Qui ne risque rien n'est rien… sur le chemin de Damas, alors que les opinions ont cédé face aux faits…
on ne le dit assez : un âge n'en chasse pas un autre, tous les âges qu'on a vécu coexistent à l’intérieur de soi, ils s'empilent, et l'un prend le dessus au hasard des circonstances.

vendredi 1 mars 2013

Jean-Marie Curutchet s'en est allé au Ciel


Disparition de Jean-Marie Curutchet

Alphonse Raymond nous livre un bel hommage à Jean-Marie Curutchet, Basque, Saint Cyrien, officier parachutiste engagé dans le combat pour l'Algérie française pour aller jusqu'au bout de l'honneur.

Jean-Marie Curutchet vient d'être rappelé au Ciel le vendredi 1er mars 2013 en début d'après-midi. Ce Basque né en 1930 à Toulon passe sa jeunesse à Alger et Paris. Chez les scouts, il assume très vite la fonction de chef de patrouille. Il entre en «corniche» au Prytanée militaire de La Flèche. Sorti chef de section d'infanterie de l'École de Saint-Cyr-Coëtquidan (promotion Union Française), il est muté à sa demande au 14e régiment de chasseurs parachutistes, composé en grande partie d'appelés musulmans, où avait eu lieu une mutinerie.

Jean-Marie Curutchet
Il contribue à ramener la sérénité, l'esprit de corps, l'ambiance offensive et le haut niveau de combativité. Ce célibataire qui affronte la mort au combat savoure pleinement la vie lors du repos du guerrier, n'en déplaise aux esprits étriqués.

Excellent officier, remarquablement noté, apprécié de ses supérieurs, fanatiquement aimé de ses subordonnés, il étonne parfois ses camarades officiers. Plusieurs d'entre eux deviennent des amis, mais d'autres le ressentent comme un implacable combattant capable de payer de sa vie une mission qui l'exigerait, au professionnalisme sans état d'âme si ce n'est l'économie du sang de ses soldats. À Philippeville, meurtrie par les massacres de 1955 et nettoyée par les parachutistes, il rencontre une jeune femme qu'il épouse et qui lui donne trois fils. Au grand étonnement de jeunes officiers, ses pairs, qui l'avaient estimé détaché de considérations affectives à l'égard de l'Algérie française, il tire les conséquences ultimes de la guerre qu'il considère comme une véritable croisade et une application du code de l'honneur du guerrier : il entre dans la clandestinité en septembre 1961.

Chef de la branche ORO (Organisation Renseignements-Opérations) de l'OAS-Métropole, il mène une guerre sans merci aux porteurs de valise, aux convoyeurs de fonds, aux officiers gaullistes ayant empêché l'OAS de sécuriser des points sensibles, aux barbouzes qui usent de méthodes terroristes.

En sa qualité de Saint-Cyrien, attaché au pli éthique des officiers de tradition confrontés à la rupture ontologique que représente le rejet des institutions adultérées par un pouvoir renégat, il est le mieux placé pour seconder le colonel Argoud, polytechnicien ayant tiré les mêmes conclusions que les siennes.

Co-fondateur du Conseil national de la Révolution, il se heurte parfois à des gens sincères mais dont l'attachement aux écorces mortes d'un monde défunt les empêche d'envisager la situation telle qu'elle est. Rompu aux techniques de la guerre de partisans et à la survie en milieu hostile, il échappe pendant deux ans aux recherches des polices françaises et étrangères.

Transitant par Dakar, il est enlevé par des barbouzes alliés de la police de Senghor. Comme le duc d'Enghien au siècle précédent, il ramené de force à Paris.

Déféré devant le juge d'instruction, il lui rétorque qu'il ne reconnaît ni la légalité ni la légitimité du pouvoir judiciaire et encore moins du maître élyséen de l'exécutif qu'il considère comme un scélérat coupable de haute trahison ; il informe le juge qu'il sait d'avance qu'il sera exécuté, donc il n'a aucune raison de collaborer de la moindre façon à l'interrogatoire.

