Qui ne risque rien n'est rien… sur le chemin de Damas, alors que les opinions ont cédé face aux faits…
on ne le dit assez : un âge n'en chasse pas un autre, tous les âges qu'on a vécu coexistent à l’intérieur de soi, ils s'empilent, et l'un prend le dessus au hasard des circonstances.

dimanche 9 octobre 2022

Carl Brochu reçoit Yves Bataille et Erwan Castel…

 

Brochu en direct… Ce dimanche 9 octobre Carl Brochu reçoit Yves Bataille et Erwan Castel… C’est long, un dimanche matin on prend son temps… mais un entretien riche, on ne s’ennuie jamais…

À l’occasion, avec la personne d’Erwan Castel on peut apprécier l’excellence de la formation des officiers du renseignement militaire en France, malheureusement pour quels résultats quant aux intérêts de la nation ?





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Brent Shawzin Hoberman, l'Anglais qui met en scène Zelensky

World Economic Forum : Brent Hoberman

L’ « Hologramme » de Zelensky, le président de l’Ukraine, s’est invité dans plusieurs salons de la tech





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Donbass ! Le jour où le cœur de l'Europe s'est mis à battre

Alain de Benoist : « L'eurasisme de Douguine est incompatible avec le nationalisme »

Entretien avec Erwan Castel, soldat volontaire servant au Donbass depuis février 2015… [23 mars 2022]

Erwan Castel, un entretien depuis le Donbass à la veille d'évènements planétaires majeurs…

Erwan Castel - Pierre Plas, un binome au service de la vérité… [30 septembre 2022] 

Commandant Arsen Pavlov, "Motorola", héros de la République Populaire de Donetsk [17 octobre 2016]

La situation dans le Donbass dans le contexte des processus géopolitiques contemporains [18 septembre 2016]


Laurence Guillon : Chroniques de Pereslavl

Le Courrier des Statèges : Guerre d’Ukraine – jours 207-214 – La Russie est à un coup de mettre “échec et mat” les États-Unis en Ukraine !


vendredi 30 septembre 2022

Erwan Castel - Pierre Plas, un binome au service de la vérité…



 Il y a quelques jours avait lieu un premier entretien entre Erwan Castel et Carl Brochu au sujet du conflit russo-ukrainien… Une semaine après, le 24 septembre, Erwan Castel était invité à une deuxième rencontre transatlantique avec les amis québécois de RadioInfioCité, cette fois en compagnie de son vieux frère d'armes le capitaine Pierre Plas…

Une rencontre improvisée autour du volcan ukrainien où beaucoup de sujets brûlants furent abordés au service de la vérité, et tant d'autres mis de côté alors que les médias occidentaux, à limage jadis d'un certain Julius Streicher, ne s'appliquent plus qu'à servir la guerre…

Encore un grand merci à toute l'équipe de RadioInfoCité pour cette collaboration fraternelle !… dans l'attente d'un troisième échange ?…

[Formé à l'École interarmées du renseignement et des études linguistiques (EIREL), le capitaine Pierre Plas était officier de renseignement. Parlant six langues, il a d’abord servi dans les Troupes Aéroportées et en Unité de Recherche Humaine, avant de rejoindre la Direction du Renseignement Militaire. Bien que n’ayant pas démérité, il a quitté l’armée prématurément, avec une maigre pension d’invalidité, après 21 ans de service, deux années d’hôpital et six interventions chirurgicales. Abusé par le système, il a voulu savoir pourquoi on risquait la vie de ses soldats… il se consacre désormais à nous l’exposer.]


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Donbass ! Le jour où le cœur de l'Europe s'est mis à battre

Alain de Benoist : « L'eurasisme de Douguine est incompatible avec le nationalisme »

Entretien avec Erwan Castel, soldat volontaire servant au Donbass depuis février 2015… [23 mars 2022]

Erwan Castel, un entretien depuis le Donbass à la veille d'évènements planétaires majeurs…

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La situation dans le Donbass dans le contexte des processus géopolitiques contemporains [18 septembre 2016]


Laurence Guillon : Chroniques de Pereslavl

Le Courrier des Statèges : Guerre d’Ukraine – jours 207-214 – La Russie est à un coup de mettre “échec et mat” les États-Unis en Ukraine !


mardi 27 septembre 2022

François Asselineau : Les conséquences viendront…


"Les conséquences viendront…"
Une nécessaire mise au point, à ma connaissance sans doute la plus lucide et la plus brillante proposée à ce jour d'un point de vue strictement français… (enregistrée vers le 21 septembre)



samedi 24 septembre 2022

Erwan Castel, un entretien depuis le Donbass à la veille d'évènements planétaires majeurs…


Vers la mi-septembre et avant les choix du Président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine, annoncés le 21 septembre, Erwan Castel était l'invité ''virtuel'' de Carl Brochu en terre du Québec… Partage de son point de vue sur la situation entre Russie et Ukraine dont la tectonique dans ses dimensions géopolitique, économique et militaire menace aujourd'hui l'ensemble de notre Planète.

