Qui ne risque rien n'est rien… sur le chemin de Damas, alors que les opinions ont cédé face aux faits…
on ne le dit assez : un âge n'en chasse pas un autre, tous les âges qu'on a vécu coexistent à l’intérieur de soi, ils s'empilent, et l'un prend le dessus au hasard des circonstances.

vendredi 29 septembre 2023

Oran, buissons de mémoire d'un Margaillon…



Sapristi… pourquoi donc ces Espagnols d'Oranie comme tous les autres Européens implantés là-bas ont-ils oublié leur nature de Margaillons ? Que soit honni à jamais ce qualificatif de pied-noir ! Les mots ont un sens profond ; les mots qui s’incrustent dans l’usage courant dictent aussi leurs conséquences… parfois dramatiques ! Quelles sont les racines d’un pied ? Un Margaillon, lui, est indéracinable ! Il est certain que si le combat de ces Européens transplantés avait été mené en tant que Margaillons ses objectifs, ses formes, son issue en auraient été tout autres… Et aujourd’hui pourquoi leur mémoire, malgré le temps d’une sage réflexion, occulte-t-elle encore systématiquement ce souvenir de leur dénomination première, Margaillons ?… … Un Margaillon est indéracinable, quelle que soit la violence d'un défrichage il survit toujours un brin de racine au plus profond de sa terre natale…


Henri Pallès : Les Margaillons
¡Asopotamadre! dès 1862 ils étaient reconnus Margaillons, indéracinables.
Pourquoi donc, sapristi, ont-ils consenti à être chaussés de semelles de vent ?



Henri Pallès : Oran,  la Porte de Canastel



Henri Pallès : Oran, La Posada



Henri Pallès : À nos Cheminots



D'après Henri Pallès : La Fuguera a la San Juan
Como todos los años llega la noche de San Juan, donde la magia se une al fuego, donde la diversión y al superstición se dan la mano.
Y todo a las 12 de la noche. La hoguera tiene ese poder purificativo y regenerador.
Las leyendas cuentan que en los Ancares los mozos robaban la leña para hacer la “fuguera”,
y para salvarse de los maleficios de las brujas saltando por encima de la hoguera y gritando “Fuera Meigas”.

 


Oran des années 50 : Le coin de Henri Pallès


Algérie, mon pays : Santa-Cruz


Algerie mon pays : Oran



Cliquez ici pour agrandir le plan


Arrondissements et quartiers d'Oran



Lien de téléchargement des quartiers et rues d'Oran, anciens et nouveaux noms :
https://www.guideoran.com/index-des-rues-quartiers-oran/index%20oran.pdf

Algérie Cartes Postales Anciennes


Plateau Saint-Michel - 29 rue d'Assas, angle rue Bichat [juin 2007]


Plateau Saint-Michel - 29 rue d'Assas, en face bd Sébastopol et ancienne épicerie Benizri [juin 2007]


Plateau Saint-Michel - 29 rue d'Assas, dépendances de l'Hôpital [mars 2006]

Plateau Saint-Michel - rue Bichat, face au 29 rue d'Assas [juin 2007]



Plateau Saint-Michel - Carrefour Sébastopol-Dutertre, au fond l'Hôpital civil,
sur la gauche immeuble de 5 étages dont 2 surélevés : 29 rue d'Assas [février 2007]



L'entrée de l'Hôpital civil, tout au bout du boulevard Sébastopol, visible depuis ma fenêtre du 29 rue d'Assas



Rue El-Moungar, où je vis Oran pour la première fois… au n° 20, clinique Jarsaillon (maison à droite),
tout près du Lycée… et prêt à m'embarquer dans un car de la Sotac vers les plages…
l'immeuble en face, à gauche, abritait dans les années 50 un bar, le Coq Hardi…
Cette rue El-Moungar est devenue aujourd'hui rue des Sœurs Ben-Slimane, tout comme la clinique.



Clinique Jarsaillon… on a gagné un étage !



La rue El-Mougar aujourd'hui, qu'est devenue la clinique Jarsaillon ?…



Le marché du Plateau Saint-Michel…
vibrants souvenirs de ce qui était alors pour moi une belle promenade avec mon grand-père








Promenade de Létang
Créée en 1836 par orgre du Général de Létang, commandand de la Région d'Oran
sur l'emplacement des glacis nord et ouest du Rozalcazar (rebaptisé Château Neuf)
Site historique par ordre du Gouvernement général du 23 juillet 1952

Promenade de Létang
(déjà, à une époque ancienne l'on se méprenait quant à la graphie du nom)




Face au lycée Lamoricière, la Banque de l'Algérie…
(angle boulevard Galiéni et rue El-Moungar)


"Prélude d'amour", œuvre de Charles Valton, 1886
Amours contrariées…
Œuvre offerte en 1935 par la ville de Paris à la ville d’Oran lors de l’inauguration du musée Louis Demaeght…
initialement jouissant de la paix des jardins du musée, non loin du Penseur de Rodin,
ces amours ont été envoyées errer à travers la ville,
au jardin public puis au boulevard du Front de Mer, square Lyautey ;
la dernière fois elles ont été aperçues semble être en face du lycée Lamoricière, devant la Banque de l’Algérie…

Le lycée Lamoricière
L'horreur de l'enfermement
La confrontation aux imbécilités de la promiscuité



Librairie Claude Manhès, galerie Gabriel Pérez, boulevard Georges Clémenceau face au Prisunic



Le Clichy : rendez-vous de certains lycéens, le jeudi après-midi… pour un lait fraise !
(angle rue d'Arzew et rue Lamoricière)


École de garçons Berthelot, rue Daumas : l'entrée au fond de la photo, à droite


Copain d’avant… Jusqu’en juin 1951 enfance heureuse, tout en haut de la rue d’Assas, au 29 à l’angle du boulevard Sébastopol… Ma famille a quitté Oran pour Fleurus, dès lors j’ai perdu contact avec tous mes copains du Plateau, entrant en 6ème et interné au lycée Lamoricière ; ne fréquentant plus à Oran que le quartier de mes grands-parents paternels, Saint-Eugène - dont mon grand-oncle avait fondé l’église…
Perdu de vue tout mon entourage d’enfance du Plateau… J’avais parmi eux comme copain de classe, à l’école Berthelot, Houari Ferhaoui ; également copain de jeu en tant que proche voisin. Il habitait chez ses parents boulevard Sébastopol, un petit immeuble entre la rue Bichat et la rue Dutertre…
Houari Ferhaoui a sans doute ensuite fréquenté, comme la plupart des enfants du Plateau, Ardaillon… Je crois savoir qu’il y a animé une cellule FLN avant, sur le point d’être démasqué, de s’engager dans un maquis de l’ALN dans la région de Mostaganem où il aurait été tué vers la fin 1956… C’est à ce titre qu’un de mes lieux familiers, la place Hippolyte Giraud aurait été rebaptisée Ferhaoui Houari… Je n’en sais pas plus. Mes connaissances en arabe ne me permettent pas de recherches plus approfondies…
Peut-être que d’anciens d’Ardaillon et proches du plateau Saint-Michel à cette époque-là en savent davantage sur les faits auxquels Houari Ferhaoui a été mêlé…
Démarche incongrue jugeront certains… Il s’agit simplement pour moi d’en savoir plus sur un copain de classe et de jeu à une époque où nous étions à des années-lumière de penser qu’un jour la barbarie des adultes nous séparerait…

Un copain de classe à l'école Berthelot  et de jeu lors de mon enfance au Plateau Saint-Michel à Oran : Houari Ferhaoui [فرحاوي الهواري]   (accéder aux pages 103, 104)



La place Hippolyte Giraud, premier maire d'Oran, désormais Ferhaoui Houari…
Photo prise sur la place à l'angle de la rue d'Assas,
au fond tout à gauche on distingue la maison de mon enfance, 29 rue d'Assas…


La place Hippolyte Giraud et sa pharmacie, celle de mon enfance


Au cœur du Plateau Saint-Michel, la place Hippolyte Girayd et la pharmacie Saint-Michel…
Venant du haut  haut de la rue d'Assas, sur le chemin de Berthelot,
à droite le boulevard Lescure et l'intersection avec la rue Daumas…







28 octobre 1949… un deuil national !
Une date indéfectiblement gravée dans ma mémoire de gamin

28 octobre 1949, une date repère dans mon enfance






Itinéraire familier…
l'escalier de la Gare signifiant le passage du Plateau Saint-Michel vers le pont Saint-Charles puis Saint-Eugène


Le pont Saint-Charles



Église du Saint-Esprit, place de la Bastille




Venant d’Assi-Ameur on est ici à la sortie du village de Fleurus,
à droite route vers Saint-Cloud, à gauche route vers Legrand et Saint-Louis.
La liaison entre Oran et Fleurus était assurée par les Transports Angelotti



Schéma des rues de Fleurus
La photo ci-dessus a été prise depuis le jardin public, à l'extrême est du village
Nous habitions une ferme située le long d'un canal, accessible depuis la route de Saint-Cloud (hors plan)…
(Vivaient à Fleurus deux familles de même nom, dont la mienne venue tardivement et dont la fiche qui pourrait vouloir la concerner est totalement erronée.)



