Hery Rajaonarimampianina : "Tout montre que je vais gagner la Présidentielle"
Hery Rajaonarimampianina est arrivé au second tour de la Présidentielle malgache, face à son adversaire Jean-Louis Robinson. Malgré la situation difficile de Madagascar, le candidat soutenu par le Président de transition, Andry Rajoelina, qui l’avait nommé ministre des Finances en 2009, se dit confiant pour l’avenir de son pays. Il a accordé une interview exclusive à Afrik.com.
Madagascar est dans une grande impasse. Mais Hery Rajaonarimampianina se dit prêt à relever les défis auxquels fait face la Grande Île. Natif d’une banlieue nord de la capitale malgache, Antananarivo, il est issu d’une famille modeste. Après avoir intégré l’université d’Antananarivo, il obtient une maîtrise en économie, puis poursuit ses études au Canada, avant d’obtenir ses diplômes en finance, comptabilité et d’expertise comptable. De retour à Madagascar, il devient directeur d’études à l’Institut national de sciences comptables et de l’administration d’entreprise (INSCAE) entre 1991 et 1995. Il crée ensuite un cabinet d’expertise comptable, "Auditeurs Associés" et commissariat aux comptes. Celui-ci conseille les principaux dirigeants d’entreprise de Madagascar. En 2009, il est nommé ministre des Finances et du Budget par le Président de transition, Andry Rajoelina, qui lui a apporté son soutien à la présidentielle. Hery Rajaonarimampianina a posé sa candidature au scrutin sans parti politique, mais sous la bannière de l’association "Hery Vaovao hoan’i Madagasikara", qui signifie "Force nouvelle pour Madagascar".
Afrik.com : Quels sont concrètement vos ambitions pour Madagascar ?
Hery Rajaonarimampianina : Ma première ambition est de lutter contre la pauvreté. Je veux mettre en place une politique de développement durable et une politique économique inclusive, qui prend en compte toutes les forces vives du pays, car elles doivent participer au redressement du pays. Je veux réinstaurer l’autorité de l’État qui fait défaut depuis de nombreuses années à Madagascar. Je pense aussi que la restauration de la confiance entre les politiques et la population est très importante. Je veux aussi mettre en place une justice impartiale à Madagascar et lutter contre la corruption, ainsi que promouvoir un développement harmonieux de toutes les régions de Madagascar. Il s’agit d’instaurer une décentralisation économique, car on ne peut pas asseoir une véritable démocratie sans développement de l’arrière-pays.
Afrik.com : Mais aurez-vous les moyens de réaliser ce programme, sachant que Madagascar est mis au ban de la communauté internationale et que les bailleurs de fonds ont fui le pays depuis de nombreuses années ?
Hery Rajaonarimampianina : Je pense que tout est une question de confiance. Mais je tiens quand même à préciser que les sanctions internationales ne sont pas tombées sous le régime de transition, mais sous le régime de Marc Ravalomanana et de son gouvernement. Ils ont été sanctionnés pour leurs nombreuses dérives et leur gestion calamiteuse du pays. Je serai en mesure de discuter avec les investisseurs et j’ai l’intention de faire revenir les bailleurs de fonds à Madagascar. Je veux leur parler des projets d’avenir que j’ai pour le pays et de mes engagements de politique de bonne gouvernance. Mais il n’y a pas que les bailleurs de fonds qu’il faut convaincre de revenir investir, il y a aussi les investissements directs à l’étrangers (les IDE). Je veux donc mobiliser le secteur privé et assurer qu’on va mettre en place un cadre juridique qui leur permettra d’investir à Madagascar en toute sécurité.
Afrik.com : La situation de Madagascar est plus que critique. Selon le dernier rapport de la Banque mondiale, près de 92% des Malgaches vivent avec moins d’un dollar par jour. Pensez-vous avoir suffisamment de capacités pour redresser le pays ?
Hery Rajaonarimampianina : J'ai la conviction et les capacités pour redresser Madagascar. Et pour y arriver, je compte mobiliser toutes les forces vives du pays. Depuis 50 ans, Madagascar vit dans la pauvreté, alors que le pays possède beaucoup de ressources naturelles et humaines d’ailleurs. Madagascar a par exemple d’énormes ressources marines qui sont inexploitées.
Hery Rajaonarimampianina : J'ai la conviction et les capacités pour redresser Madagascar. Et pour y arriver, je compte mobiliser toutes les forces vives du pays. Depuis 50 ans, Madagascar vit dans la pauvreté, alors que le pays possède beaucoup de ressources naturelles et humaines d’ailleurs. Madagascar a par exemple d’énormes ressources marines qui sont inexploitées.
Afrik.com : Depuis 2009, vous étiez aux commandes du ministère des Finances. Or le bilan de la transition est très négatif. N’estimez-vous pas avoir aussi une part de responsabilités dans la situation actuelle du pays ?