 Un premier entretien d'Erwan Castel accordé à Carl Brochu pour le site d'information québécois "RadioInfoCité"…  Cette belle rencontre a pu se réaliser grâce au concours du capitaine Pierre L. Plas, frère d'armes d'Erwan Castel.  Que cette émission ouvre une collaboration fraternelle au service de l'information réelle avec Carl, Jean Marc et toute l'équipe de "RadioInfoCité"…

 Que soit pardonnée la médiocre qualité de l'image depuis le Donbass… "plus importantes sont les idées et non celui qui les porte" se désole Erwan Castel… Quant à nous nous seront désolés que nos amis canadiens ne se soient appliqués à écrire correctement le nom du Donbass, d'abord par égard envers leur hôte…


Analyse du conflit en Ukraine et une réflexion sur le grand basculement du monde avec Erwan Castel en direct du Donbass sur la première ligne - l'entrevue complète. Des extraits sont accessibles sur le site de RadioInfoCité…


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Donbass ! Le jour où le cœur de l'Europe s'est mis à battre

Alain de Benoist : « L'eurasisme de Douguine est incompatible avec le nationalisme »

Entretien avec Erwan Castel, soldat volontaire servant au Donbass depuis février 2015… [23 mars 2022]

Commandant Arsen Pavlov, "Motorola", héros de la République Populaire de Donetsk [17 octobre 2016]

La situation dans le Donbass dans le contexte des processus géopolitiques contemporains [18 septembre 2016]


Laurence Guillon : Chroniques de Pereslavl

Le Courrier des Statèges : Guerre d’Ukraine – jours 207-214 – La Russie est à un coup de mettre “échec et mat” les États-Unis en Ukraine !



домой !… - À la maison !…





mercredi 21 septembre 2022

Alain de Benoist : « L'eurasisme de Douguine est incompatible avec le nationalisme »



Un entretien avec Alain de Benoist… Des idées claires … Idées claires sur la philosophie d’Alexandre Douguine, sa vision géopolitique… Un monde dans lequel à la rigidité de l'idée de Nation, d'État et a fortiori d'État mondial se substituera l'idée impériale  de « Creusets de civilisation »… Des idées claires sur le conflit dans lequel nous sommes engagés, dont le foyer le plus sensible se déroule aujourd’hui en Ukraine… En réalité un conflit mondial aux multiples abcès : Afghanistan… Yémen… Iraq… Venezuela… Mali… Libye… Donbass… Syrie… … …

Alain de Benoist : « L'eurasisme de Douguine est incompatible avec le nationalisme »





Les médias français s’intéressent depuis quelques jours à Alexandre Douguine, idéologue réputé proche de Vladimir Poutine. Après une étude critique de Pierre-André Taguieff, Maxime Le Nagard, rédacteur en chef-adjoint de Front Populaire, s'entretient avec Alain de Benoist, qui a côtoyé Alexandre Douguine.

Maxime Le Nagard : Vous avez déjà rencontré Alexandre Douguine. Pouvez-vous nous expliquer qui il est, notamment sur le plan intellectuel ? Quelles sont ses idées, ses influences philosophiques et politiques, etc. ?

Alain de Benoist : Alexandre Douguine, que je connais depuis plus de trente ans, est un théoricien de l’eurasisme. Ce courant de pensée est apparu dans les années 1920, tant dans les milieux de l’émigration russe (les « Russes blancs ») que dans la jeune Union soviétique, dans le cadre de la querelle des Slavophiles et des Occidentalistes (Zapadniki) qui divisait déjà les élites russes dans les années 1840.

Les Occidentalistes considéraient la Russie moderne comme issue d’une « occidentalisation » de la société russe entamée au XVIIIe siècle à l’initiative de Pierre le Grand, tandis que pour les Slavophiles, comme Alexis Khomiakov, Constantin Aksakov ou Ivan Kirevsky (sur le plan littéraire, il faut aussi bien sûr citer Dostoïevski), la « vraie » Russie était celle d’avant les réformes pétroviennes, la Russie du patriarcat de Moscou organisée sur le modèle de l’unité conciliaire de l’Église orthodoxe, et se devait donc de combattre les influences délétères de l’Europe occidentale (rationalisme, individualisme, obsession du progrès technique), considérées comme portant atteinte à la personnalité du peuple russe.

Les eurasistes, parmi lesquels figurent alors des personnalités comme les linguistes Nikolaï Troubetskoï, auteur de L’Europe et l’humanité (l’« Europe » correspondant à l’Occident), et Roman Jakobson, l’économiste Piotr N. Savitsky, le juriste et politologue Nicolas N. Alexeiev, l’historien et géopoliticien George V. Vernadsky, et bien d’autres, estiment comme les Slavophiles que la Russie et l’Occident constituent des mondes totalement différents, mais ajoutent à cette idée des éléments nouveaux. Selon eux, l’identité russe se fonde sur la superposition, à partir d’un substrat slavo-finno-touranien, d’une culture « kiévienne », née au contact des Varègues et fortement marquée par le christianisme byzantin, et d’une culture « moscovite » largement héritée, notamment quant aux formes du pouvoir, de l’empire tataro-mongole qui domina la Russie pendant trois siècles. Spirituellement, la Russie est byzantine, donc « orientale » (c’est le thème de la « troisième Rome »). Enfin, pour les eurasistes, la Russie n’est ni un « pays » ni une nation, mais une civilisation distincte de forme nécessairement impériale.