À l'angle du square Garbé et de la rue de Mostaganem,
le bureau des cars Angelotti, 13 rue de la Paix








En bordure du square Garbé on aperçoit un des cars Angelotti garé au départ de Saint-Louis.
En face, au coin opposé, le 13 rue des Lois et les bureaux des Transports Angelotti.









Une vue aérienne de la cathédrale et ses alentours… À gauche la rue des Lois, de notre époque il y avait les cars Chaussons pour voyageurs vers Arzew et Kristel, au n°13 les Transports Angelotti vers Saint-Louis et Saint-Cloud. En face la cathédrale, place Jeanne d'Arc, le boulevard du 2ème Zouaves et en perpendiculaire la rue Ozanam où se trouvait le Crédit municipal. En diagonale le boulevard Magenta et le square Garbé, à droite la rue Drago le palais de justice, la perpendiculaire à gauche du 2ème Zouaves, le boulevard Clemenceau.  Tout en haut la gendarmerie, la rue Montesquieu.

Le Square Garbé porte le nom de Charles Théodore Vicomte Garbé, secrétaire général et préfet de 1845 à 1850, puis conseiller général et maire d’Oran de 1867 à 1868. Le square Garbé où la fédération radicale avait son siège fut débaptisé en 1946 pour prendre le nom de Square Gandolphe, éminent avocat, bâtonnier d’Oran de 1924 à 1927, puis exerçant un poste à titre d’intérimaire entre 1940 et 1943, Gaston Gandolphe fut une figure importante du Parti socialiste. Après l’indépendance, deviendra Square Thuveny en hommage à maître Alphonse-Auguste Thuveny, un avocat français qui fut assassiné au Maroc le 28 novembre 1958 pour avoir défendu les nationalistes algériens. Cet avocat apporta dans les années 1950 son assistance au Comité d’avocats algériens qui défendait les membres de l’Organisation secrète (OS) algérienne.

 

Le Margaillon (Chamaerops humilis, buisson nain), une appellation dont seuls se souviennent les Oranais !

Le Margaillon 0ranais, 31 juillet 1919 (source : Gallica)


Le Margaillon 1934

Margaillon ? Tamazight de l’Atlas blidéen : palmier nain ou palmier doum (chamærops humilis)…

Oran, mémoire du temps jadis

Algerie mon pays : Oran

Jean-Yves Thorrignac : Algérie

Jean-Yves Thorrignac, Jean-Claude Rosso : Villes et villages d’Oranie

Denis Dar : Algérie

Christian Saulnier : Blog des anciens de Lamtar et des villages voisins (Sidi-Bel-Abbès)

Algerie, mes racines

Oran des années 50

Oran jadis

Histoire d'Oran

Fleurus d'Algérie (1848 - 1962)

Album photos du vieil Oran وهران

Index des rues et places d'Oran (pdf)

Portail d'Oran

Études-Coloniales : source de très nombreuses références

Cercle algérianiste : 5 juillet 1962 à Oran, la liste des Disparus

Benzaken : Oran, la ville de mes ascendants (une famille juive à Oran)

Jean Boisard, cœur de Harki… chronique de notre agonie…
(nombreuses références concernant l'histoire d'Oran)

Le café Gros, Foix : les destins croisés des Fieuzet
Oran, 12 décembre 1950 : accident de l'AVRO " ANSON "n° 37
http://remylaven.free.fr/Relais_site_Nordnet/Crash.htm



12 décembre 1950 – Au retour d’un vol d’entraînement, un AVRO Anson I de l’escadrille 56.S (s/n LT837 – 56.S-37) survole la ville d’Oran avant de regagner sa base de Lartigue. A la verticale du quartier du plateau Saint Michel, il est victime d’une rupture de la cellule et se désintègre littéralement en vol. Ce qui reste du fuselage s’écrase sur un garage heureusement inoccupé. Il n’y a aucun survivant parmi l’équipage qui était constitué des SM1 mécanicien volant Communardo, Gaston Accili, PM radio volant, instructeur Louis, Édouard Daumont, SM2 pilote Robert, Jean, Raoul Duval, Mot2 armurier d’aéronautique Lyonel, Lucien, Paul François, QM1 élève radio volant Marcel, Jean, Yves Fustec, Mt élève radio volant Pierre, Gaston, Jean Hamelin et SM2 élève radio volant Robert, François Le Porchou.

Pr. F. Mohamed Brahim : Histoire de l’Hôpital civil d’Oran, devenu CHU docteur Benzerdjeb

L’Algérie d’Apollinaire (première partie)

L’Algérie d’Apollinaire en 2017 (seconde partie)

L’Algérie d’Apollinaire : L’histoire d’un vieux quotidien et d’un vieil hôpital oranais (épilogue)

Le témoignage de Bachir Hadjadj : « les voleurs de rêves »

Bachir Hadjdadj [site personnel] : Les Voleurs de rêves, 150 ans d’histoire d’une famille algerienne.

Bachir, Héliette et les autres : mémoires de la guerre d’Algérie
 
Sofiane Taouchichet : La presse satirique illustrée française et la colonisation (1829-1990) [pdf]

Le tremblement de terre  de la nuit du 8 au  9 octobre 1790 à Oran (Archives françaises) [pdf]

https://naget.ictp.it/PUBLICATIONS/resources/Oran17901009.pdf

Rue des Jardins, à gauche escalier vers rue de l'Aqueduc
































Paul Anka à l'Empire, décembre 1958
 



Oran, rue Jacques… cinéma Century, dernière aventure…



Teddy Alzieu - Mémoires en images : Oran



Avenue de Saint-Eugène, villa Delanoë





















La Société de Géographie et d’Archéologie d’Oran : le cas d'une "société savante" tant en rupture qu'en continuité d’une tradition associative… 


*    *   *

  Comment Franco sauva des milliers de "Pieds-noirs" abandonnés par la République au FLN

Jo Torroja, avant son entrée dans un commando OAS à Oran évoquait ces actions : « Depuis plusieurs jours, de fortes explosions se font entendre dans le silence de la nuit et les commentaires vont bon train : ce sont les premières actions d’une révolte populaire, européenne cette fois. Il y a des groupes organisés, mais beaucoup d’initiatives personnelles. Tout ça fait beaucoup de bruit, et les journaux commencent à parler de ‘‘commandos’’ européens. »

… … « Trente-cinq ans, oui trente-cinq ans que le sillage du dernier bateau quittant les rives de notre belle province, s'est effacé dans la douleur et la honte. Douleur d'abandonner notre terre, nos souvenirs, nos morts ; honte d'avoir dû plier devant une Métropole Gaulienne, trompée par le parjure et la trahison. » Alors que tant d'ouvrages, certains admirables, d'autres ignobles, ont tenté de nous transmettre leur vision de l'OAS, peu d'écrivains ont eu la sagesse d'attendre que les passions soient apaisées et qu'éclate enfin, l'exactitude de l'Histoire. Ce n’est que trente-cinq ans après, trente-cinq ans de réflexion, soit seulement en 1977, que Jo Torroja a cru pouvoir s’exprimer. Dans un récit dont l'émotion bien souvent nous conduit aux larmes, il nous fait revivre ces 14 mois héroïques que furent les combats de la résistance française en Algérie. Dans une langue simple, un style typiquement de là-bas, il nous guide à travers d'authentiques faits d'armes, jusqu'à la frustration extrême, celle de ne pas avoir risqué avec lui "notre peau au bout de nos idées" comme l'a si bien écrit Pierre Sergent. « Oui, j'étais de l'OAS, écrit-il, ici lecteur, tu souffriras peut-être de ne pouvoir dire, toi aussi : "Moi aussi, j'en étais !" »
Malheureusement son premier ouvrage, encore présent dans quelques fonds de bonnes bibliothèques reste aujourd’hui introuvable : « D'agneau à... loup : O.A.S.- Oran, mai 1961-juin 1962 » publié aux éditions Industrias Graficas Espana, 1977.

Puis ce fut l'agonie…

Le départ des Oranais secourus par la Marine espagnole, le 30 juin 1962

Le 12 juin 1962, l'officier qui commandait la garnison de Nemours venait m'apprendre que ses hommes, fusiliers marins, les harkis qu'il commandait, se mettaient à notre disposition pour défendre Oran. Donc j'y ai cru, convaincu qu'on allait se battre quand même.