Au juge qui prétend lui donner une leçon de morale en l'informant que d'autres inculpés ont assumé leur responsabilité, lui parlant même d'honneur, il répond sèchement qu'il ne tombera pas dans le piège. Jugé par la Cour de sûreté de l'Etat, il est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité. Détenu à l'île de Ré, il s'inscrit en Faculté et passe une licence d'histoire.

Lors de l'amnistie de 1968, il est le dernier condamné à être élargi, le pouvoir ne lui ayant jamais pardonné d'avoir récusé sa légitimité ; il dénonce la nature perverse et satanique du gaullisme, son néant absolu, la fascination hystérique et psychiatrique qu'il exerce.

Il considère que Maurras s'est trompé dans «Politique d'abord», que nous sommes définitivement sortis de l'âge politique défini par Aristote et repris par saint Thomas d'Aquin. La captivité l'ayant conduit à cheminer spirituellement en lui-même, il se souvient alors de son éducation religieuse.

Il sait aussi que l'Église de Mohammed Duval et du concile de Vatican II sont des chimères : il le comprend parmi les premiers. Doté d'une intelligence fulgurante et d'une intuition à la rapidité hors du commun, Curutchet découvre que la vraie guerre est d'ordre spirituel.

Il va méditer à Montségur en ermite, suit la difficile et austère règle de saint Jean Stylite, mais en sa qualité de Basque - dont il redécouvre les racines et l'identité somatique - il se sent proche des Exercices spirituels de saint Ignace de Loyola.

Se moquant éperdument de l'opinion d'autrui, voire de celle de ses propres anciens camarades de combat qui parfois peinent à le comprendre, il veut se mettre en ordre avec lui-même quoi qu'il dût en coûter. Il rédige alors Le procès Jean-Marie Curutchet. Compte-rendu sténographique des débats, réquisitoire et plaidoiries, NEL, 1965 et Je veux la tourmente, Robert Laffont, 1973.

Il acquiert une vieille ferme dans l'arrière-pays basque à laquelle il rend son aspect authentique, nécessaire à un ré-enracinement ; parallèlement, il fonde une maison d'édition artisanale consacrée à l'ethnographie basque.

Ses collections couvrent des domaines en apparence assez divers, mais en réalité tenus par une colonne vertébrale du corps subtil : cuisine basque, souvenirs et mémoires d'anciens de l'OAS (dont le célèbre docteur Jean-Claude Pérez), architecture paysanne régionaliste, chapelles et oratoires du chemin de Saint-Jacques de Compostelle, lieux druidiques et préchrétiens des tribus euskariennes antiques. Estimant sa tache éditoriale accomplie, il conclut son œuvre écrite en publiant le fac-simile d'Augustin Chaho Paroles d'un voyant, un visionnaire du XIXe siècle ayant eu des prémonitions tant à l'échelle du pays basque que de la planète tout entière.

Dans l'intervalle, Curutchet avait estimé souhaitable de s'intéresser à la franc-maçonnerie, imaginant comme le métaphysicien René Guénon qu'une trace de la Tradition primordiale et de la religio perennis avait pu y subsister, mais après sept ans d'assiduité à la loge de la rue des visitandines à Bayonne, il ressent comme un impératif de mettre fin à une expérience qu'il estime contreproductive, voire néfaste.

Pleinement revenu à l'Église, il dédaigne le nouveau rituel. Il déclare même à un de ses jeunes amis : « La Présence Réelle sur l'autel ? Il ne se passe plus rien dans les églises depuis le concile de Trente !» Fidèle à l'Église johannique, il expérimente la théologie apophatique, pratique la voie de l'oraison, récite quotidiennement les prières en les rythmant grâce à la respiration synchronisée avec les accents toniques (ce que les Grecs appellent hésychasme).