Alexandre Douguine, né en 1962, appartient à la seconde génération eurasiste. Son apport principal à cette école de pensée tient à l’importance qu’il attache à la géopolitique, qu’il a longtemps enseignée à l’Université Lomonossov de Moscou (Fondamentaux de géopolitique, 1997), de pair avec un attachement viscéral à la mystique orthodoxe (il appartient lui-même au courant starovère ou « vieux-croyant » de l’Église orthodoxe, né du refus des réformes introduites au XVIIe siècle par le patriarche Nikon), selon laquelle la religiosité doit se fonder sur la foi, et non sur la raison.

Le géopoliticien anglais Halford Mackinder, mort en 1947, avait développé l’idée (reprise par bien d’autres après lui, à commencer par Carl Schmitt), d’une opposition fondamentale entre les puissances maritimes et les puissances terrestres, les premières ayant été successivement représentées par l’Angleterre et les États-Unis, les seconds par le grand continent eurasiatique, dont le « cœur », le Heartland, correspond à l’Allemagne et à la Russie. Qui parvient à contrôler le Heartland, estimait Mackinder, contrôle le monde. C’est avec cette conviction présente à l’esprit que Zbigniew Brzezinski, dans Le Grand Echiquier (1997), a pu écrire que « l’Amérique doit absolument s’emparer de l’Ukraine, parce que l’Ukraine est le pivot de la puissance russe en Europe. Une fois l’Ukraine séparée de la Russie, la Russie ne sera plus une menace ».

On comprend mieux par là les positions politiques d’Alexandre Douguine, qui ne voit pas seulement dans l’affrontement de l’Ukraine et de la Russie une « guerre fratricide », mais aussi une projection militaire d’une guerre idéologique débordant largement les frontières, une guerre mondiale entre les démocraties libérales, aujourd’hui en crise, considérées comme ordonnées à l’idée d’État universel et porteuses de décadence, et les démocraties illibérales ordonnées à l’idée de continuité historique des peuples désireux de maintenir leur sociabilité propre et leur souveraineté.

Mais pour répondre complètement à votre question, il faudrait aussi parler des nombreux auteurs qui ont influencé Douguine. Celui-ci, qui parle couramment une bonne douzaine de langues (qu’il a apprises seul), s’est très tôt familiarisé avec des auteurs aussi différents que l’historien et géographe Lev Gumilev, fils de la poétesse Anna Akhmatova, théoricien du « lieu-développement » (mestorazvitiye), Arthur Moeller van den Bruck, le « jeune-conservateur » allemand partisan de l’« orientation à l’Est », Vico, Danilevski, Mircea Eliade, René Guénon, Jean Baudrillard, Marcel Mauss, Gilbert Durand, Claude Lévi-Strauss, Louis Dumont, Friedrich List, Heidegger, etc. Mais cela déborde le cadre de notre entretien !

Maxime Le Nagard : Dans votre ouvrage Contre l’esprit du temps, vous écrivez avoir de la sympathie pour son idée d’une « quatrième théorie politique ». Qu’est donc cette théorie et en quoi la trouvez-vous intéressante ?

Alain de Benoist : Trois grandes doctrines politiques concurrentes ont été successivement engendrées par la modernité : le libéralisme au XVIIIe siècle, le socialisme au XIXe siècle, le fascisme au XXe siècle. Dans le livre qu’il a consacré à ce sujet, Douguine développe l’idée qu’il est nécessaire de faire apparaître une « quatrième théorie politique » qui dresserait un bilan de celles qui l’ont précédée, sans pour autant s’identifier à aucune d’elles. C’est une proposition stimulante pour l’esprit.

Aux yeux de Douguine, le XXIe siècle sera aussi celui du quatrième Nomos de la Terre (l’ordre général des relations de pouvoir à l’échelle internationale). Le premier Nomos, celui des peuples vivant relativement à l’écart les uns des autres, a pris fin avec la découverte du Nouveau Monde. Le deuxième Nomos, représenté par l’ordre eurocentrique des États modernes (l’ordre westphalien), s’est achevé avec la Première Guerre mondiale. Le troisième Nomos fut celui qui a régné à partir de 1945, avec le système de Yalta et le condominium américano-soviétique. Que sera le quatrième Nomos ? Pour Douguine, soit il prendra la forme d’un monde unipolaire américanocentré, soit au contraire celle d’un monde multipolaire où les « États civilisationnels » et les grands espaces continentaux, à la fois puissances autonomes et creusets de civilisation, joueraient un rôle régulateur vis-à-vis de la mondialisation, préservant ainsi la diversité des modes de vie et des cultures.