Le 25, il y eut un court-circuit au central téléphonique, provoquant qu'Oran se trouvât totalement isolée de la France, de l'Europe. J'étais en contact avec le consulat général d'Espagne, car alors toutes les communications du gouvernement espagnol passaient exclusivement par l'armée, et Madrid avait décidé de faire évacuer ses ressortissants.
L'Espagne avait demandé l'autorisation à la France d'envoyer des bateaux. La France refusa, comme elle l'avait déjà fait aux États-Unis, à l'Italie et à la Grèce. Paris ne voulait pas qu'on puisse croire qu'un vent de panique s'emparait de la population, et désirait maintenir des lignes régulières et tranquilles. Le gouvernement espagnol, malgré cela, envoya donc deux transbordeurs qui faisaient d'ordinaire le parcours Barcelone - Palma de Majorque : le Vírgen de África et le Victoria. Ces deux navires arrivèrent le 24 ou le 25 au large d`Oran, mais l'entrée du port leur fut refusée. Sur les quais du port s'étaient déjà accumulés des gens en provenance de Relizane, de Dublineau, de Mascara, arrivés en convois avec leurs camions chargés de meubles, et des camionnettes protégées par l'armée. Ils aboutiront sur le port face à l'usine thermique où il n'y avait ni points d'eau, ni toilettes, et rien pour s'abriter. Il faut organiser un campement afin de dormir à même le sol ou dans les voitures.
La majorité des ressortissants espagnols qui n'ont pas fui en convoi n'arriveront jamais au port. 0n les aura arrêtés sur la route en les dépossédant de tout, et souvent en les assassinant. N'ayant plus de liens directs avec l'Espagne, car leurs ancêtres l'avaient quittée une centaine d'année avant, et n'étant pas non plus recensées par la France, ils n'apparaitront nulle part recensés comme victimes. Et elles furent nombreuses.

Le 27, le gouvernement espagnol insiste pour faire rentrer ses bateaux. Nouveau refus. Je savais tout ça par le biais du consulat général d'Espagne, ainsi que de l'Armée, car nous avions un officier qui nous passait tous les messages confidentiels.
Le 27 également, les bateaux demandent la permission d'envoyer une chaloupe pour acheter des vivres pour les équipages, car tout avait été prévu en principe comme un rapide aller-retour. Permission accordée et les embarcations quittent les navires, toujours situés en eaux internationales, afin de mener à bien l'opération de ravitaillement.

Le 28, même statut quo.

Le 29, ça change, car le gouvernement espagnol, exaspéré de voir la France lui refuser l'entrée des navires alors que près de 3 000 ressortissants se trouvent bloqués sur les quais, décide de mettre la marine de guerre et l'aviation en branle-bas de combat.
Ainsi, le vendredi 29, à 16 heures, deux bâtiments de guerre lâchent le port de Carthagène et se dirigent vers Oran. L'aviation militaire elle aussi, basée à San Javier, près de Murcie, est mise en état d'alerte.

Le 30 au matin, c'est-à-dire la veille même de l'indépendance ; le gouvernement français qui a été informé que les bateaux de guerre se dirigent sur Oran, et que l'option militaire a été choisie par Madrid, décide alors d'accorder l'autorisation aux bateaux espagnols de pénétrer dans le port à 10 heures du matin. À 13 heures, les deux transbordeus accostent sur le quai, et on nous annonce une grande nouvelle ! Nous pourrons embarquer les voitures, car nous étions tous convaincus qu'il faudrait les abandonner et partir seulement avec les deux valises réglementaires. La plupart sont des valises en carton, avec des ficelles car les serrures ne tenaient pas, et elles nous serviront pendant quelque temps de table de salle à manger.

Donc, dès 1 heure nous voilà en train d'embarquer vu que les deux navires peuvent nous recevoir avec nos nos biens.
Après un strict contrôle d'identité, les CRS fouillent les voitures et tout ce qui est emballé. On a peine à comprendre un tel zèle car, de toutes manières, les bateaux ne se dirigent pas vers la France mais vers l'Espagne. Mais les ordres sont les ordres, et on passe au peigne fin même les berceaux des enfants. Finalement, on nous laisse tous embarquer.

C'est alors que les CRS prétendent monter à bord car, soi-disant, il y aurait des membres d'une certaine organisation qui auraient embarqué. Le capitaine, sur la passerelle, ainsi que le vice-consul, s'opposent à ce que les CRS montent à bord. S'ensuit un moment de forte tension en attendant que les CRS, après avoir contacté leur commandement en ville, admettent que le capitaine du navire est dans son droit de refuser leur entrée, vu que les bateaux sont assimilés à des territoires espagnols.
Les CRS se retirent alors, on enlève les passerelles et on lève les amarres, et nous partons. Il est 4 heures de l'après-midi, et dès que nous arrivons dans les eaux internationales, les navires de guerre nous escortent et nous voguons vers l'Espagne.

L'aviation espagnole nous survole plusieurs fois. Nous parvenons à Alicante vers deux heures du malin. Les Alicantins nous attendent avec la Croix Rouge aux multiples attentions et soins, offrant boissons, sandwichs, port de valises, et prêt d'argent aux plus démunis. Bref, un accueil aussi extraordinaire que surprenant...

Jo Torroja : Algérie - Alicante 1962-2012; Mémoires d'un exode: Juan Ramon Roca - RVF Autores-Editores

Épisode honteux pour un pouvoir gaulliste pour qui la vie des Français d'Algérie importait très peu: c'est d'Espagne qu'est venu le salut pour ces Oranais que le pouvoir voulait abandonner en victimes expiatoires, au couteau des assassins. Cela se vérifiera le 5 juillet.



rapporté par Jo Torroja sur Calaméo


Alfred Salinas : Oran l’Andalouse, terre d’asile

Rudy Chaulet et Olga Ortega, « Le rachat de captifs espagnols à Alger au XVIe siècle. Le cas de la rédemption de Diego de Cisneros (1560-1567) », Cahiers de la Méditerranée 87/2013

Récits d’Orient dans les littératures d’Europe, XVIe-XVIIe siècles
Anne Duprat (dir.), Émilie Picherot (dir.), 2008
Alexandra Merle : D’une captivité l’autre - Récits de captifs espagnols à Constantinople et à Alger au Siècle d’or page 161
Jeune homme de modeste condition, Diego Galán, à l’âge de 14 ans, quitte un beau jour sa ville natale de Consuegra, mû par le désir de voir le monde. Nous sommes sous le règne de Philippe II, en 1589. Le jeune Diego, en parfait béjaune, se laisse presque aussitôt recruter dans une compagnie de soldats qui s’embarque pour Oran où les Espagnols ont une garnison, mais après avoir quitté Málaga, leur embarcation est prise par huit galiotes d’Alger dont le capitaine est un renégat albanais, « Harrahut Mami » - Mami Arnaut, personnage bien connu, mentionné notamment dans la liste des raïs d’Alger…
[M.A. de Bunes et Matías Barchino (Biblioteca del Real Monasterio de El Escorial, 2001) : Relación del cautiverio y libertad de Diego Galán, natural de la villa de Consuegra y vecino de la ciudad de Toledo.]

Gaston-Jean Miane : L'Afrique du Nord, ma terre natale, Mémoire de Notre Temps - Les Éditions de Fossillon
(l’Histoire de l’Afrique du nord en 3 tomes, pas celle que l’on apprend à l’école actuelle et par les médias)
tome 1 - De la nuit des temps à la reddition d’Abd el Kader 325 pages
tome 2 - De 1847 à 1958 : des espoirs au désespoir 355 pages
tome 3 - De 1958 à 1962 : le temps des reniements 310 pages

Jean Yves Thorrignac : Algérie, ma mémoire

Juan‑David Sempere‑Souvannavong et Mariana Dominguez Villaverde : La mobilité des "Pieds‑noirs" entre l’Espagne et la France depuis 1962

Juan David Sempere Souvannavong, Universidad de Alicante : Los “Pieds-Noirs” en Alicante, las migraciones inducidas por la descolonización [pdf]

Opération Cisneros

Oran, Franco et l'opération Cisneros

Alfred Salinas Chercheur-écrivain

https://www.facebook.com/alfred.algarra.9

Alfred Salinas Bibliographie L'Harmattan

https://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=auteurs&obj=artiste&no=9973


 




"L'Algérie, l'empreinte espagnole"
a été honoré du Prix littéraire algérianiste Jean Pomier 2023.
¡Enhorabuena!
Alfred Salinas qui a vécu son enfance à La Calère d'Oran près de la place de La Perle
recevra son prix lors des manifestations du cinquantenaire du Cercle algérianiste,
au Palais des Congrès de Béziers le dimanche 22 octobre 2023 à 10 heures 30…


Opération Torch

Opération Torch… Souvenir de cette tante handicapée par un éclat d’obus reçu au niveau de l’articulation acromio-claviculaire… C’était le 10 novembre 1942… Mes grands-parents demeuraient dans une maison à rez-de-chaussée surélevé donnant sur l’avenue de Saint-Eugène, face aux moulins Delanoë. J’étais chez eux, alors que ça guerroyait contre l'entrée des Yankees dans la ville… Cette tante, très attentionnée, me prit dans ses bras (j’avais alors à peine deux ans) pour m’inviter au spectacle sur le balcon. Furieux houspillage de ma grand-mère. Elle me ramène à l’intérieur. Immédiatement ressortie, elle chope un éclat d’obus dans le haut du bras dans lequel elle me portait peu avant. Une infirmité qu’elle aura gardée jusqu’à la fin de sa vie… C’était l’Opération Torch ! Je peux avoir quelque raison bien ancrée de devoir m’en méfier et de ne pas beaucoup ‘les’ aimer, ces Yankees. Une vraiment saine et bonne raison vitale ; pas une mesquine friction d’orgueil chiffonné comme un certain DeGaulle ! j’étais bien là ; pas scrupuleusement tenu à l’écart, ignoré…

