Qui ne risque rien n'est rien… sur le chemin de Damas, alors que les opinions ont cédé face aux faits…
on ne le dit assez : un âge n'en chasse pas un autre, tous les âges qu'on a vécu coexistent à l’intérieur de soi, ils s'empilent, et l'un prend le dessus au hasard des circonstances.

lundi 22 mai 2023

Général Dominique Delawarde : Retour de Syrie

 


« Boucher de Damas » ?… Nous qui avons fréquenté assidûment la Syrie depuis 2015 c'est avec stupéfaction qu'au matin de ce vendredi 19 mai nous avons entendu l’un des préposés à la propagande sur France 2, Thomas Sotto, oser utiliser et réutiliser cette qualification de « Boucher de Damas », glossant sans vergogne sur le retour de la Syrie et de son président Bachar el-Assad au sein de la Ligue arabe !… 


Retour de Syrie :
Lettre témoignage du général Dominique Delawarde à ses amis
(17 mai 2023)




 
Mes chers amis,

Je me suis rendu en Syrie du 27 avril au 4 mai dernier avec un petit groupe militant contre l’embargo imposé par les USA à ce pays, embargo qui frappe principalement les populations civiles depuis douze ans. Rappelons qu’une partie de ces populations a été durement touchée par un tremblement de terre dans un passé très récent et rappelons aussi que ces sanctions US unilatérales et anti-syriennes viennent tout juste d’être prolongées pour un an par l’administration Biden.

Ayant une confiance très limitée dans nos médias mainstream pour traiter objectivement d’un sujet concernant le Proche-Orient, l’État d’Israël et les États-Unis, je tenais à me rendre compte par moi-même des dommages causées par cette stratégie des sanctions. Celle-ci est utilisée sans modération par les USA et leurs vassaux européens, agissant souvent en mandataires d’Israël, contre tous les États refusant de se soumettre aux volontés et à l’hégémonie de l’Occident global.

Ce type de stratégie consiste en une véritable prise en otage des populations civiles auxquelles on applique la sanction collective dite « de l’embargo » qui va les faire souffrir autant qu’il est possible, pour les punir de s’être choisi un dirigeant qui refuse de servir les intérêts occidentaux, c’est à dire du « camp du bien » auto-proclamé.

Ces sanctions, de nature économique, peuvent être redoutablement efficaces et provoquer indirectement la mort de dizaines, voire de centaines de milliers de civils dans une relative discrétion. Elles peuvent parfois s’avérer plus meurtrières, sur la durée, qu’une guerre ouverte de haute intensité… (souvenons nous des deux croisades « anti-Saddam Hussein » conduites par les USA en Irak, sous des prétextes mensongers).

S’agissant de la Syrie, ces sanctions ont été adoptées à la suite d’une tentative de révolution colorée ratée, organisée en mars 2011 par une « coalition occidentale » (US-UK-FR + UE-OTAN) au profit et à l’instigation d’Israël, avec sa participation active, dans le but de renverser Bachar el-Assad, de faire cesser le soutien syrien à la cause palestinienne, de démembrer le pays, à l’image de l’ex-Yougoslavie, de remodeler les frontières de la Syrie, d’en annexer une partie, de créer un Kurdistan allié d’Israël, pour faire obstacle à l’émergence d’un « croissant chiite » perçu, à tort ou à raison, comme une menace existentielle, et de mettre des dirigeants plus complaisants que Bachar el-Assad aux frontières de l’État hébreu. Rappelons nous les propos sans ambiguïté de Roland Dumas, dix ans ministre des affaires étrangères de François Mitterrand :
Et les propos très clairs du général US Westley Clark, tenus en 2007 :

La première bonne nouvelle pour la Syrie de Bachar el-Assad a été le soutien militaire apporté par la Russie de Poutine en septembre 2015, à la demande du seul gouvernement légal reconnu par l’ONU. Par ce soutien, la Russie a mis en échec les actions malfaisantes inspirées par Israël à ses mandataires-marionnettes anglo-saxons et français, et a fait reculer les terroristes islamistes instrumentalisés, soutenus et armés par les Occidentaux.

Jusqu’au-boutiste dans ses objectifs, Israël poursuit aujourd’hui, en mai 2023, les bombardements réguliers sur le territoire de son voisin syrien, alors que cet État ne l’agresse pas. Ces bombardements se font dans l’indifférence totale de l’ONU, des médias et des gouvernements occidentaux qui construisent sans cesse des narratifs visant à noircir l’image de Bachar el-Assad.

Certains de ces narratifs vont jusqu’à qualifier Bachar el-Assad de « Boucher de Damas » alors même qu’il dispose du soutien de l’écrasante majorité de son peuple, sans lequel il aurait perdu le pouvoir depuis longtemps.

J’ai pu constater, lors de mon séjour en Syrie, l’extraordinaire résilience du peuple syrien qui s’oppose depuis 12 ans, avec succès, aux visées géopolitiques et machiavéliques de l’État hébreu et de ses mandataires anglo-saxons et terroristes islamistes.