Douguine estime encore que nous sommes entrés dans une quatrième guerre mondiale. La Première Guerre mondiale (1914-18), avait abouti au démantèlement des empires austro-hongrois et ottoman. Les deux grands vainqueurs de la Deuxième Guerre mondiale (1939-45) ont été les États-Unis d’Amérique et la Russie stalinienne. La troisième guerre mondiale correspond à la guerre froide (1945-89). Elle s’est terminée avec la chute du Mur de Berlin et la désintégration du système soviétique, principalement au profit de Washington. La quatrième guerre mondiale a commencé en 1991. C’est la guerre des États-Unis contre le reste du monde, guerre multiforme, aussi bien militaire qu’économique, financière, technologique et culturelle, indissociable de l’arraisonnement général du monde par l’illimitation dissolvante de la logique du capital.



Maxime Le Nagard : « Extrême droite », « rouge-brun », « antimoderne », « ultra-nationaliste », « traditionaliste », « néofasciste », sont autant de termes qui servent à qualifier ou renvoient à Douguine. Ces qualificatifs sont-ils pertinents ?

Alain de Benoist : Quand les journalistes, dont la culture en matière de philosophie politique et d’histoire des idées est à peu près nulle, sont confrontés à un phénomène auquel ils ne comprennent rien, ils ânonnent la vulgate dominante et récitent des mantras. L’« extrême droite », mot-caoutchouc, est le couteau suisse préféré de ces esprits paresseux. Tous ces qualificatifs, à la possible exception de « traditionaliste antimoderne », mais à condition d’entendre le terme au sens de Guénon, sont tout simplement ridicules. Ils n’apprennent rien au sujet d’Alexandre Douguine, mais en disent beaucoup sur ceux qui les emploient. Le plus grotesque est sans doute le qualificatif de « nationaliste » ou d’« ultra-nationaliste », que la plupart des commentateurs utilisent en permanence à son propos. Douguine, je le répète, est un eurasiste. Or, l’eurasisme est incompatible avec le nationalisme, puisqu’il se réclame de l’idée d’Empire, c’est-à-dire d’un refus de principe de la logique du nationalisme ethnique et de l’État-nation (ce qui explique d’ailleurs les liens étroits qu’entretient Douguine avec les représentants des communautés juives et turco-musulmanes).



Maxime Le Nagard : Depuis quelques jours, Alexandre Douguine est beaucoup présenté dans les médias comme le « cerveau » de Poutine en politique étrangère, comme une sorte de Raspoutine un peu mystérieux. Quel est son niveau d’influence auprès de Poutine ? Est-il écouté par la société civile russe ?

Alain de Benoist : Le « cerveau » de Poutine ! Quand on sait que Douguine et Poutine ne se sont jamais rencontrés une seule fois en tête-à-tête, on mesure le sérieux de ceux qui emploient cette expression. La réalité est plus prosaïque. Alexandre Douguine, qui a été traduit dans dix ou douze langues différentes, est un auteur connu et lu, tant en Russie qu’à l’étranger. Il a ses réseaux et son influence. Lorsqu’en avril 1992, j’avais eu l’occasion de donner une conférence de presse au siège de la Pravda à Moscou et de parler de géopolitique avec des généraux et officiers supérieurs de l’armée, j’avais déjà pu me rendre compte de l’écho que recevaient dans l’opinion les idées eurasistes. Depuis, Douguine a lancé en 2003 le Mouvement eurasiste international, qui s’est beaucoup développé dans les populations non russes de Russie, et il a même été reçu à Washington par Zbigniew Brezinski et Francis Fukuyama.

Douguine connaît incontestablement bien l’entourage de Poutine, mais il n’a jamais fait partie de ses intimes ni de ses « conseillers spéciaux ». Il est certes reconnaissant à Poutine d’avoir rompu avec l’atlantisme libéral de Boris Eltsine, mais il pense qu’il n’est qu’un « eurasiste malgré lui ». Le livre qu’il a écrit il y a quelques années sur Poutine est d’ailleurs loin d’être un exercice d’admiration : Douguine y explique au contraire à la fois ce qu’il approuve chez Poutine et ce qui lui déplaît. Mais de toute évidence ceux qui pérorent en France à son sujet n’ont jamais lu une ligne de lui.



Maxime Le Nagard : Vous connaissez bien Alexandre Douguine et son œuvre. Vous avez par ailleurs récemment publié un ouvrage critique sur les médias intitulé Survivre à la désinformation (2021). Comment jugez-vous globalement son traitement médiatique et celui du conflit russo-ukrainien ?

Alain de Benoist : Le traitement médiatique est celui que vous connaissez. Les grands médias français sont tellement habitués à se faire les relais de l’idéologie dominante, ils trouvent tellement normal qu’il n’y ait plus dans ce pays de débats dignes de ce nom, qu’il leur apparaît tout aussi naturel de ne jamais donner la parole à ceux dont ils ignorent ou caricaturent les idées. C’est vrai dans le cas de Douguine comme dans celui de la guerre en Ukraine : le point de vue ukrainien est omniprésent, le point de vue russe n’est même pas mentionné. On crée ainsi un formidable refoulé. Il faut toujours se méfier du refoulé.