L’enfance, ça a sa notion du temps bien à elle… En farfouillant sur la Toile je découvre qu’une de mes sœurs, plus jeune de pas même six ans, aurait fait en 2012 un voyage en Oranie vers le bled où elle a vécu. Et que récolte-t-elle, l'innocente ? Une unique et mesquine photo, celle d’une dalle de béton oubliée dans un des campements des troufions yankees de l’Opération Torch ! et dont l’authenticité serait attestée par une vulgaire inscription en anglais… découverte arrosée d’un savant gouglimatias. L’Archéologie tutoie parfois des sommets. Une photo qui m’a surpris, voire choqué d’autant plus que c’est la seule à ma connaissance qu’elle aura rendue publique à son retour ! Ma sœur, aujourd’hui décédée, avait six ans de moins que moi… c’est fou ce qu’une telle différence d’âge est importante dans l’enfance et dans ce qu’elle imprègne dans les mémoires…

Le bled c'est Fleurus, aujourd'hui devenu Hassiane Toual. La fameuse inscription figure sur l'une des quatre marches qui menaient à un podium sur lequel avait été scellée une plaque de bronze comprenant un planisphère et un aigle américain dominant le monde - déjà ! Cette inscription faite en 1944 voudrait commémorer le débarquement du 8 novembre 1942 à Oran et Arzew. "… STAGING AREA … B.N. … JAN. 1944" soit "… Zone de Rassemblement des Bataillons … janvier 1944". Toute l'histoire de Fleurus serait là résumée ? par cette référence à cette Opération Torch qui marqua le début de la mainmise yankee sur l'Europe et pour l'Oranie la fin de l'Opération Cisneros et des prétentions de l'Espagne sur la région…


 

Les Américains en Algérie

"Les Compagnons du 8 novembre"

Conférence d'Alfred Salinas du 29 novembre 2022 (après-midi) à Paris (Invalides) :
"L'état d'esprit des musulmans d'Algérie face à la présence américaine 1942-1945"
La lecture des archives des principales agences d'Intelligence américaines (Psychological Warfare Branch, G-2 de l'état-major d'Alger, JICANA-Joint Intelligence Collection...) suggère une vision renouvelée des rapports qui s'établirent pendant la période 1942-1945 entre la population musulmane d'Algérie et la présence des Américains.
Les documents contenus dans ces archives laissent apparaître le jeu équivoque et manipulateur des Américains dont le sentiment anticolonial donnait au courant nationaliste des raisons d'espérer en la création à brève échéance d'un Etat algérien indépendant.
Mais ce ne fut que dérobades et illusions, poussant les nationalistes sur la voie de la radicalité.
Ma conférence se déroulera dans le cadre du colloque international organisé par "Les Compagnons du 8 novembre" les 28 et 29 novembre 2022.

Colloque les compagnons du 8 Novembre 1942 - 28 novembre 2022, son enregistrement sur Youtube


Fraternisation entre musulmans d'Oran et un G.I, novembre 1942
(source Associated Press),


Casbah d'Alger est placée "off limits" (interdite d'accès aux soldats américains).
Des PM (military police) veillent au respect de l'interdiction, avril 1943.
(source : archives Ivan Dimitri)






Histoire d'Oran

 


 








 

dimanche 18 juin 2023

18 juin : journée nationale des Psittacidés en France…



Aux résidus gaullistes : « … la bêtise est une force indomptable. »
Albert Paraz
R…Appel pour un 18 juin !
En ce 18 juin, de volières en volières se répercutent des appels de Psittacidés… Se répète et se rabâche ce que l'histoire officielle enseigne dans les écoles de la République en France… Une France qui n'a certes pas le monopole des falsifications historiques, quasi universellement répandues…

Au petit matin de ce 18 juin, désagréable réveil par le chœur des Psittacidés anonymes, cacophonie à laquelle répond depuis sa gloriette le gloussement de notre dinde nationale… Une bien affligeante journée…



Bien d'autres dates auraient pu être choisies pour cette commémoration… Dates s'inspirant des péripéties de la Révolution en France et sa Grande Terreur… Celle-là, d'un 18 juin, présente l'avantage d'être plus proche des générations actuelles… Date liée à la grande honte de la défaite de 1940 imputable à l'incurie des politiciens de la République d'alors et à l'impuissance de l'État-major de ses armées… Le gros du danger passé, réaction bien humaine, le bon peuple de France en viendra à haïr ceux qui dans les moments les plus difficiles auront été témoins de sa honte mais seront restés près de lui s'efforçant de le conduire vers un honneur retrouvé… Ce bon peuple libéré, ingrat et toujours honteux portera alors son dévolu sur un imposteur bonimenteur… Un général micro… Micro aux deux sens du terme… Par son arme de prédilection la démagogie mensongère du discours et aussi parce que ce prétendu valeureux soldat n'avait jamais connu de champ de bataille hormis cabinets ministériels et studios d'enregistrement… Parmi les actes de bravoure de ce bonimenteur les historiographes officiels en charge de l'éducation du peuple promulgueront l'enregistrement au micro d'un studio à l'étranger le 18 juin comme date fondatrice du mythe…

Ces falsificateurs devaient être d'autant mieux servis par un don sinon une tare du personnage… son histrionisme, cette attitude théâtralisante que d'autres qualifieraient d'hystérie…

Le général Spears et sa «recrue», DeGaulle
Les Anglais qui avaient besoin d'un képi à opposer au prestige et l'action du Maréchal,
envoyèrent le général Spears de l'Intelligence service, débaucher
le vaniteux DeGaulle ulcéré de ne pas avoir été pris dans le gouvernement Pétain.

Ainsi avait grandi un mythe porteur qui devait permettre au général-micro exploitant le désarroi des populations d'Algérie de revenir au pouvoir en 1958, recevant comme lors de l'Épuration de 1944 l'appui des communistes…

Gaullistes et communistes encore complices dans les mois les plus sombres de l'Algérie de 1962…

Complices des massacres mais aussi complices des mêmes objectifs mondialistes… En juin 1940, le déserteur DeGaulle ne s'était emparé d'un micro que parce qu'ulcéré dans sa vanité de n'avoir pas été retenu dans le gouvernement du Maréchal Pétain… C'est le général Spears de l'Intelligence service, que les Anglais envoyèrent en émissaire saisir l'opportunité d'opposer un képi au prestige et à l'action du Maréchal… Débaucher et recruter l'histrion DeGaulle ne présenta alors pas grande difficulté…

Pour les communistes le contexte a aujourd'hui changé avec l'effondrement de l'Union soviétique… Jadis moteurs privilégiés du mondialisme et du sionisme ils ont été supplantés par l'islamisme… Communistes et islamistes ont bien parmi leurs promoteurs des hommes de même origine, juifs déclarés ou directement d'origine juive pour les communistes, Dönmeh pour les islamistes, Frères musulmans et Wahhabites… À la volonté mondialiste du slogan « prolétaires de tous pays, unissez-vous ! » a succédé l'arme de la propagation de la charia… manipulée au bénéfice des mêmes puissances occultes… Et voilà nos communistes cocus du mondialisme qui voudraient donner le change… se muant en "nationalistes" et "antisionistes"… L'Histoire a de beaux retournements !… Si les gaullistes, eux, ne renient pas leur sionisme, ils voudraient comme les communistes inclure le nationalisme - d'un traître à la Patrie - dans leur image mythique… Encore et toujours des falsifications… Que cette journée des psittacidés soit aussi l'occasion de faire un inventaire de toutes les autres falsifications et de les dénoncer !…






Rémy Porte vient de prendre sa retraite après une carrière complète d’officier, qu’il a terminée comme officier référent « Histoire » pour l’armée de Terre. Il dirige aujourd’hui le site http://guerres-et-conflits.over-blog.com/, site d’actualité de la presse et de l’édition en histoire.

Après une première partie de carrière dans les transmissions et la guerre électronique, il a fait le choix du statut des officiers experts avec une double spécialité de relations internationales et d’histoire. Il est titulaire d’un diplôme de Sciences Po., d’un DEA de droit international, d’un doctorat en histoire et habilité à diriger des recherches. Ses travaux portent essentiellement sur les guerres des XIXe au XXIe et l’histoire de l’armée française au cours des deux derniers siècles (avec trois axes principaux de recherche : l’organisation du commandement, les questions de renseignement, le soutien logistique) et il a publié une vingtaine de livres dont le dernier, 1940, aux éditions Perrin.

Breizh-Info l'a interrogé à ce sujet.


Rémy Porte : 1940, Vérités et légendes

Breizh-info.com : Qu’est-ce qui vous a amené à écrire cet ouvrage sur 1940 ?

