Qui ne risque rien n'est rien… sur le chemin de Damas, alors que les opinions ont cédé face aux faits…
on ne le dit assez : un âge n'en chasse pas un autre, tous les âges qu'on a vécu coexistent à l’intérieur de soi, ils s'empilent, et l'un prend le dessus au hasard des circonstances.

dimanche 23 septembre 2018

Dogora - Ouvrons les yeux… un chef d'œuvre universel de Parice Leconte




Amoureux du Cambodge nous ne pouvons qu'être envoûtés par l'enchantement qui se dégage de ce film de Patrice Leconte… Pour ceux qui ne connaissent pas encore ce merveilleux pays des Khmers c'est une invitation à le découvrir… Mais c'est aussi pour chaque voyageur partout dans le monde ou plus simplement pour le sédentaire resté près de chez lui une invitation à ouvrir grand les yeux sur les êtres et la nature qui l'entourent… En ce sens ce chef d'œuvre de Patrice Leconte s'inscrit comme un chant universel…




Dogora se situe en marge de la fiction et du documentaire et ne comporte pas d'histoire. Ni démonstration, ni récit, ce  film de Patrice Leconte datant de novembre 2004 est davantage une expérience émotionnelle et sensorielle. Dans Dogora, l'image et la musique (composée par Étienne Perruchon) s'embrassent et font sens l'une pour l'autre ; aucun dialogue, aucune visée didactique ne viennent alourdir ou dénaturer cette symbiose qui nous ramène à une sorte d'essence du cinéma.




Au commencement étaient l'image et le son…

Dogora respire la simplicité, l'humilité originelle qui saisit un réalisateur quand il se laisse émerveiller par ce qu'il filme. Ce film est le fruit de deux chocs esthétiques reçus par Patrice Leconte et qu'il a synthétisés dans cette œuvre : l'un musical, survenu quand il a découvert la musique d'Étienne Perruchon, et l'autre visuel, éprouvé lors d'un premier voyage au Cambodge où il a été bouleversé par l'esthétique et la poésie qui pouvaient transparaître d'une banale scène de rue.

Dogora est donc un film avant tout sensible, qui ne dit pas mais suggère, qui donne corps à la matière au point qu'un plan serré sur un jean peut avoir mille résonances chez le spectateur : une réminiscence tactile, la pensée du chemin parcouru par le vêtement de sa fabrication là-bas, si loin, par des mains inconnues, jusqu'à nos grands magasins ou encore une réflexion sur le capitalisme…Chaque scène est un frisson nouveau, une expérience intime à laquelle la bande son donne une intensité extrême. La musique d'Étienne Perruchon n'est pas un support à l'image, elle ne fait pas corps avec le film mais est le film à proprement parler.

Dogora s'ouvre d'ailleurs sur une scène de concert filmée en noir et blanc qui donne dès la première seconde la coloration impressionniste du film : les visages des musiciens sont floutés, seuls les traits du chef d'orchestre nous apparaissent et au milieu des multiples lignes créées par les archets et les bras tendus, se détache l'ovale des bouches des chanteurs. Dans cette scène comme dans toutes celles qui suivent, la mise en scène est d'une rigueur et d'une inventivité remarquables: photographie, angles de prise de vue et cadrages sont autant d'éléments qui témoignent de la parfaite maîtrise technique atteinte par Patrice Leconte.

Et c'est grâce à cette maîtrise que le film se distingue du documentaire ; Patrice Leconte joue de la subjectivité de l'image et un même objet peut prendre une connotation totalement différente selon le champ, le cadrage ou la lumière choisis. À cet égard, plusieurs séquences rappelleraient les « Correspondances » de Baudelaire ; l'une d'entre elles s'arrête sur des arbres « saignés » dont on extrait le latex et évoque tout à la fois la féminité, l'abandon physique et une certaine sensualité. Mais là où le réalisateur aurait pu céder à l'outrance, il préfère le pointillisme, la discrétion, et l'on sent une profonde prise en compte du spectateur, de sa sensibilité et de ses attentes.