Propos recueillis par Maxime Le Nagard
Auteur
Alain de Benoist
Essayiste



Article source publié le 30 août 2022 par Maxime Le Nagard, rédacteur en chef-adjoint de Front Populaire.

Denis Frenkel : Alexandre Douguine, l’icône du nouveau traditionalisme impérial russe (1)

Denis Frenkel : Alexandre Douguine, l’icône du nouveau traditionalisme impérial russe (2)




*   *   *
Alain de Benoist participait au voyage en Syrie organisé par la Communauté syrienne de France en avril 2018…  Écoutons sa voix, en fin de séjour, au micro de la journaliste syrienne, Fatiha Merabet, venue nous rejoindre au Beit Zaman, Alain de Benoist témoigne de notre liberté d'information tout au long de cette semaine passée en Syrie, riche de contacts en toute franchise avec des interlocuteurs les plus divers… Constat du courage et de la fermeté du peuple syrien uni contre une agression terroriste que de l'étranger l'on voudrait mensongèrement qualifier de guerre civile… Tristesse face aux décisions malheureuses prises en l'absence de toute consultation de la représentation nationale par un président français agissant seul… décisions prises dans l'ignorance des intérêts géostratégiques communs de la France et de la Syrie… Contradictions ou duplicité ?… Nécessité que les Français soient mieux informés… l'un des objectifs de ce voyage.



« En théorie la France lutte contre le terrorisme mais dans les faits elle agresse ceux qui luttent également
- et plus efficacement qu'elle d'ailleurs - contre le terrorisme. »



*     *  *

Евразийский союз молодёжи


Alexandre Douguine : Le retour au monde multipolaire [Un entretien à restituer dans son contexte, aux USA présidence de Donald Trump, en France primature de Vals… Outre la vidéo de cet conférence, ce site renvoie vers de nombreux liens d'entretiens et de conférences de théoriciens eurasiens dont Alain de Benoist.]

Brève explication de la théorie eurasienne en 4 cartes

Du monde unipolaire américano-centrique au monde multipolaire (4 poles)



Le modèle du monde unipolaire :
- Le noyau et les couches (2-3)
- La Russie-Eurasie conçue comme un 'trou noir'

La contre-stratégie
L'activité géopolitique eurasienne de construction d'un monde multipolaire


La structure du monde multipolaire :
La vision eurasienne du futur


Hier, sur fond d'annonce de l'organisation des référendums ces jours-ci concernant l'entrée dans la Fédération de Russie non seulement des républiques indépendantes de Donetsk et Lougansk, mais également des régions de Kherson et de Zaporojié, contrôlées par la Russie, une adresse de Poutine à la Nation a également été annoncée. Elle a eu lieu ce matin et change radicalement le visage de ce conflit. Dans tous les cas, l'Opération militaire spéciale prend fin, la Russie prend sérieusement en charge la défense de son intégrité territoriale sur un front de près de 1 000 km. La mobilisation partielle est annoncée. L'histoire reprend son cours.
Ce matin, à 9 heures, Poutine s'est adressé à la Nation, pour annoncer les pas qu'il estime absolument nécessaire pour protéger la souveraineté, la sécurité nationale et l'intégrité territoriale de la Russie, face à la politique agressive menée par les élites atlantistes.

Erwan Castel, 21 septembre 2022 : "Nous rentrons à la maison !"

МЫ ВОЗВРАЩАЕМСЯ ДОМОЙ
"Nous rentrons à la maison !
Nous avons défendu ce droit !
Le dernier à se battre
Nous rentrons à la maison !"

Мы возвращаемся домой
Но путь наш долог
Опять над чьей-то головой
Свистит осколок
И пуля снайпера опять
Найдёт кого-то
И нам придётся отвечать
Опять...

Уж столько лет идут бои,
Но с нами братья !
Ты нам Россия распахни
Свои обьятья !
Пора вернуться нам домой,
Откройте двери !
Ведь мы же всей своей душой
В Россию верим !

ПРИПЕВ :
Мы возвращаемся домой !
Мы это право отстояли !
Последний принимая бой
Мы возвращаемся домой !

Хотим мы жить одной семьёй,
Как раньше было
Чтоб Ангел прикрывал собой
Нас белокрылый
И чтобы встала за спиной
Вся Русь Святая
И повела нас за собой
Страна родная !

*    *    *


L'Exil intérieur : un florilège des pensées et aphorismes de l'auteur,
sélectionné par Alain de Benoist lui-même.

« Il y a des idées qui surgissent brusquement, on ne sait d’où ni comment, qu’on trouve intéressantes mais qui ne restent dans la tête que quelques instants. Comme un papillon qui s’envole. Pour les retenir, il faut les attraper au vol, et les transcrire immédiatement. Mes carnets, au fond, sont aussi ceux d’un chasseur de papillons. » Tantôt lumineuses, tantôt graves, le lecteur trouvera au fil de ces pages autant de ces idées « sans tige, qui voltigent » à la façon des papillons de Nerval. Des réflexions, des pensées, des aphorismes, des citations choisies, révélant une nature portée à la beauté et à l’exil. Alain de Benoist y cultive, comme l’Argonaute, un esprit d’aventure dans l’intelligence, avec cette sagacité qui est le ferment des grands livres (éditions Krisis, septembre 2022).