J’ai pu aussi constater la folie jusqu’au-boutiste israélienne qui va jusqu’à bombarder l’aéroport d’Alep quelques jours après le tremblement de terre qui a frappé la Turquie et la Syrie, alors même que l’aide humanitaire russe et celle des pays arabes y sont acheminées, au profit des populations civiles les plus touchées.

« La vérité, c’est que, s’agissant du Proche et Moyen Orient
les bouchers se trouvent à Tel Aviv, à Washington et à Londres. »

Ce sont bien ces pays qui ont semé le chaos et provoqué, directement ou indirectement, la mort de millions d’êtres humains au Proche et Moyen-Orient depuis l’effondrement de l’Union-soviétique en se justifiant toujours par des narratifs et des prétextes mensongers (armes de destruction massive qui n’existaient pas ou lutte contre un terrorisme qu’on instrumentalise en sous-main).

Les bonnes nouvelles de 2022-2023, pour la Syrie découlent des conséquences de l’opération militaire spéciale russe en Ukraine.

Incontestablement, les Russes ont changé la donne de la géopolitique mondiale en refusant l’extension à l’Est de l’OTAN et l’arrivée à leurs frontières de bases militaires hostiles, comme l’avait fait Kennedy, pour son pays, lors de la crise des missiles de Cuba en 1962.

Avec habileté, la Russie s’est posée en championne de la multipolarité et en opposition à l’hégémonie occidentale jugée tyrannique par de très nombreux pays.

Elle a aussi fait apparaître la faiblesse militaire des pays membres de l’OTAN qui refusent de s’engager militairement contre la Russie (et peut être la Chine) faute de disposer de moyens suffisants pour le faire et pour gagner, et faute de pouvoir rassembler et unir les populations et opinions occidentales sur un objectif russophobe (et sinophobe) qui est loin de faire l’unanimité.

Elle a également fait apparaître grâce aux sanctions boomerang prises par les pays membres de l’OTAN eux-mêmes, les vulnérabilités économiques et financières d’un Occident accroc à la dette et à la consommation d’une énergie jusqu’alors bon marché.

Dans ce nouveau contexte créé par l’opération russe, de nombreux pays changent de camp. Depuis plus d’un an, la diplomatie occidentale enregistre échec sur échec face aux diplomaties russe et chinoise.

Le nombre de demandes d’adhésion aux BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) et à l’OCS (Organisation de Coopération de Shangaï) explose, ce qui est le signe d’un soutien croissant au camp de la multipolarité et d’un refus de l’hégémonisme des USA et de l’OTAN.

L’Afrique rejette toujours plus l’Occident, ses diktats, ses valeurs et ses modes d’action jugés néocoloniaux, et, en particulier, ceux de la France. Elle bascule dans les camps russe et chinois.

Au grand dam des USA (et d’Israël), et sous l’égide de la Chine, l’Iran et l’Arabie Saoudite se sont réconciliés en mars dernier, sept ans après la rupture des relations diplomatiques.

Le président iranien Ébrahim Raïssi s’est rendu en visite officielle le 3 mai dernier à Damas pour y signer d’importants accords économiques et politiques.

La Ligue Arabe (22 États) a voté à l’unanimité la réintégration de la Syrie, exclue en 2011 sous la pression US-Israël. C’est un succès pour la diplomatie russe et une victoire éclatante de Bachar el-Assad, qui reviendra donc auréolé de sa résistance à l’Occident. Pas un seul État arabe, sur 22, ne s’est soumis aux pressions US-Israël et a voté contre la réintégration. Les ambassades arabes ré-ouvrent les unes après les autres à Damas.

L’unité du monde arabe, cauchemar d’Israël et des USA est en cours de reconstruction avec l’appui de la Russie et de la Chine.

La Turquie, la Syrie et l’Iran se parlent désormais régulièrement, sous l’égide de la Russie, pour mettre un terme à la crise syrienne et à leurs différends.
En Turquie, le candidat d’alternance à Erdogan, Kemal Kiliçdaroglu, soutenu financièrement et politiquement, en coulisse, par l’Occident, ne paraît pas en situation d’emporter l’élection présidentielle au second tour du 28 mai prochain. D’autant que le parti d’Erdogan dispose d’ores et déjà de la majorité absolue au parlement turc, suite aux élection du 14 mai. Les médias occidentaux hurleront à la fraude électorale le 28 mai prochain, comme ils le font à chaque fois que les résultats ne correspondent pas à leurs attentes (Syrie, Iran, Russie, Vénézuela…), mais le président Erdogan saura se souvenir de cet épisode, et de l’ingérence occidentale dans cette élection de 2023, comme de la tentative de coup d’État de 2016 concoctée par son bon allié US. Il rapprochera toujours plus son pays, comme il le fait déjà, de la Russie et de la Chine, des BRICS et de l’OCS : en clair, du camp de la multipolarité.

Toutes ces bonnes nouvelles pour la Syrie, sont autant de mauvaises nouvelles pour Israël et ses mandataires anglo-saxons toujours plongés dans des difficultés économiques, financières et sociales qui ne sont pas près de s’arranger.