Rémy Porte : J’étais un peu fatigué par l’ineptie des discours mémoriels, qui déforment régulièrement l’histoire pour la faire correspondre aux attentes des autorités. Paradoxalement, les évènements de 1939-1940 sont à la fois régulièrement commémorés mais mal connus et coincés entre deux mémoires aussi irréalistes l’une que l’autre : les pauvres manœuvres des rescapés de la 7ème compagnie pour échapper aux Allemands tout en fuyant les combats d’une part, et le récit inutilement héroïque d’une exceptionnelle résistance de l’armée française d’autre part. Il ne faut pas oublier qu’il s’agit bien d’une des plus graves défaites militaires de notre histoire et l’on ne peut donc exonérer l’armée de l’époque de toute responsabilité. Mais il ne peut pas y avoir, pour un effondrement d’une telle ampleur, de cause unique et les autorités politiques, les partis, les industriels comme les journalistes faiseurs d’opinion par exemple doivent assumer les leurs. Enfin, je suis lassé par le poids des idéologies dans la présentation des évènements historiques et l’instrumentalisation de notre histoire militaire.

Breizh-info.com : Parmi les interrogations auxquelles vous avez répondu, quels sont les principaux mythes qui ont la tête dure ?

Rémy Porte : La question des blindés français reste une source inépuisable de bêtises répétées à l’envi par les grands médias au fil des différentes commémorations. Non, la France n’avait pas moins de chars que l’Allemagne et c’est bien un problème de doctrine d’emploi des unités qu’il faut prendre en compte. On peut également citer le mythe de l’abandon des Français par les Britanniques à Dunkerque. Les Anglais ont sacrifié 250 navires de tous types et 180 avions pour sauver (légitimement) leur corps expéditionnaire, mais aussi, il ne faut pas l’oublier, près de 125 000 soldats français. Enfin, comment ne pas évoquer les ambiguïtés qui entourent les récits sur la ligne Maginot, trop chère et inutile pour les uns, quasiment victorieuse pour les autres.

Breizh-info.com : Vous expliquez notamment que l’armée allemande n’était pas aussi puissante qu’il a été raconté durant des décennies. Quid ?

Rémy Porte : L’armée allemande de 1940 est encore en voie de montée en puissance. Il ne faut pas oublier que la reconstitution d’une puissance militaire au sein du Reich commence en 1934, mais passer de 100 000 hommes à 4,7 millions en cinq ans exige énormément de moyens matériels pour équiper, armer, former, entretenir de tels effectifs. En outre, les pertes supportées pendant la campagne de Pologne aggravent encore les déficits. La Wehrmacht est en fait écartelée entre modernité et tradition, entre unités à la capacité opérationnelle élevée et unités de valeur très moyenne.

Contrairement à une idée reçue, elle reste majoritairement hippomobile, ses Panzer I et II sont surclassés par les chars français et les divisions de formation récente manque encore d’entraînement. Finalement, la capacité du commandement de contact à saisir les opportunités favorables et à manœuvrer dans un environnement interarmes et interarmées permettra de compenser ces faiblesses.

Breizh-info.com : Vous relativisez également l’appel du 18 juin ou plutôt son impact au moment où il a été fait. Racontez-nous ?

Rémy Porte : À la mi-juin 1940, des millions de Français sont sur les routes de l’exode et pour les autres, ils ont dans leur très grande majorité d’autres préoccupations que d’écouter la radio de Londres, surtout pour entendre un général inconnu. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que Pétain, chef du gouvernement à partir du 16 juin à la demande du président de la République, est extrêmement populaire. Il a prononcé un discours à la radio le 17, dans lequel il annonce rechercher l’ouverture de conversations avec l’Allemagne pour mettre fin aux combats, ce qui est compris par beaucoup comme l’annonce de l’arrêt des hostilités.

Dans ce contexte, l’appel du 18 juin au soir sur les ondes de la BBC, même renouvelé les jours suivants, n’avait objectivement que peu de chances d’être largement entendu. Il marque en fait surtout une rupture et l’annonce que quelques uns, progressivement rassemblés autour de DeGaulle, refusent la défaite.

Breizh-info.com : N’y-a-t-il pas aujourd’hui une méconnaissance des évènements militaires de la Seconde Guerre mondiale notamment chez la jeunesse ? L’étude « thématique » et politique (plutôt que chronologique) de cette guerre n’y est-elle pas pour quelque chose ?

Rémy Porte : La question déborde largement le cadre des évènements de mai-juin 1940. L’oubli de la chronologie est une erreur absolue en histoire puisque aucun évènement n’apparaît soudainement. Il peut par ailleurs conduire au péché d’anachronisme : on n’apprécie pas une situation passée à l’aune des idées et des principes d’aujourd’hui. Il faut toujours pouvoir prendre en compte l’environnement du moment et comprendre les formes, la densité, la vitesse des évolutions qui conduisent à tel ou tel fait marquant. L’approche thématique peut être passionnante, mais elle exige en amont d’avoir une solide connaissance d’ensemble. Avant de rédiger des poèmes, il faut savoir écrire correctement et acquérir un riche vocabulaire. Avant de composer une symphonie, il faut connaître les capacités des différents instruments. Avant d’étudier une thématique en histoire, il faut avoir étudié les évènements dans leur globalité. Enfin, lorsqu’il s’agit d’histoire militaire, on ne peut faire l’impasse sur une connaissance fine des armées en présence. L’approche politique est tout aussi réductrice, avec en outre le grave défaut d’être souvent handicapée par un biais idéologique qui conduit à déformer les faits pour les faire « coller » à un parti pris.

Breizh-info.com : Est-ce que des nouveautés historiques vont être apprises prochainement grâce à de nouvelles ouvertures d’archives ?

Rémy Porte : Il est peu probable que de nouvelles archives publiques viennent bouleverser notre connaissance des évènements de l’époque. Elles sont bien connues et accessibles. Par contre, il peut surgir à tout moment des fonds privés, des archives familiales qui n’ont pas encore été portées à la connaissance des chercheurs et du public et qui permettent d’affiner les analyses, de préciser certains points. Ces documents familiaux nous aident par exemple à comprendre les processus souvent complexes de prise de décision en prenant en compte le facteur humain. Enfin, sur des sujets d’histoire militaire qui, par nature, concernent plusieurs nations, plusieurs peuples, on ne peut pas se limiter aux seules archives françaises (ou britanniques, ou américaines, ou allemandes, etc.). Il faut croiser les archives officielles et privées de différentes origines et les différentes sources (témoignages oraux et écrits sur le vif ou ultérieurs, presse de l’époque, etc.) pour approcher la réalité des situations.

Breizh-info.com : Y a-t-il pour vous des films, des livres, indispensables pour bien comprendre la Seconde Guerre mondiale ?

Rémy Porte : Question bien difficile au regard des milliers de livres publiés et des centaines de films tournés sur la Seconde Guerre mondiale ! Parle-t-on des opérations à l’ouest ? Du front de l’est ? De la guerre du Pacifique ? Des combats en Afrique du Nord ? De la guerre terrestre, navale ou aérienne ? Des productions françaises, allemandes, britanniques, américaines, soviétiques (pour ne citer que les principales) ? Pour les livres, je ne peux que conseiller de commencer par les grandes études classiques qui donnent une compréhension d’ensemble du conflit avant d’aborder les études sectorielles sur telle ou telle campagne. Pour les films, je crois qu’il ne faut pas chercher dans une œuvre de fiction et de divertissement une quelconque « vérité historique ». Il me semble préférable de les considérer comme un loisir et à ce titre prendre simplement plaisir à une reconstitution ou à un jeu d’acteur.

Propos recueillis par Yann Vallerie



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Proposons ici à titre d'illustration la relation d'un des crimes les plus graves de DeGaulle, un crime qu'une histoire mythifiée voudrait aussi faire oublier… Un choix très personnel… De nombreux autres crimes tout aussi graves sinon plus auraient pu être retenus… Un choix justifié surtout parce que de ce crime-là j'en ai personnellement vécu toutes  les péripéties, avant, pendant et après…


Jeudi 5 juillet 1962. Cinq heures du matin. Le jour commence à se lever sur Oran. Il devrait faire très chaud. Un souffle de sirocco vient de franchir la barrière des hauts plateaux et se laisse glisser vers la mer. Comme le reste du pays, la ville a voté l’indépendance le dimanche 1er juillet. Celle-ci est effective depuis le 3.

Les festivités populaires sont pour la journée du 5. C’est une rumeur insistante qui l’annonce, de rue en rue, de quartier en quartier. Sur les 200 000 Oranais français d’origine européenne et 30 000 de religion juive, sont encore là environ 40 000 personnes, hommes, femmes et enfants mêlés. Peut-être moins. Dans des conditions matérielles inimaginables, les autres ont déjà pris le terrible et définitif chemin de l’exil…

Oran, le 5 juillet 1962… Mentez, mentez salauds !…
Arabes, Berbères, Européens… nous tous Français d'Algérie, nous n'oublierons jamais…

Quarante mille vivants, mais dont deux tiers sont pris au piège du manque de moyens de transport. Et pour cause : le gouvernement gaulliste n’a pas ajouté la moindre rotation — de navire ou d’avion — pour répondre à l’immense et prévisible torrent des départs : les Pieds-noirs ne sont pas les bienvenus. Mais l’ont-ils jamais été hors en 1914 - 1918 et 1944 - 1945 ? Les abords de l’aéroport de La Sénia et la zone portuaire sont ainsi devenus des lieux d’entassement, de désordre indescriptible et de désespoir. Le chaos humanitaire s’ajoute au chaos militaire. Paris a choisi de l’ignorer.