Il s’agit la vision de Denis l'Aéropagite décrivant les Hiérarchies, mais il lui est donné la permission de choisir entre rester au ciel contempler le monde séraphique ou redescendre sur terre achever sa mission de combat spirituel. Cet ancien officier répète en lui-même la prière des parachutistes : «Mon Dieu, mon Dieu, donnez-moi la souffrance». Remarquablement soutenu affectivement et soigné par sa seconde épouse, il met à profit ce dernier répit afin d'attirer dans le monde visible les grâces de l'invisible, jusqu'à ce qu'il estime sa mission remplie. Caractère inflexible ? Intransigeant ? Soldat avide de plaisirs et d'émotions terrestres devenu mystique en quête d'amour divin ? Comprenne qui pourra.
Alphonse Raymond 

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Extrait de Je veux la tourmente (Robert Laffont) par Jean-Marie Curutchet

À propos de Jean de Brem, historien, journaliste et militant nationaliste membre de l’OAS, assassiné le 17 avril 1963…

Jean de Brem
« Je venais d’apprendre par ma femme la mort de mon ami Jean de Brem, dit Alex. Il avait accepté de travailler à mes côtés à l’étranger. Mais par loyauté envers ses camarades et ses chefs parisiens, il avait tenu à retourner à Paris où il lui restait encore une dernière mission à accomplir.

C’est au cours de cette ultime mission qu’il trouva la mort. Surpris par les policiers au moment où il s’emparait avec Serge Bernier d’une voiture destinée à une mission opérationnelle, Alex ouvrit le feu pour se dégager. Il blessa mortellement un policier, mais fut à son tour atteint par une rafale de PM. Tombé à terre il porta à sa bouche une feuille de carnet où se trouvait quelque renseignement qui ne devait pas tomber aux mains de l’adversaire. Un policier arriva à sa hauteur, l’acheva d’une balle dans la tête, puis lui trancha la gorge pour récupérer le papier qu’il n’avait pas eu le temps d’avaler. «&nbspJe mourrai sans postérité, stérilisé par l’atome ou égorgé par un fanatique&nbsp» avait-il écrit dans l’avant-propos de son «&nbspTestament d’un Européen&nbsp». Bernier, que les policiers avaient capturé et déjà fait allonger par terre, ne dut d’avoir la vie sauve qu’à l’arrivée de quelques passants attardés. Cela se passait le 17 avril 1963 en plein Paris, rue de l’Estrapade, à deux pas du Panthéon&nbsp!

Jean de Brem a traversé comme un météore le ciel sombre de ma clandestinité. Notre amitié n’a pas duré trois mois. Je ne pourrai cependant jamais oublier ce lumineux ami de vingt-sept ans. Ni les nuits passées à discuter de l’avenir que nous voulions bâtir ensemble. Ni cette dernière soirée de Pully, une semaine avant sa mort et quarante huit heures avant mon arrestation. Ni ce 21e concerto de Mozart, écouté plusieurs fois de suite ce soir là, et dont je ne puis plus entendre l’andante sans penser à mon frère assassiné.&nbsp»



jeudi 28 février 2013

Arrivederci Benedicto

Le Maître et Flanby…


Au pays de Mikhaïl Boulgakov, Flanby rend visite à Maître Poutine…

Flanby saura-t-il enfin se taire, et ne plus se comporter en guignol irresponsable et diplomatiquement nul... Flanby saura-t-il écouter les leçons de Maître Vladimir Poutine et nous revenir tout nouveau et plein de bonnes idées ? Flanby aura-t-il révisé ses leçons avant de s'envoler rencontrer le Maître ? Le Maître qui, début juin 2012, l'avait déjà courtoisement invité à plus de lucidité à l'égard de la Syrie et du président Bachar el-Assad :

« Regardez, l'Irak, la Libye, est-ce que c'est le bonheur, est-ce que ces pays sont en sécurité aujourd'hui ? Nous savions tous que Kadhafi était un tyran. Mais pourquoi n'écrivez-vous pas ce qui s'est passé après sa chute, à Syrte notamment ? »

