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samedi 23 novembre 2013

Le roi du yaourt… tel que le journal Le Monde présentait Ravalomanana début 2002…


Chacun se souvient du premier tour de l’élection présidentielle du 16 décembre 2002 contestée par Marc Ravalomanana distancé par Didier Ratsiraka, le président en exercice… Marc Ravalomanana et les siens avaient alors instauré pendant de longs mois un état insurrectionnel à Madagascar, appuyé par Norbert Lala Ratsirahonana, ancien président de la Haute Cour constitutionnelle nommé par Albert Zafy… puis en 1996 président intérimaire de la République après la destitution du même Albert Zafy… puis ambassadeur itinérant sous Marc Ravalomanana, pour ensuite s’immiscer comme conseiller spécial de la Haute Autorité de la Transition avec Andry Rajoelina… Norbert Lala Ratsirahonana n’a plus à retourner sa veste, désormais il ne porte plus qu’un accoutrement d’Arlequin. Qu’est-ce qui pousse Norbert Lala Ratsirahonana, homme de tous les mauvais coups et de toutes les trahisons… Une haine irrépressible envers Didier Ratsiraka ? Les intérêts d’un clan, le sien, sa famille ? L’amertume de n’avoir jamais été qu’un pâle pantin de second rôle ? Ce qui n’a jamais amoindri ses capacités de nuisance… À présent, Norbert Lala Ratsirahonana semblerait vouloir se cacher derrière Hery Rajaonarimampianina !

Mais puisque le combat électoral qui s’annonce opposera le messager de Marc Ravalomanana, un certain Robinson de la Grande Île, à Hery Rajaonarimampianina… revenons à Marc Ravalomanana, à son image au moment où, avec son comparse de circonstances Norbert Lala Ratsirahonana, il devait plonger Madagascar dans l’insurrection pour se saisir du pouvoir. Marc Ravalomanana persuadé alors que rien ne pouvait lui résister… et qui, maintenant, est prêt à tout pour une revanche ! "Quand je veux quelque chose, je l'ai !" Voilà, donc comment Le Monde titrait et présentait Marc Ravalomanana fin 2001, début 2002…


À Madagascar, le "roi du yaourt" ne doute pas d'emporter la bataille de la présidence

"Quand je veux quelque chose, je l'ai" : à la tête d'un empire financier, M. Ravalomanana promet tout et beaucoup aux habitants de la Grande Île… Un article de Fabienne Pompey pour Le Monde datant du début 2002…

Tiko partout présent, à Vohemar comme dans tout Madagascar…

Le regard perçant et un sourire carnassier, Marc Ravalomanana a la démarche rapide et le geste énergique. Ce petit homme âgé de 51 ans porte avec élégance des costumes de bonne facture et tout dans son allure reflète une détermination inébranlable. "Il a plus tendance à employer l'impératif que le conditionnel", dit de lui un diplomate. On le décrit autoritaire, il ne dément pas. Les décisions, il les prend seul, et vite.

Ses mots d'ordre sont "rapidité, efficacité, professionnalisme". À l'en croire, c'est en suivant ces trois principes qu'il est devenu le capitaine d'industrie le plus puissant de Madagascar, puis le maire de la capitale, Antananarivo, avant de se décider à partir à la conquête de la présidence malgache contre le président sortant, Didier Ratsiraka.

Tout chez Marc Ravalomanana semble aller de soi. Le jour où il a compris comment produire des yaourts à bas prix, il a réussi à en faire manger à tout le pays et à bâtir sa fortune. "Quand je veux quelque chose, je l'ai", affirme-t-il. Ainsi, il a décidé d'être maire d'Antananarivo le 21 octobre 1999. Ce jour-là, raconte-t-il, il était dans le bureau du maire pour prendre des nouvelles d'un permis de construire déposé depuis longtemps. L'affaire traînait. "Je me suis dit que j'allais prendre sa place", se souvient Marc Ravalomanana. Un mois plus tard, il était élu.

Jamais auparavant, l'homme d'affaires n'avait fait de politique ni même fréquenté les cercles du pouvoir. Issu d'une famille de paysans mérinas, il grandit non loin de la capitale, entre "l'école du dimanche" du pasteur du village et le gardiennage du troupeau familial. Très discret sur son cursus scolaire, il n'affiche comme formation que les stages suivis en Suède et au Danemark dans la filière agro-alimentaire. Par deux fois, il lance des entreprises. Elles font faillite. "J'ai aussi fait faillite trois fois avec les fermes et maintenant j'en ai une avec 800 vaches", nuance-t-il.