Restent donc quelques milliers d’Oranais pieds-noirs qui, volontairement, n’ont pas encore quitté leur terre natale. Eux ont choisi d’attendre et voir (« Tout va peut-être rapidement s’améliorer… »), ou par opportunisme personnel, ou craignant pour leur entreprise, leur commerce ou leurs biens. Des vieillards isolés aussi, qui n’ont plus la force de partir vers une terre que pour la plupart ils ne connaissent pas.

Ou plus volontairement encore pour quelques centaines d’entre eux. Ces derniers sont logiques avec eux-mêmes et le choix politique qui les a conduits à soutenir plus ou moins activement le FLN. Pour eux, bientôt, le mirage d’une carte d’identité algérienne. Ceux que l’on appellera plus tard les « pieds-verts ». Un pour cent des Français d’Algérie.

Officiellement, la guerre est stoppée

5 juillet 1962. Depuis plus de trois mois, et contre toute évidence, la guerre est officiellement terminée. L’armée française qui a stoppé unilatéralement toute action militaire depuis le 19 mars à midi, ne protège plus la population civile européenne. Encore plus qu’avant, les Pieds-noirs sont ainsi livrés depuis ce jour de défaite et de deuil, aux innombrables attentats aveugles du FLN et aux enlèvements qui augmentent en flèche. Désormais seule, face aux tueurs FLN et l’inflexibilité du parjure, l’OAS fondée à la mi-1961. Ses commandos ont poursuivi le combat contre l’inéluctable. À un contre dix. Contre le FLN et les forces françaises devenus désormais alliés contre nature.

Le gigantesque incendie du port pétrolier est le point final de cette guerre dans la guerre. Collines et Autonomes ont quitté Oran pour l’Espagne dès le 26 juin. L’Organisation armée secrète n’est plus, et avec elle son rêve de conserver l’Algérie à la France. Il ne reste plus un seul de ses quelques centaines de jeunes hommes survivants d’une année d’ultra-violence, et durant laquelle —vcomme à Alger — ils se sont battus contre le sanglant terrorisme FLN, et l’impitoyable répression d’une armée française dirigée contre un million de civils français désarmés. Français dits « d’Algérie »… De ces commandos oranais, la moitié d’entre eux est tombée les armes à la main en moins de douze mois. Et majoritairement face aux balles de l’armée française et la terrible et tortionnaire gendarmerie mobile.

Impitoyable et aveugle répression dirigée contre ces petits blancs coupables d’avoir cru jusqu’au bout au « Vive l’Algérie française » crié devant 100 000 personnes le 4 juin 1958 à Mostaganem à 90 km à l’est d’Oran, et par DeGaulle lui-même. Le Général-parjure.

Le chaos a tout dévoré. Entre un monde qui vient de mourir et celui qui ne lui a pas encore succédé, vient de s’ouvrir une béance d’apocalypse où le pire et l’impossible deviennent ordinaires. Malgré l’apparence, plus aucune structure officielle ne fonctionne. Bien à l’abri dans ses cantonnements urbains, l’armée française observe et ne bouge plus. Pour la seule ville, 16 000 hommes en armes et leurs officiers, réduits sur ordre au déshonneur. Oran-la-Française, Oran-la-Rebelle finit de mourir.

Sept heures. Le soleil est déjà haut. Santa-Cruz, son fort et sa basilique vont tenter une dernière fois de veiller sur les survivants. La nuit n’a pas été calme malgré les rues désertées. Pas de fusillades, pas d’explosions, et pourtant peu nombreux sont ceux qui ont pu dormir. Les bruits les plus contradictoires se font entendre partout. Une tension de plus en plus palpable a précédé le progressif envahissement des avenues et des boulevards par une foule déchaînée. Même les murs ont peur.

Cette tension qui monte, peu à peu se fait tintamarre. Tandis que le centre-ville tarde à s’ouvrir au présent, les faubourgs surpeuplés se répandent dans les rues étroites. Direction le centre. Depuis deux jours le bled a investi Oran pour y célébrer l’indépendance et matérialiser la victoire sur la France.

La ville entre en ébullition

La couronne de quartiers périphériques entre progressivement en ébullition. Ébullition de joies et de triomphe politique, modérée d’incertitudes soigneusement provoquées et entretenues par des meneurs du FLN. Comme l’annonce l’une de leurs banderoles : « L’indépendance n’est qu’une étape »…

Mais pour qui œuvrent-ils ? Pour le clan Ben Bella ou celui du seul Boumediene et son armée des frontières ? Pour l’un des multiples courants d’un Gouvernement provisoire de la République algérienne déjà dépassé ? Pour l’un ou l’autre des nombreux clans avides de pouvoir ? Nul ne le sait. Et cela n’a pas d’importance ; le peuple algérien triomphe pour quelques jours encore tandis que chaque faction veut démontrer l’incompétence de l’autre et confisquer à son bénéfice les rênes du pouvoir naissant.

Le Maroc n’est pas loin, et « Radio Trottoir » assure que l’armée des frontières fonce depuis cette nuit dans la direction de cette capitale de l’Ouest algérien… Capitale dont le contrôle lui ouvrira ensuite la route d’Alger et d’un pouvoir à prendre.

Huit heures. Une chaleur qui s’annonce étouffante et lourde va s’infiltrer partout. Le soleil déjà écrase la ville. Les faubourgs commencent leur lente descente vers le centre-ville. Médioni, Lamur, Victor-Hugo, Ville-Nouvelle, le Village-Nègre, le sanguinaire quartier des Planteurs, Eckmühl… Des dizaines de milliers d’Algériens, ivres de joie et de vengeance, déferlent vers le centre. Dans toutes les bouches, les cris, les slogans révolutionnaires et les chants de mort se mêlent en un charivari de violence et de transe. Cette marée humaine se retrouve progressivement aux portes des quartiers à dominante européenne.

Entre neuf heures et dix heures, trois points névralgiques sont investis : par la rue d’Oudjda, la rue de Tlemcen et le boulevard du 2ème Zouaves, dix mille manifestants surexcités convergent vers la place Karguentah. Le lieu est devenu politiquement symbolique même si les Pieds-noirs l’ignorent : la vaste place ovale est dominée par l’étrange bâtiment nommé « Maison du colon ». En Algérie, jusqu’en 1962, « colon » est le titre de noblesse de celui qui travaille une terre difficile. Après 1962, ce sera autre chose… C’est donc l’équivalent d’une Maison des agriculteurs… Dans "Le Minotaure ou la halte d’Oran", Albert Camus a longuement brocardé ce bâtiment très original et de belle taille, mais à l’architecture inclassable et surprenante.

Son faîte en forme de coupe renversée domine la cohue vociférante. À quelques centaines de mètres, au terme du boulevard de Mascara et du boulevard Joffre, la place d’Armes — vaste espace arboré bordé de bâtiments officiels — est maintenant noyée elle aussi d’une masse humaine maintenant déchaînée, hurlant et gesticulant. De rares meneurs en civil — commissaires politiques — s’y sont infiltrés, et tentent là aussi d’amplifier et diriger cette puissance que plus rien ne pourra bientôt contenir.

Là aussi, deux ou trois dizaines de milliers d’hommes jeunes surtout, excités par les you-you stridents des femmes. Cette mer humaine se répartit entre la mairie et sa façade de mini-Versailles, le remarquable et gracieux théâtre municipal construit au début du siècle, et enfin le Cercle militaire, mess des officiers où des centaines de soldats français sont retranchés sur ordre. Ils savent qu’ils ne bougeront pas. « Quoi qu’il arrive », comme cela a été décidé à l’Élysée.

Et puis, dernier lieu symbolique un peu plus bas vers cette avenue du Général-Leclerc qui mène vers le cœur urbain de la place des Victoires, le square Jeanne d’Arc au pied des escaliers de la cathédrale, à la façade de style néo-mauresque. Là aussi enfin, une foule gigantesque occupe tout ce qui peut l’être et entoure la statue équestre de la Pucelle. Celle-ci, toute dorée des sabots jusqu’à l’épée inclinée vers le sol, élève depuis trente et un ans son visage vers le ciel. Encore quelques instants, puis escaladée par les plus agiles, elle va se retrouver porteuse d’un immense drapeau vert et blanc.

Le triangle de la mort prend forme

Le triangle de la mort est ainsi tracé et scellé. Le décor est en place. Il ne manque plus que les trois coups d’une prévisible et inévitable tragédie… Trois coups bientôt frappés à la porte du malheur… Le rideau va se lever sur le plus grand massacre de civils de toute la guerre d’Algérie. Et dont pourtant celle-ci ne fut pas avare.