Hery Rajaonarimampianina : Mais le bilan de la transition n’a pas été que négatif, il faut quand même être honnête. On ne peut de toute façon pas désigner un responsable de la situation actuelle du pays, car toutes les forces politiques du pays ont participé à la transition. Si le régime de transition a autant duré, c’est parce que les uns et les autres n’ont pas fait ce qu’il fallait faire pour l’organisation d’élections. Mais le Président Rajoelina souhaitait depuis très longtemps que des élections se tiennent.
Afrik.com : Lorsque vous étiez ministre des Finances, une fonction d’envergure, vous n’avez pas réussi à faire bouger les lignes. En quoi cela changera-t-il si vous êtes élu à la tête du pays ?
Hery Rajaonarimampianina : D’abord la position que j’avais dans le cadre du régime de transition ne sera pas la même lorsque je serai élu Président. Dans le régime de transition, je n’avais pas un pouvoir particulier pour développer le pays. Mais j’ai quand même effectué des choses positives. La monnaie malgache n’a pas été dévaluée. Durant toute la période de la transition, tous les fonctionnaires ont été payés rubis sur ongle. Et il est vrai que j’ai appliqué une politique de rigueur et d’austérité, mais aussi une bonne gouvernance.
Afrik.com : Lors d’un face-à-face télévisée le 11 décembre, votre adversaire Jean-Louis Robinson, soutenu par le Président déchu, Marc Ravalomanana, vous a traité de putschiste. Est-ce le cas puisque vous êtes soutenu par celui qui a mené ce coup d’État ?
Hery Rajaonarimampianina : (Il rit !) Je ne considère pas Jean-Louis Robinson comme un adversaire mais comme un concurrent. Il vit toujours dans une autre époque et c’est bien dommage pour un candidat à la Présidentielle. Monsieur Ravalomanana a démissionné. Il a signé une lettre de démission. Donc je ne vois pas pourquoi on parle de putschiste.
Afrik.com : Mais vous savez qu’il n’a pas démissionné de son plein gré…
Hery Rajaonarimampianina : Il n’est plus au pouvoir parce qu’il n’a pas convaincu le peuple, c’est tout.
Afrik.com : L’histoire de Madagascar a été troublée par des coups d’État à répétitions. Vous-même n’êtes pas à l’abri d’un renversement si vous êtes élu. Que comptez-vous faire contre cette menace ?
Hery Rajaonarimampianina : On n’est jamais à l’abri de ce genre de situation. Je pense que lorsqu’on a le soutien de la population, ce genre de chose ne peut pas se produire. C’est pour cela que je pense que le plus important c’est de rétablir la confiance entre les dirigeants du pays et la population. C’est vraiment ce qui manque à Madagascar. Et c’est une tache à laquelle je vais m’atteler.
Afrik.com : Le fait que vous soyez officiellement soutenu par Andry Rajoelina et Jean-Louis Robinson par Marc Ravalomanana n’est-il pas anti-démocratique, compte tenu de leur poids dans le pays ?
Hery Rajaonarimampianina : On ne travaille pas de la même manière que Jean-Louis Robinson. Jean-Louis Robinson utilise la carte Ravalomanana pour réussir et atteindre ses objectifs. Il brandit cette carte en promettant à Marc Ravalomanana qu’il le fera revenir dans le pays et qu’il nommera son épouse, Lalao Ravalomanana, Premier ministre.
Afrik.com : Mais n’est-ce pas votre cas aussi ?
Hery Rajaonarimampianina : Non, parce que moi je suis le candidat de l’ouverture. Je suis un rassembleur. J’invite toutes les bonnes volontés et forces vives du pays à s’unir autour du projet de redressement de Madagascar.
Afrik.com : Y compris les partisans de Marc Ravalomanana ?
Afrik.com : Y compris les partisans de Marc Ravalomanana ?
Hery Rajaonarimampianina : Oui bien sûr ! Même les partisans de Marc Ravalomanana qui veulent bien se joindre à ce projet sont les bienvenus. D’ailleurs, une grande partie de ses partisans m’ont rejoint et me soutiennent.
Afrik.com : Comment avez-vous réagi aux propos d’Andry Rajoelina qui a indiqué au journal Le Monde qu’il est sûr que vous serez le vainqueur de la Présidentielle ?
Hery Rajaonarimampianina : Comme tout le monde, il a dit ce qu’il pensait. Mais de toute façon, seul le verdict des urnes tranchera, car c’est le peuple qui choisira son futur Président. Mais tout montre que je vais gagner.
Afrik.com : Si vous êtes élu Président, qui dirigera réellement Madagascar ? Andry Rajeolina ou vous ?
Hery Rajaonarimampianina : (Il rit de nouveau) Il n’y a qu’un seul fauteuil. C’est donc moi qui serai le Président et dirigerai Madagascar.