InfoSyrie emprunte au
site realpolitik.tv animé notamment par Aymeric Chauprade, spécialiste français très en vue des questions de géostratégie, cette présentation vidéo où l’historien Philippe Conrad – rédacteur en chef des revues Histoire Magazine et Terres d’Histoire – rend compte du livre
Quand la Syrie s’éveillera, paru en janvier 2011 chez Perrin
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Écrit par Richard Labévière, rédacteur en chef de Défense, revue de l’Institut d’études de Défense nationale, et Talal el-Atrache, correspondant à Damas de plusieurs médias français, et par ailleurs arrière-petit-fils d’un des leaders de la révolte syrienne contre le mandat français, le livre retrace l’histoire de la Syrie politique, depuis l’avortement du grand royaume arabe promis par les Anglais et l’établissement du mandat français sur la région en 1920 jusqu’à l’avènement à l’été 2000 de Bachar al-Assad à la tête de l’État. Et on y trouve une analyse de la société syrienne actuelle, qu’on pourra lire avec profit à la lumière des actuels événements.
Entre autre choses, Labévière et el-Atrache rappellent les contentieux opposant historiquement Damas et Paris : détachement arbitraire du territoire libanais dès 1920, politique systématique de morcèlement de la Syrie sur des bases communautaires, cession du Sandjak d’Alexandrette à la Turquie, révoltes locales durement réprimées (notamment en 1925 et 1945). À quoi répondent, côté français, la longue amitié, au temps de la guerre froide, entre la Syrie baasiste et l’URSS, les accusations de manipulations de groupes terroristes au Liban dans les années 80, et l’imputation à Damas, pour le moins hâtive, de l’assassinat de Rafik Hariri en 2005, sans oublier, surtout depuis l’élection de Nicolas Sarkozy, l’alignement français sur les positions américaines qui voient dans la Syrie baasiste un obstacle aux projets de « remodelage » du Proche-Orient dans le sens des intérêts de Washington et de Tel Aviv.
Tout ceci est à l’origine de l’image caricaturale dont pâtit la Syrie, en France et en Occident. Image contre laquelle s’insurge dans sa préface Alain Chouet, ex-responsable du service de renseignement de sécurité de la DGSE et fin connaisseur du Proche-Orient : oui, dit-il, la Syrie est un État autoritaire, mais pas plus répressif que la Tunisie de Ben Ali et l’Égypte d’Hosni Moubarak soutenus jusqu’au bout par les Occidentaux ; oui c’est un État resté ferme face aux prétentions et agissements des Américains et Israéliens, mais qui avait choisi l’Occident contre Saddam Hussein en 1990, et que, plus récemment, Sarkozy avait voulu intégrer dans son « Union pour la Méditerranée » mort-née.
L’intérêt de l’ouvrage est qu’il a été écrit juste avant le mouvement de contestation actuel. Dans sa préface, Alain Chouet envisage des scenarii pour l’avenir. L’un d’entre eux, qui semble se confirmer, est le raffermissement d’un nouveau « front du refus » unissant la Syrie, l’Iran, et les nationalistes irakiens anti-américains ; l’autre, qui ne semble pas vraiment ratifié par l’actualité en cours, imagine un rapprochement de Damas avec Paris et l’Union européenne – mais il ne faut pas oublier qu’en 2008, Bachar était jugé très fréquentable par Sarkozy, qui l’invitait même à la revue du 14 juillet…
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