Aussi étrange que cela puisse paraître aujourd’hui, de nombreux Pieds-noirs marchent sans crainte au milieu de cette foule. Oran la populaire se maintient fidèle à sa vieille tradition cosmopolite. Depuis toujours, dans l’Oran populaire, on cohabitait, on était voisin, la pauvreté partagée était le meilleur lien…

Les derniers Oranais français observent, certains se réjouissent, d’autres tentent de rejoindre leur lieu de travail par volonté ou habitude. Avec le temps, ils se sont habitués aux attentats aveugles, aux grenades, aux brusques fusillades, aux bombes du FLN, aux attaques brutales des groupes OAS, aux mitrailleuses 12,7 et aux canons de 37 de l’armée française. La guerre et la mort n’ont pas réussi à empêcher ce peuple d’âme espagnole à continuer de vivre.

Et puis, cette guerre qui n’a jamais dit son nom, n’est-elle pas finie depuis plus de trois mois ? L’armée française l’a placardé partout ; ce doit donc être vrai puisqu’elle l’affirme. Et puis, et puis elle est bien toujours là ; c’est donc bien que tout va rentrer dans l’ordre. L’Oranais n’est pas avare de contradictions…

Une détonation et la ville s’embrase

Onze heures. Ou quelques minutes avant. Place Karguentah. Soudain un coup de feu, parti d’on ne sait où ; suivi de plusieurs autres. Quelqu’un est tombé. La panique. Des cris, des hurlements ; des doigts se tendent selon un automatisme parfait. « La Maison du colon ! C’est là ! C’est là ! L’OAS ! C’est l’OAS ! »

Presque à la même seconde, devant la cathédrale, même tir, mêmes doigts qui se tendent, eux, vers les balcons des immeubles proches, mêmes cris : « C’est l’OAS ! C’est l’OAS ! » Le massacre peut enfin commencer.

En quelques secondes, c’est la chasse à l’homme blanc. D’abord vont mourir ces Européens présents parmi la foule. Les couteaux jaillissent des poches, des pistolets, des cordes, des haches, des ongles de femmes, de lourdes et tranchantes pierres toutes bien préparées… Le double abattoir qui vient simultanément de s’ouvrir va engloutir en quelques minutes les premières dizaines de victimes. L’horreur ne peut se décrire… Place de la Cathédrale, place Karguentah, on tue. On tue comme on chante ; on tue comme on respire…

Malheur au blanc et à tout ce qui s’en rapproche

Place d’Armes, les manifestants, après de multiples égorgements, font maintenant des prisonniers. Tout ce qui montre allure européenne, vêtements, visages, langage, tout est capturé, dépouillé, roué de coups, blessé. Malheur au blanc et à tout ce qui s’en rapproche. Là aussi, des dizaines et des dizaines d’hommes de femmes ou d’enfants touchent à leur dernier jour. La ville n’est plus qu’une clameur multiple de cris de mourants, de pogroms et de haine brutale.

La contagion est instantanée : en moins d’une heure le massacre pousse ses métastases partout et s’organise selon d’épouvantables modes. Ici, on tue à la chaîne. Là, c’est à l’unité, à la famille. En quelques lieux, le sang a envahi les caniveaux. Ailleurs, on assassine, on démembre, on violente, on blesse pour faire plus longtemps souffrir ; le parent meurt devant le parent provisoirement épargné.

Douze heures trente. La place d’Armes est devenue maintenant un lieu de détention et de transit. Tandis qu’à cinquante mètres, à l’abri du Cercle militaire et des arbres qui le dissimulent, les soldats français ne peuvent pas ne pas entendre l’affreux concert de mort qui va durer jusqu’à dix-sept heures.

Plus connu sous le nom de « Boucher d’Oran », le général Katz nommé à cette fonction par un autre général-président, effectuera même à cette heure-là un rapide survol en hélicoptère. Sans rien repérer de particulier certifiera t-il, sinon quelques attroupements et défilés de manifestants joyeux. « Ne craignez rien, mon Général, aucun imprévu notable dans cette ville où vous avez prononcé l’un de vos meilleurs discours, et qui vous a tant acclamé… »

« Mort aux Roumis ! », « Mort aux Youdis ! »

Treize heures. Place d’Armes toujours. Des camions militaires se présentent et s’alignent. Dans les premiers, on entasse ceux des prisonniers qui tiennent encore debout. Les autres sont chargés de cadavres. De dizaines et de dizaines de cadavres jetés les uns sur les autres. Ces camions proviennent des Établissements du Matériel de l’armée française. Camions que celle-ci a remis depuis le 19 mars au FLN pour la logistique de la force locale chargée d’effectuer la transition et le maintien de l’ordre.

Tous se dirigent vers le sinistre quartier du Petit Lac. Où les vivants sont atrocement massacrés, et tous les corps enfouis dans d’innommables charniers rapidement ouverts à la pelleteuse, ou au fond de ces marigots d’eau salée et putride qui lui ont donné son nom.

Treize heures. L’horreur couvre maintenant toute la ville. Partout des chasses à l’homme menées aux cris de « Mort aux Roumis ! », « Mort aux Youdis ! » Les tueurs sont innombrables. Ici, on égorge une famille. Un peu plus loin, une autre est fusillée contre un mur déjà balafré de sang. Là, on arrête les voitures ; les occupants blancs meurent ou prennent la direction du Petit Lac tandis que la voiture est volée ou incendiée. Ailleurs, des groupes déchaînés pénètrent dans les immeubles, éventrent les portes et tuent tout ce qui est pied-noir. Ailleurs encore, un vieil homme est jeté du haut de son balcon. Plus loin une femme court et tente inutilement d’échapper à ses poursuivants.

Des groupes indistincts d’hommes et de femmes, les mains en l’air, sont conduits à pied vers le commissariat central, ou un autre lieu de détention qui deviendra vite lieu de mort. Peu de coups de feu. Beaucoup de cris d’agonie. Des hurlements, des ordres encore. Des poursuites.

Des hangars, des gymnases, des dépôts commerciaux deviennent lieux de détention. Détention très provisoire. Et durant ces heures maudites, les mêmes camions poursuivent leur lent travail de noria et d’effacement des traces. C’est ainsi qu’au quartier de la Marine proche de la Calère, plus d’une centaine de « suspects » sont regroupés dans un vaste local duquel ils seront libérés, leur a-t-on dit, après vérification de leur identité. Il n’y aura pas un survivant. Tous disparaissent à jamais.

Quinze heures. Un bref accrochage a lieu sur l’esplanade de la gare, tandis que finit de se consumer à même le sol le corps d’un homme jeune qui a longtemps hurlé. L’accrochage est le fait d’une section de soldats français menée par un jeune officier qui sans le savoir va tenter à lui seul de sauver l’honneur d’une armée déshonorée. Sa section reprend ainsi un petit groupe de prisonniers conduit à pied vers leur destin. De la même façon, plus bas vers le centre, un lieutenant courageux va ravir plus d’une dizaine d’otages européens en passe de disparaître dans les sous-sols du commissariat central.

Une bouteille à la mer

Quinze heures encore. Place de la Bastille. Dans le bâtiment de la Grande Poste, plus précisément dans la partie occupé par le central téléphonique relié à la métropole, se trouvent encore des téléphonistes — dont une majorité de jeunes femmes. Celles-ci ont lancé un appel au secours sur les fréquences internationales. Comme on lance une dernière bouteille à la mer. Cet appel aurait été capté par un navire anglais qui l’aurait amplifié et transmis vers le Nord-Méditerranée. Mais cet appel a aussi été capté par les radios de l’armée FLN des frontières. Ses hommes viennent d’encercler le bâtiment et l’investissent. La plupart des occupants sont tués sur place. Les survivants chargés sur leurs véhicules pour disparaître à jamais. Là aussi, nul ne sera jamais retrouvé.

Même le dieu des chrétiens abandonne les siens ; les églises n’ont su protéger les quelques fuyards éperdus qui espéraient y trouver refuge. La grande synagogue du boulevard Joffre n’a pu faire mieux. « Mort aux Youdis ! »,« Mort aux Roumis ! »

Ça et là, cependant, de très rares prisonniers échappent au massacre. Le hasard, autre nom du destin, fait passer un Algérien musulman près d’un groupe de vivants provisoires. Celui-ci y reconnaît un voisin, un ami, un employeur, une femme ; quelqu’un qu’il connaît peut-être depuis l’enfance. Si l’homme a réussi à convaincre exécuteurs ou garde-chiourmes, un homme est épargné, une femme revit. Ces retours de l’enfer restent hélas rarissimes.

Dix sept heures. Ou un peu avant. Les rumeurs internationales commencent à se faire trop insistantes. Les questions des capitales affluent vers Paris. « Que se passe-t-il à Oran ? » Est-ce là la seule cause du changement d’attitude ? Soudain, de plusieurs casernes simultanément, surgissent des patrouilles armées et quelques blindés. Un corps militaire FLN se joint à elles. Le secret politique ne livrera rien des rapides accrochages, des rares échanges de feu. Le calme est rétabli dans l’heure qui suit. Même les bourreaux ont besoin de repos.