Alain de Benoist, essayiste et philosophe, dirige les revues Krisis et Nouvelle école. Auteur d’une centaine d’ouvrages, il a récemment publié L’homme qui n’avait pas de père : le dossier Jésus (éditions Krisis, février 2021) et Contre l’esprit du temps. Explications (La Nouvelle Librairie, février 2022).






mardi 20 septembre 2022

Louis-Ferdinand Céline… À l'agité du bocal

 

Ce texte constitue la réponse que Céline fait à Jean-Paul Sartre qui publia un article intitulé « Portrait d'un antisémite » en décembre 1945 dans la revue Les Temps modernes où il déclare « Si Céline a pu soutenir les thèses socialistes des nazis c'est qu'il était payé. »

C'est à la suite de la communication qu'Albert Paraz lui fait de l'article de Sartre en octobre 1947 qu'il écrit ce texte virulent en guise de réponse à Sartre. C'est le premier texte de Céline à avoir été publié après que l'écrivain a quitté la France en juin 1944.

Dans cette missive, Céline nomme Jean-Paul Sartre : Jean-Baptiste Sartre (J.-B. S.) ; et le compare à un ténia qui aurait parasité son propre corps.

Ce texte a été écrit depuis le Danemark, en novembre 1947, après que Céline fut remis en liberté en juin. Il avait été incarcéré pendant 18 mois à Copenhague où il avait trouvé refuge après sa fuite en Allemagne.

Il envoya ce texte à Jean Paulhan qui refusa de le publier début janvier 1948 ;- et envoya simultanément un double à son ami Albert Paraz qui le publia dans son livre « Le Gala des vaches » (il en constitue les dernières pages 283-286, et en plaquette chez le jeune typographe Pierre Lanauve de Tartas, qui réalise ainsi sa première publication. [Céline, Lettres à Albert Paraz, Gallimard 2009, page 99 note 1]. 
Une édition en fut tirée en 1948 par ses amis (P. Lanauve de Tartas, Paris, s.d.). Un tapuscrit avec une note manuscrite de Céline se trouve dans le fonds Milton Hindus à l'université d'Austin au Texas (Humanities Research Center).


À l'agité du bocal


Dessin de Michel Lhomme pour « À L’agité du bocal »
Édition à 500 exemplaires par Aux dépens d’un Amateur, Genève 1978.


Je ne lis pas grand-chose, je n'ai pas le temps. Trop d'années perdues déjà en tant de bêtises et de prison ! Mais on me presse, adjure, tarabuste. Il faut que je lise absolument, paraît-il, une sorte d'article, le Portrait d'un Antisémite, par Jean-Baptiste Sartre (Temps modernes, décembre 1945). Je parcours ce long devoir, jette un œil, ce n'est ni bon ni mauvais, ce n'est rien du tout, pastiche… une façon de "Lamanièredeux"… Ce petit J.-B. S. a lu l'Étourdi, l'Amateur de Tulipes, etc. Il s'y est pris, évidemment, il n'en sort plus… Toujours au lycée, ce J.-B. S. ! toujours aux pastiches, aux "Lamanièredeux"… La manière de Céline aussi… et puis de bien d'autres… "Putains", etc. "Têtes de rechange"… "Maia"… Rien de grave, bien sûr. J'en traîne un certain nombre au cul de ces petits "Lamanièredeux"… Qu'y puis- je ? Étouffants, haineux, foireux, bien traîtres, demi-sangsues, demi-ténias, ils ne me font point d'honneur, je n'en parle jamais, c'est tout. Progéniture de l'ombre. Décence ! Oh ! je ne veux aucun mal au petit J.-B. S. ! Son sort où il est placé est bien assez cruel ! Puisqu'il s'agit d'un devoir, je lui aurais donné volontiers sept sur vingt et n'en parlerais plus… Mais page 462, la petite fiente, il m'interloque ! Ah ! le damné pourri croupion ! Qu'ose-t-il écrire ? "Si Céline a pu soutenir les thèses socialistes des nazis c'est qu'il était payé." Textuel. Holà ! Voici donc ce qu'écrivait ce petit bousier pendant que j'étais en prison en plein péril qu'on me pende. Satanée petite saloperie gavée de merde, tu me sors de l'entre-fesse pour me salir au dehors ! Anus Caïn pfoui. Que cherches-tu ? Qu'on m'assassine ! C'est l'évidence ! Ici ! Que je t'écrabouille ! Oui !… Je le vois en photo, ces gros yeux… ce crochet… cette ventouse baveuse… c'est un cestode ! Que n'inventerait-il, le monstre, pour qu'on m'assassine ! À peine sorti de mon caca, le voici qui me dénonce ! Le plus fort est que page 451 il a le fiel de nous prévenir : "Un homme qui trouve naturel de dénoncer des hommes ne peut avoir notre conception de l'honneur, même ceux dont il se fait le bienfaiteur, il ne les voit pas avec nos yeux, sa générosité, sa douceur, ne sont pas semblables à notre douceur, à notre générosité, on ne peut pas localiser la passion."

