.


Damas à l'époque abbasside (XIIe siècle)

Peu de temps après la mort de Nour ad-Din [نور الدين] en 1174, Damas a été prise par Salah al-Din Yousef Bin Ayoub [صلاح الدين يوسف بن أيوب]. Saladin [صلاح الدين] a ajouté une tour à la citadelle et a restauré ses bâtiments résidentiels. La mort de Saladin  en 1193 ouvre une période d'instabilité. Al-Aadil Seif al-Din Abu Bakr Bin Ayoub [العادل سيف الدين أبو بكر بن أيوب] réussit finalement à s'assurer le contrôle de Damas en 1200. Al-Aadil Sayf ad-Dîn [العادل سيف الدين] reconstruit la citadelle entre 1203 et 1216, en réponse aux tremblements de terre en 1200 et 1202 mais surtout par la nécessité de s'adapter aux progrès de la guerre de siège nécessitant des défenses renforcées. Al-Aadil Sayf ad-Dîn  meurt en 1218, et la ville souffre d'une nouvelle période d'instabilité et de luttes de pouvoir pendant plusieurs décennies.

En 1260 les Mongols conquièrent Damas et démantèlent en grande partie ses défenses.  Plus tard dans la même année, ils sont vaincus par les Mamelouks. La citadelle est reconstruite sous Al-Malik az-Zâhir Rukn ad-Dîn Baybars al-Bunduqdari (Baybars) [الملك‭ ‬الظاهر‭ ‬ركن‭ ‬الدين‭ ‬بيبرس‭ ‬البندقداري]. À nouveau la citadelle est assiégée  par les Mongols en 1300 et subit d'importants dommages sur son pan oriental. Tout au long du 14ème siècle, les rivalités de pouvoir entre Le Caire (Égypte) et Alep [حلب] sont l'occasion de plusieurs autres sièges de Damas. De nouvelles destructions ont été infligées à la citadelle en 1400-1401, lorsque la ville est une fois de plus assiégée par les Mongols. Après que la tour nord-ouest eût été abattue, la garnison s'est rendue. Les défenseurs de la citadelle ont été massacrés et alors que la mosquée des Omeyyades (الجامع الاموي) était incendiée. Les dégâts n'ont pas été réparés avant 1407.  D'autres restaurations ont eu lieu fin du 15e et début du 16e siècle.

Les Ottomans ont contrôlé Damas une grande partie du 16ème siècle, et leur infanterie a occupé la citadelle une grande partie de cette période. Alors que l'ère ottomane s'est caractérisée par une relative stabilité, un conflit occasionnel entre les troupes ottomanes, les gouverneurs de la ville et les habitants du Damas a causé de nouveaux dommages à la Citadelle. Un tremblement de terre en 1759 a endommagé les murailles ouest tandis qu'elles s'effondraient au sud. Ces dommages ont été réparés dès 1761. En 1860, les réfugiés chrétiens qui avaient fui le Liban vers Damas ont cherché refuge dans la citadelle lors des tensions sectaires et les massacres visant les chrétiens. Des voyageurs européens ont rapporté que les défenses de la citadelle étaient en bon état apparent en 1895 mais que les structures internes étaient en ruine. La citadelle a été utilisée en tant que caserne et prison par les autorités ottomanes jusqu'à l'arrivée des forces alliées vers la fin de la Première Guerre mondiale, affectation qu'elle a gardée sous le Mandat français puis jusqu'en 1986.

Tout au long de la dernière décennie la citadelle a connu des restaurations mais la plupart de l'intérieur reste en ruine. L'intérieur de l'enceinte est parfois ouvert aux visiteurs, mais un circuit autour des murs extérieurs donne la meilleure impression des fortifications. La tour sud-ouest, à l'entrée de Souq al-Hamidiyeh [سوق الحميدية], est peut-être la plus remarquable des douze tours rescapées. La tour nord-ouest, datée une inscription de 1209, est la plus haute avec ses 21 mètres. En dépit de nombreuses modifications et d'une utilisation permanente au cours des périodes mamelouke, ottomane et moderne, la masse de la citadelle d'al-'Adil est restée intacte… La Citadelle de Damas était une ville dans la ville. Des vestiges des forteresses des Romains et des Seldjoukides subsistent encore aujourd'hui, de même que certaines fortifications de Nour al-Din Mahmoud bin Zangi (1174) même si ellle  a été entièrement reconstruite par al-Malik al-'Adil Sayf al-Din Abou Bakr au cours des années 1201-1214.

L'entrée orientale de la citadelle, construite sous le règne d'al-Aadil Sayf ad-Dîn [العادل سيف الدين], comporte une passerelle ornée de mouqarnas [مقرنص] conduisant à une incroyable salle en dôme soutenue par quatre colonnes massives. C'est dans cette partie orientale que se tenait l'exposition "Homeland's Memory".


La porte au nord de la Citadelle, la plus stratégique… et la seule accessible actuellement






Les recherches archéologiques sur la citadelle de Damas, conduites de 2000 à 2006 sous la direction de Sophie Berthier dans le cadre d’un programme franco-syrien en collaboration avec la Direction générale des Antiquités et des Musées de Syrie (DGAMS), ont profondément renouvelé la vision de l’évolution du grand monument, qui fut dans la seconde moitié du XIIe et dans la première du XIIIe siècle le centre du pouvoir zenghide puis ayyoubide. La parution d’une monographie dédiée au mobilier militaire issu des fouilles (D. Nicolle), la préparation d’une synthèse des recherches céramologiques (V. François), et une série d’articles sur l’étude archéologique des portes de la citadelle (A. Hartmann-Virnich) s’inscrivent dans un projet éditorial d’envergure dont la mise en œuvre a toutefois été retardée, puis entravée depuis 2011 par une situation politique défavorable. De ce fait, la réalisation du projet reste un des enjeux majeurs des années à venir, après la guerre.


Un magnifique reportage sur les machines de guerre médiévales de la Citadelle de Damas en Syrie,
reconstituées par Renaud Beffeyte et Armedieval



*   *   *






‘Homeland’s Memory’ exhibition in Citadel of Damascus 
 
Principal site de référence pour Damas : DAMAS/DIMASHQ (Syrie)

La Citadelle de Damas

Citadelle de Damas/Qal’at Dimashq

Museum With No Frontiers (MWNF) - Discover Islamic Art : La Citadelle de Damas

Mohamed Berriane : Tourisme, culture et développement dans la région arabe, Unesco 1999

Extrait du rapport “Culture, tourisme et développement, le cas de la Syrie” (1996) adressé à l’Unesco par Samir ABDULAC, docteur en urbanisme et architecte DPLG

Le tissu de coton pour Aghabani

Le mobilier en bois incrusté en nacre ou mossaddaf

Boutique des Artisans de Damas

Giovanni Fine Art, rue Hanania

Laboratoire d'Archéologie médiévale et moderne en Méditerranée : La Citadelle de Damas

Mathieu Eychenne : Toponymie et résidences urbaines à Damas au XIVe siècle