S’agissant d’Israël, la très controversée loi sur la Justice affaiblit la cohésion du pays. Les déclarations insensées d’un ministre israélien suprémaciste en charge des finances et des territoires occupés clamant, en France, et à qui veut l’entendre, que le peuple palestinien n’existe pas, et développant son propos devant une carte du « grand Israël », ne vont pas arranger les affaires de la région. Il est clair que ce type de provocations haineuses ne peut qu’engendrer, en retour, de la colère, de la haine et de la violence, pouvant aller jusqu’au terrorisme, chez les personnes offensées, humiliées et/ou soumises par la contrainte « armée » depuis 1947.

À ceux qui s’interrogent sur les motivations du gendarme tunisien, auteur de l’attaque contre la synagogue de la Ghriba à Djerba le 11 mai dernier, il y a peut-être une piste à creuser… Le comportement des dirigeants de l’État hébreu que ce soit lorsqu’ils bombardent ALEP quelques jours après le tremblement de terre ou lorsqu’ils envoient un ministre en charge des territoires occupés, à Paris, pour cracher sa haine des Palestiniens, ne peut laisser les masses arabes indifférentes. On peut regretter, bien sûr, que la LICRA et SOS Racisme, mais aussi le Gouvernement français dans son ensemble, soient restés étonnamment discrets sur ce triste épisode de haine raciale du ministre israélien, clairement exposé à la face du monde le 19 mars 023.


Ma conclusion sera optimiste pour la Syrie…


Grâce à la résilience et à la cohésion de sa population, pourtant multiconfessionnelle, grâce à la détermination de son Président qui a su rester laïc dans sa gouvernance, et ferme face aux agresseurs israéliens, us-otaniens et terroristes islamistes ; grâce à l’appui de la Russie qui est intervenue à la demande des autorités légales de l’État, la Syrie a pu résister pendant douze ans aux assauts coordonnés et prémédités de l’OTAN, d’Israël et des terroristes islamistes, instrumentalisés par l’Occident pour créer le chaos et remodeler un nouveau Proche-Orient conforme aux intérêts et aux souhaits de l’État hébreu.

La préméditation de l’agression anglo-saxonne a été clairement établie par la divulgation des « Wikileaks files », c’est à dire les fuites sur les correspondances diplomatiques entre les représentants US en Syrie et le département d’État états-unien depuis le début des années 2000 .

La collusion entre Israël et les USA a été, elle aussi, établie par une déclaration sans ambiguïté de Biden lui-même, le 13 juillet 2022 à Tel Aviv :

« Il n’est pas nécessaire d’être Juif pour être sioniste. »

https://fr.timesofisrael.com/liveblog_entry/biden-il-nest-pas-necessaire-detre-juif-pour-etre-sioniste/

Cette collusion a été clairement confirmée par les plus connus des géopoliticiens US, Mearsheimer et Walt, dans l’excellente analyse publiée sous le titre : Le lobby pro-israélien et la politique étrangère américaine.

Cette collusion apparaît clairement dans le simple constat que les personnes en charge de la politique étrangère et de la politique des sanctions économiques US ont figuré sur la liste des nominés au palmarès mondial de l’influence du Jerusalem Post (Blinken, Sherman, Janet Yellen…)

La bonne nouvelle pour la Syrie, c’est l’émergence en cours d’un monde multipolaire qui remet en cause l’hégémonie sans partage US-OTAN des trois dernières décennies et l’influence des néoconservateurs mondialistes (et sionistes). La Syrie pourra désormais compter sur l’aide de la Russie, des pays du Golfe (dont l’Iran) et de la Chine pour sa reconstruction et sa défense.

Israël assiste aujourd’hui, impuissant, au déclin de son principal allié et de ses soutiens néoconservateurs et mondialistes US, et à la recomposition des équilibres géopolitiques et géo-économiques mondiaux qui ne se fera pas en sa faveur. N’en déplaise à l’État d’Israël qui a raté son coup en Syrie, grâce ou à cause de la Russie, le vrai « Printemps syrien » va pouvoir commencer, sous la gouvernance de… Bachar el-Assad !

Source : Dominique Delawarde : Les bouchers de Tel Aviv et de Washington (Stratpol)

Dominique Delawarde : Après des périodes d'encadrement d'unités militaires de Légion étrangère (2ème RE et 3ème REI) et de Chasseurs alpins (6ème, 7ème et 11ème BCA), puis d'encadrement d'élèves officiers notamment à Saint Cyr, le Général (2S) Dominique Delawarde fut chef «Situation-Renseignement-Guerre électronique» à l'État-major interarmées de planification opérationnelle.
Il a servi plus de 8 ans hors de l'hexagone : aux États-Unis, en Amérique du Sud et au Proche-Orient dans le cadre de l'ONU, plus d'un an dans les Balkans dans les cadres de l'ONU et de l'OTAN, et plus de six mois au Moyen- Orient (Émirats, Qatar, Koweït).



Discours de Bachar el-Assad, Président de la République arabe syrienne, au sommet de la Ligue arabe

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