Dans mon cul où il se trouve, on ne peut pas demander à J.-B. S. d'y voir bien clair, ni de s'exprimer nettement, J.-B. S. a semble-t-il cependant prévu le cas de la solitude et de l'obscurité dans mon anus… J.-B. S. parle évidemment de lui-même lorsqu'il écrit page 451 : "Cet homme redoute toute espèce de solitude, celle du génie comme celle de l'assassin." Comprenons ce que parler veut dire… Sur la foi des hebdomadaires J.-B. S. ne se voit plus que dans la peau du génie. Pour ma part et sur la foi de ses propres textes, je suis bien forcé de ne plus voir J.-B. S. que dans la peau d'un assassin, et encore mieux, d'un foutu donneur, maudit, hideux, chiant pourvoyeur, bourrique à lunettes. Voici que je m'emballe ! Ce n'est pas de mon âge, ni de mon état… J'allais clore là… dégoûté, c'est tout… Je réfléchis… Assassin et génial ? Cela s'est vu… Après tout… C'est peut-être le cas de Sartre ? Assassin il est, il voudrait l'être, c'est entendu mais, génial ? Petite crotte à mon cul génial ? hum ?… c'est à voir… oui certes, cela peut éclore… se déclarer… mais J.-B. S. ? Ces yeux d'embryonnaire ? ces mesquines épaules ?… ce gros petit bidon ? Ténia bien sûr, ténia d'homme, situé où vous savez… et philosophe !… c'est bien des choses… Il a délivré, parait-il, Paris à bicyclette. Il a fait joujou… au Théâtre, à la Ville, avec les horreurs de l'époque, la guerre, les supplices, les fers, le feu. Mais les temps évoluent, et le voici qui croît, gonfle énormément, J.-B. S. ! Il ne se possède plus... il ne se connaît plus... d'embryon qu'il est il tend à passer créature... le cycle... il en a assez du joujou, des tricheries… il court après les épreuves, les vraies épreuves… la prison, l'expiation, le bâton, et le plus gros de tous les bâtons: le Poteau… le Sort entreprend J.B.-S… les Furies ! finies les bagatelles… Il veut passer tout à fait monstre ! Il engueule de Gaulle du coup !

Quel moyen ! Il veut commettre l'irréparable ! Il y tient ! Les sorcières vont le rendre fou, il est venu les taquiner, elles ne le lâcheront plus… Ténia des étrons, faux têtard, tu vas bouffer la Mandragore ! Tu passeras succube ! La maladie d'être maudit évolue chez Sartre… Vieille maladie, vieille comme le monde, dont toute la littérature est pourrie… Attendez J.-B. S. avant que de commettre les gaffes suprêmes !… Tâtez-vous ! Réfléchissez que l'horreur n'est rien sans le Songe et sans la Musique… Je vous vois bien ténia, certes, mais pas cobra, pas cobra du tout… nul à la flûte ! Macbeth n'est que du Grand-Guignol, et des mauvais jours, sans musique, sans rêve… Vous êtes méchant, sale, ingrat, haineux, bourrique, ce n'est pas tout J.-B. S. ! Cela ne suffit pas… Il faut danser encore !… Je veux bien me tromper bien sûr… Je ne demande pas mieux… J'irai vous applaudir lorsque vous serez enfin devenu un vrai monstre, que vous aurez payé, aux sorcières, ce qu'il faut, leur prix, pour qu'elles vous transmutent, éclosent, en vrai phénomène. En ténia qui joue de la flûte.