Mais si cette réaction reste bien timide, elle suffit pourtant à stopper les massacres et ses tragédies. L’ALN publie aussitôt un communiqué affirmant que l’ordre est rétabli dans Oran, et que les ennemis de la révolution algérienne ne sont pas parvenus à leurs fins. « Des meneurs, disent-ils, ont été arrêtés et seront jugés et punis par les tribunaux de la République algérienne démocratique et populaire. »

Le couvre-feu est instauré à partir du coucher du soleil à 19h55. Mais pas pour tout le monde. Pendant la nuit, les mêmes camions nettoient la ville de ces derniers cadavres et effacent les traces et les preuves du carnage. La gendarmerie mobile française prend quelques photos des derniers entassements de cadavres. Ces photos sont introuvables.

Le 6 juillet, rien n’y paraît plus

Le 6 juillet, la ville est propre. Même si ça et là, quelques tueurs sont encore à l’œuvre. Les journalistes français présents sortent des bâtiments militaires où la France a assuré leur protection. Mais il n’y a plus rien à voir, ils peuvent circuler…

Dans les jours qui suivent, des hélicoptères français ramèneront d’indiscutables clichés, pris au-dessus du Petit Lac, et montrant de multiples et longues fosses parallèles en passe d’être refermées.

L’Algérie nouvelle vient de naître. Son acte de naissance est paraphé des sept cents noms des victimes françaises, sacrifiées sur l’autel du vent de l’Histoire et celui de l’anticolonialisme.

Cinquante quatre ans après, un bilan plus précis reste difficile à établir. Sans doute entre sept cents et mille deux cents morts. L’administration française, la civile aussi bien que la militaire, a tout fait pour que la vérité ne puisse sortir du puits qu’elle a contribué à fermer avec l’aide active des différents pouvoirs algériens.

Le pouvoir gaulliste ne peut être coupable. Le pouvoir algérien non plus. L’amitié franco-algérienne est intouchable. Cette perversion du silence fonctionne toujours aujourd’hui, ardemment soutenue par la gauche française.

D’abord, il fut question de 25 morts (général Katz). Puis d’une petite centaine, un an plus tard et dans la presse parisienne. Ce nombre a plafonné ensuite à 325, pendant quarante ans, de 1970 à 2010. Sans listes nominatives précises ni recherches réelles. Il a fallu la volonté et l’obstination d’un chercheur historien pour pouvoir rompre « à titre exceptionnel » le secret des archives officielles françaises, et découvrir dans l’épouvante et l’horreur, la réalité de la tragédie du 5 juillet 1962 à Oran.

Raison d’État…

Sept cents morts… Au minimum. À 95%, les corps n’ont jamais été retrouvés. C’est à dire qu’ils n’ont jamais été recherchés. La France et son allié l’Algérie ne pouvant être soupçonnées d’assassinats collectifs et de complicité. Cela se nomme « raison d’État ».

Aujourd’hui encore et pour le nombre, rien n’est sûr, rien n’est prouvé. Seuls savent les pieds-noirs d’Oran et les vieux Algériens qui se souviennent et en parlent discrètement encore entre eux. Le sujet est devenu une bombe à retardement politique qui finira inéluctablement par exploser.

Mais les sept cents morts du 5 juillet 1962 ne sont qu’une partie d’un bilan encore plus lourd. Après la signature des accords dits d’Évian, et ne pouvant poursuivre les assassinats de Pieds-noirs avec la même liberté qu’auparavant, le FLN a développé une terrible politique d’enlèvements. Pour briser, chez ce peuple, la volonté de se maintenir. Et lui imposer la seule alternative, celle de « la valise ou du cercueil… »

De ce funeste mois de mars 1962 jusqu’à mars 1963, il y a eu plus de 2 000 enlèvements effectués sur cette part de la population française. Des blédards surtout, des petits blancs qui refusaient de perdre cette terre qu’ils aimaient et qui avait été leur patrie. Parmi eux, quelques centaines ont été libérés vivants, quelques dizaines de corps retrouvés. Les autres, avec ceux du 5 juillet 1962, ont désormais leurs noms gravés sur le Mur des Disparus à Perpignan. Tel qu’il est écrit à l’entrée du monument : « C’est ici leur premier et ultime tombeau »…

Combien de temps va t-il encore falloir attendre pour que ce jour affreux trouve enfin la page toujours blanche qui l’attend dans les livres d’histoire ? Combien de temps va t-il encore falloir attendre pour que soient sondés les charniers du Petit Lac ? Combien de temps va t-il encore falloir attendre pour que s’ouvrent toutes les archives, et que la France ait la grandeur de reconnaître sa complicité dans ce crime d’abandon de son propre peuple ? Et, comme pour ceux d’Oradour-sur-Glane, recevoir en son sein la mémoire de ces Disparus qui n’avaient cessé de croire en elle. Oui, combien de temps encore ?

Réveille-toi Antigone, Créon est toujours de ce monde. À nouveau Polynice a besoin de toi…


Oran, 5 juillet 1962, ces Européens s'étaient réfugiés dans l'église du Saint-Esprit, place de la Bastille…
les hordes du FLN sont venues les enlever sous les yeux du prêtre impuissant…


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Gaullistes et communistes dans leurs œuvres : femmes françaises accusées de collaboration et tondues (Paris, été 1944)

L'Épuration… on remarquera de trop nombreuses et troublantes similitudes entre certaines scènes de cette période sombre de l'Épuration gaullo-communiste des années 1944-45 et les massacres d'Oran du 5 juillet 1962, mauvais sang ne saurait mentir !



Nouvelles de Saintonge - La période de l’Épuration à Jonzac en 1944/1945 : établir des listes de traîtres et de suspects…

Jean-Paul Perrin : L’Épuration en région montluçonnaise (1944-1949)

Max Lagarrigue : Épuration sauvage, légale : vengeance ou soif de justice de la Résistance ?

José Castaño : Les crimes de l’Épuration




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Le Gaullisme maladie sénile de la droite

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Statut de DeGaulle après sa désertion…


Journal officiel du 24 juin 1940
MINISTÈRES DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DE LA GUERRE

ÉTAT-MAJOR GÉNÉRAL
Par décision ministérielle du 22 juin 1940, la promotion au grade de général de brigade à titre temporaire de M. le colonel d'infanterie breveté de Gaulle (Charles-André-Joseph- Marie) est annulée.

ADMISSION À LA RETRAITE
Armée active
Par décret en date du 23 juin 1940 M. le colonel d'infanterie breveté d'état-major de Gaulle (Charles-André-Joseph-Marie) est admis d'office à la retraite, par mesure de discipline.


- Par décision ministérielle du 22 juin 1940, la promotion au grade de général de brigade à titre temporaire
de M. le colonel d'infanterie breveté de Gaulle (Charles-André-Joseph- Marie) est annulée.

- Par décret en date du 23 juin 1940 M. le colonel d'infanterie breveté d état-major de Gaulle (Charles-André-Joseph-Marie)
est admis d'office à la retraite, par mesure de discipline.
Après ce 23 juin 1940, DeGaulle Charles mis à la retraite d'office par mesure disciplinaire et avec le grade de colonel d'infanterie n'a plus jamais exercé de fonction militaire. DeGaulle est bien retraité avec le grade de colonel. Il a reçu une pension de colonel. Si, en tant que politicien, il s'est ensuite affublé d'un uniforme de général c'est en toute illégalité… Encore une de ses falsifications, et pas la moindre !





Constatation du statut de déserteur
8 décembre 1940 : déchéance de la nationalité française pour De Gaulle :
par décret du 8 décembre 1940, publié au Journal officiel du 10 décembre 1940, page 6044,
Charles De Gaulle est déchu de la nationalité française, à effet du 2 août 1940,
sur le fondement de la loi du 23 juillet 1940.






Première page de l’expédition du jugement du tribunal militaire permanent de la 13e Région,
séant à Clermont-Ferrand et jugeant :
le colonel d'Infanterie breveté d'État-major en retraite DeGaulle Charles, né le 22 novembre 1890 à Lille

Les questions, le tribunal devait répondre à six questions :
- Entretien d'intelligence avec une puissance étrangère, l'Angleterre ;
- Allocutions radiodiffusées de nature à provoquer, de la part de l'Angleterre, des agissements nuisibles à la France ;
- Provocation de militaires et de marins à passer au service de l'Angleterre ;
- Risque provoqué contre les Français, en affirmant que les clauses de l'armistice ne seraient pas respectées ;
- Désertion ;
- Désertion ayant eu lieu sur un territoire en état de guerre.

Les réponses

La sentence


Les signatures des juges (les généraux Frère, Noël, de La Laurencie, de La Porte du Theil, Langlois, Etcheberrigaray et Bérard),
suivies de celle du greffier (Moissenet)



Le Figaro, édition de Clermont-Ferrand le samedi 3 août 1940
Un simple entrefilet révélant la maigre importance donnée alors au procès et au condamné


Lettre du Maréchal Pétain rendant non exécutoire la condamnation à mort de DeGaulle



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