L'homme est d'ailleurs un élément central de Dogora, au travers surtout de l'enfant, dont Patrice Leconte parvient à capter la contradiction essentielle : celle de l'extrême vulnérabilité mêlée à une profonde force, souvent exprimée dans leurs regards. Ainsi, des enfants laveurs de voiture apparaissent tout d'abord comme une armée se préparant à un pillage ; ils sont casqués de chapeaux et de bandanas et les carrioles sur lesquelles ils trônent soulèvent des nuages de poussière. Mais lorsqu'ils remarquent la caméra, leurs regards butés se figent et laissent apparaître une immense fragilité.

Décrire Dogora n'est donc pas chose aisée tant chaque plan mérite commentaire et chaque élément fait sens au sein d'une œuvre dense mais exceptionnellement unitaire. Peut-être suffit-il alors de dire que ce film offre des moments de grâce et une vision extrêmement sensible des paysages et des moments de vie qui sont ceux du Cambodge, mais pourraient être ceux de n'importe quel endroit de la terre où le regard de l'artiste peut se poser.


Rendre visite à l'association "Pour un Sourire d'Enfant" au Cambodge

Pour un Sourire d'Enfant : Filmographie sur l'histoire complexe du Cambodge

Le Forum Khmer-Network : Patrice Leconte présente « Dogora »

Barbara Laurent-Ogier : Dogora - Ouvrons les yeux


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Patrice Leconte a choisi d’apporter son soutien à l’association Pour Un Sourire d’Enfant (PSE) qui, depuis près de 20 ans, forme à un métier les enfants les plus défavorisés du Cambodge, pour les sortir définitivement de la misère et la maltraitance. Touché par cette cause, Patrice Leconte est retourné fin novembre 2014 à Phnom Penh, tourner un court métrage présentant l’association et ses missions à savoir : nourrir, soigner, protéger, héberger, éduquer, scolariser et former à un métier.

Patrice Leconte (27 octobre 2014) : « Je connais PSE depuis une dizaine d’années. J’avais été faire un voyage au Cambodge, et aucun pays ne m’avait ému, bouleversé, à ce point.


J’y suis reparti un an plus tard pour y tourner un long métrage musical assez atypique : DOGORA. J’ai, à cette occasion, rencontré Christian et Marie-France des Pallières, les fondateurs de PSE. J’ai adoré ces personnes magnifiques, humaines, lumineuses. J’ai connu leur travail, leur démarche, leur itinéraire. Et je les ai aussitôt aimées, pour toujours.


Je me suis efforcé de ne jamais perdre de vue PSE ; je suis retourné à Phnom-Penh donner des cours de cinéma pour former des anciens chiffonniers dans le cadre de la formation professionnelle des métiers de l’audiovisuel. Nous avons ensemble tourné des petits films. Je me suis toujours senti en harmonie avec PSE, comme une sorte de "parrain virtuel". Aujourd’hui, il m’est proposé de passer du virtuel à l’officiel, ce qui me touche infiniment. Je continuerai à être avec PSE, le plus possible.


La scolarisation de tant et tant d’enfants qui, pour la plupart, étaient abandonnés à un sort si peu enviable, puis la formation professionnelle qui leur permet à tous sans exception d’acquérir un métier, dans de multiples branches, tout cela me touche et m’émerveille. Car ce n’est plus un rêve, c’est une réalité.


Je vais tourner fin novembre [2014] un court métrage d’une vingtaine de minutes sur cette aventure incroyable qu’est PSE, et qui est née de la seule volonté d’un homme et d’une femme. Leur chemin est unique, il force l’admiration, m’émeut, et c’est cette émotion là que je vais essayer de transmettre, communiquer, avec ce film. Pour qu’il suscite de nombreux parrainages, des centaines, des milliers... »




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