L'histoire de son succès ne démarre qu'en 1981, quand il obtient un prêt de la Banque mondiale de plus de 1,5 million de dollars pour monter Tiko, la marque de yaourt qui le rendra célèbre dans le pays. Vingt ans après, Tiko est devenu un groupe, emploie 5 000 personnes et s'est diversifié, de l'embouteillage de l'huile de soja et d'eau minérale en passant par la grande distribution. Depuis peu, Marc Ravalomanana s'est aussi offert une chaîne de télévision, un réseau de radios et une imprimerie.

"Ayez la foi"

Tout Tiko, des studios de télévision aux camions qui livrent les yaourts, porte les couleurs bleu et vert du groupe, et la même devise, extraite de l'évangile selon saint Marc, "N'ayez pas peur, ayez la foi". Une phrase reprise comme slogan de campagne. "C'est la foi qui me guide", assure Marc Ravalomanana. Les employés de Tiko sont tous chrétiens, comme la grande majorité des Malgaches. Un jeudi par mois, l'aumônier du groupe anime un office. Est-ce obligatoire ? Marc Ravalomanana répond simplement : "C'est une heure prise sur le travail".

Des prières ont également parfois lieu à la mairie où, précise le maire, une douzaine de conseillers municipaux sont des pasteurs. "Tous les camions de Tiko portent sur leur immatriculation le chiffre 7, chiffre biblique", fait remarquer un prêtre. Vice-président du puissant conseil malgache de l’Église réformée, le FJKM, Marc Ravalomanana est un protestant généreux. "J'aide toutes les Églises, protestante comme catholique", dit-il. Dans son village, de 150 habitants, il a fait construire un temple de 2 000 places, avec un toit de tôle venue d'Angleterre, "qui peut tenir huit cents ans".

Le soutien que lui apportent des centaines de pasteurs dans tout le pays, mais aussi la notoriété de la marque Tiko ont été de puissants relais pour sa campagne électorale. À travers la Grande Île, il n'y a pas un village où n'apparaisse le logo de la firme. Marc Ravalomanana ne s'y est pas trompé. Lorsqu'il a formé son groupe de soutien pour la campagne électorale, il l'a appelé Tiako et les affiches, les tee-shirts, les casquettes sont aux couleurs du yaourt le plus connu du pays.

Tiko est un motif de fierté nationale : une société malgache qui marche, dirigée par un enfant du pays, un self made man qui ne doit rien à personne. Les méthodes qu'il a utilisées pour son groupe industriel, Marc Ravalomanana les a appliquées à la mairie. Là aussi, il décide seul et vite. Par exemple, pour cette construction d'une route à quatre voies, prévue depuis plus de vingt-cinq ans, pour désengorger l'entrée dans la capitale. "Le dossier traînait parce que des gens s'étaient installés illégalement sur le tracé. J'ai ordonné la destruction de 275 maisons et on a fait la route", résume-t-il. Ce que ne dit pas le maire, c'est que les habitants expulsés, mais jamais relogés, ont intenté un procès.

Si le maire de la capitale a réussi à améliorer le cadre de vie de ses habitants, c'est aussi parce qu'il dispose de beaucoup d'argent. Certes, il est parvenu à améliorer la collecte des taxes et à mobiliser des aides des bailleurs de fonds, mais les comptes de la mairie et ceux de Tiko se sont parfois confondus. Le groupe industriel a été récemment la cible d'un redressement fiscal. L'affaire, toujours en cours, porte sur près de 300 milliards de francs malgaches (51 millions d'euros).

Ses adversaires sont persuadés que le candidat à la présidence bénéficie de financements extérieurs pour sa campagne. Les rumeurs lui prêtent des liens avec des hommes d'affaires blancs sud-africains, avec des Églises protestantes allemandes.

Au total, rares sont ceux qui connaissent bien Marc Ravalomanana. L'homme est discret et fuit les mondanités. Complexé par son français hésitant et son anglais approximatif, il ne serait pas non plus un orateur hors pair en malgache. Mais son accent populaire et son enthousiasme ont séduit les foules. Il promet aux Malgaches que la Grande Île ne sera bientôt plus classée pays sous-développé, quand il ne fait pas miroiter une entrée au… G8.


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