M'avez-vous assez prié et fait prier par Dullin, par Denoël, supplié "sous la botte" de bien vouloir descendre vous applaudir ! Je ne vous trouvais ni dansant, ni flûtant, vice terrible à mon sens, je l'avoue… Mais oublions tout ceci ! Ne pensons plus qu'à l'avenir ! Tâchez que vos démons vous inculquent la flûte ! Flûte d'abord ! Retardez Shakespeare, lycéen ! 3/4 de flûte, 1/4 de sang… 1/4 suffit je vous assure… mais du vôtre d'abord ! avant tous les autres sangs. L'Alchimie a ses lois… le "sang des autres" ne plaît point aux Muses… Réfléchissons… Vous avez emporté tout de même votre petit succès au "Sarah", sous la Botte, avec vos Mouches… Que ne troussez-vous maintenant trois petits actes, en vitesse, de circonstance, sur le pouce, Les Mouchards ? Revuette rétrospective… L'on vous y verrait en personne, avec vos petits potes, en train d'envoyer vos confrères détestés, dits "Collaborateurs" au bagne, au poteau, en exil... Serait-ce assez cocasse ? Vous-même, bien entendu, fort de votre texte au tout premier rôle… en ténia persifleur et philosophe… Il est facile d'imaginer cent coups de théâtre, péripéties et rebondissements des plus farces dans le cours d'une féerie de ce genre… et puis au tableau final un de ces "Massacre Général" qui secouera toute l'Europe de folle rigolade ! (Il est temps !) Le plus joyeux de la décade ! Qu'ils en pisseront, foireront encore à la 500e !… et bien au-delà ! (L'au-delà ! Hi ! Hi !) L'assassinat des "Signataires", les uns par les autres !… vous-même par Cassou… cestuy par Eluard ! l'autre par sa femme et Mauriac ! et ainsi de suite jusqu'au dernier !… Vous vous rendez compte ! L'Hécatombe d'Apothéose ! Sans oublier la chair, bien sûr !… Grand défilé de filles superbes, nues, absolument dandinantes… orchestre du Grand Tabarin… Jazz des "Constructeurs du Mur"... "Atlantist Boys"... concours assuré... et la grande partouze des fantômes en surimpression lumineuse... 200.000 assassinés, forçats, choléras, indignes... et tondues ! à la farandole ! du parterre du Ciel ! Chœur des "Pendeurs de Nuremberg"... Et dans le ton vous concevez plus-qu'existence, instantaniste, massacriste... Ambiance par hoquets d'agonie, bruits de coliques, sanglots, ferrailles... "Au secours !"... Fond sonore: "Machines à Hurrahs !"… Vous voyez ça ? Et puis pour le clou, à l'entr'acte : Enchères de menottes ! et Buvette au sang. Le Bar futuriste absolu. Rien que du vrai sang ! au bock, cru, certifié des hôpitaux… du matin même ! sang d'aorte, sang de fœtus, sang d'hymen, sang de fusillés !… Tous les goûts ! Ah ! quel avenir J.-B. S. ! Que vous en ferez des merveilles quand vous serez éclos Vrai Monstre ! Je vous vois déjà hors de fiente, jouant déjà presque de la flûte, de la vraie petite flûte ! à ravir !… déjà presque un vrai petit artiste !

Sacré J.-B. S.

L.-F. Céline











lundi 12 septembre 2022

… je ne pouvais accrocher le plus petit bout de sommeil…

 



« C’est triste des gens qui se couchent, on voit bien qu’ils se foutent que les choses aillent comme elles veulent, on voit bien qu’ils ne cherchent pas à comprendre eux, le pourquoi qu’on est là. Ça leur est bien égal. Ils dorment n’importe comment, c’est des gonflés, des huîtres, des pas susceptibles, Américains ou non. Ils ont toujours la conscience tranquille. J’en avais trop vu moi des choses pas claires pour être content. J’en savais de trop et j’en savais pas assez. Faut sortir, que je me dis, sortir encore. Peut-être que tu le rencontreras Robinson. C’était une idée idiote évidemment mais que je me donnais pour avoir un prétexte à sortir à nouveau, d’autant plus que j’avais beau me retourner et me retourner encore sur le petit plumard je ne pouvais accrocher le plus petit bout de sommeil. Même à se masturber dans ces cas-là on n’éprouve ni réconfort, ni distraction. Alors c’est le vrai désespoir. »

Louis-Ferdinand Céline
Voyage au bout de la nuit (1932)



dimanche 11 septembre 2022

Se presser le ciboulot, s'en faire sortir ses chères pensées ! Quelle vanité ! Quelle stupidité !

 

Louis-Ferdinand Céline et Toto à Meudon,
reportage de François Pagès pour Paris-Match, 1957


Tu sais j'écris comme un médium fait tourner les tables, avec horreur et dégoût. Je n'aime pas, je n'ai jamais aimé écrire. Je trouve d'abord la posture grotesque ― Ce type accroupi comme sur une chiotte en train de se presser le ciboulot, s'en faire sortir ses chères pensées ! Quelle vanité ! Quelle stupidité ! Ignoble ! Je ne m'en excepte pas !

J'ai écrit pour sortir d'embarras matériel ― rien que le mot écrire me fait vomir ― ce prétentieux vocable : « Il écrit ! » À fesser ! Immonde ! Le malheur a voulu que la nature me refuse un don expérimental, scientifique et me donne ce tour hystérique émotif ― Don ? c'est beaucoup dire ― Poète encore comme Lamartine ou musicien comme Mozart… Mais jaboteur ? confidentieux… pouah !

Shakespeare prétend que nous sommes de la même étoffe que nos rêves. Le mien n'était pas d'écrire des romans ! foutre ! Je le fais comme une bourrique qu'on fouette ! Cela me fait mal à la tête ― m'empêche de dormir ― me fait bourdonner ― bref c'est un sale supplice dégoûtant. Ma vocation était médicale ― mon idéal : Semmelweiss ou même Axel Munthe ― mais Céline ? foutre quel pauvre fatigué raté ! On ne m'en dira jamais autant de mal que j'en pense ― on ne saura jamais le chagrin qu'il m'a fait !
Lettre à Albert Paraz , 11 septembre 1949

Louis-Ferdinand Céline