La crise syrienne connait déjà un vainqueur, la Russie de Poutine, qui s’est révélée comme l’adversaire le plus efficace face à l’hégémonisme atlanto-wahhabite. Et qui a pris la tête d’un regroupement de nations résistantes au projet de l’Empire atlantiste. Une résistance victorieuse, car ce qui a marché en Libye a manifestement échoué en Syrie, et les Russes ont joué, après l’armée et le peuple syriens, un rôle fondamental dans cet échec. On peut toujours essayer d’analyser ou disséquer, ou retourner telle ou telle déclaration de responsable russe : le fait demeure que Moscou ne fera rien contre le gouvernement syrien, et qu’il continuera de l’aider – discrètement – diplomatiquement, économiquement et militairement. Parce que, pour Poutine et son administration, ce qui est en jeu en Syrie, ce n’est pas la base navale de Tartous, c’est la crédibilité internationale de la Russie.

samedi 23 février 2013

Hommage à Monseigneur Pierre Boz…


« Il nous reste l’immense regret de n’avoir pas eu assez tôt la conscience d’une communauté, d’un peuple nouveau qui était en train de naître dans ce pays. Communauté et peuple nouveau que nous n’avons pas pu défendre. »


Monseigneur Pierre Boz,
Exarque patriarcal des melchites catholiques
est décédé à l'âge de 87 ans  le 15 février 2013 à l’hôpital du Val de Grâce


Ses obsèques seront célébrées
ce samedi 23 février 2013 en la Chapelle du Val de Grâce
Place Laveran 75005 Paris


Monseigneur Pierre Boz était Exarque Patriarcal des Melkites catholiques (Exarque du patriarche de Damas et de tout l'Orient), président de l'Association des Chrétiens originaires de Kabylie et de leurs amis, conseiller pour l'islam auprès de l'archevêché de Paris.

Oranais d'adoption, père blanc à Fort national, assistant de Monseigneur Bertrand Lacaste évêque d’Oran en 1962, chargé de mission par le cardinal Feltin en 1965, arabisant de longue date, spécialiste des dialectes du Maghreb, fin connaisseur de la culture berbère, islamologue, Monseigneur Pierre Boz est l'auteur d'un livre à découvrir « L’islam découverte et rencontre ».

Le 29 juin 1962, alors aumônier de la Petite Chapelle, il a participé à des négociations officieuses afin de faciliter le départ des commandos de l'OAS-Oran dont une partie quitteront le port d'Oran à bord du bateau le « Ville d'Alger » destination Marseille en tenue de brancardiers de la Croix-Rouge.

Le 5 juillet 1962, Pierre Boz présent à Oran vivra l'horreur des massacres des Musulmans et Européens français d'Algérie par les hordes FLN…


Un livre à découvrir…


Très soucieux d'entendre l'intériorité religieuse de cette expérience, il met en valeur ses proximités et ses différences avec celle des juifs et des chrétiens. Lors de la première édition de ce livre au début des années 1990, le contexte de l'islam était différent, moins marqué par la percée des mouvements fondamentalistes, la question du terrorisme, le développement et l'organisation d'un islam propre à la France. Cette nouvelle édition propose donc des informations complémentaires, avec de nouveaux chapitres consacrés par exemple à la notion de Djihad, aux forces en présence au sein de l'islam de France, ou aux commentaires nouveaux du Coran. Une excellente initiation à l'islam, conçue dans un esprit de compréhension, de respect et de dialogue.

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Homélie de Monseigneur Pierre Boz à Notre Dame de Paris, le 5 juillet 2012

Membre du groupe de recherche des Français disparus en Algérie, le 5 juillet 2012 à Notre-Dame de Paris Monseigneur Pierre Boz concélèbre avec Monseigneur Éric de Moulins-Beaufort, évêque auxiliaire de Paris, président de la cérémonie, une messe solennelle du souvenir pour toutes victimes des évènements 1954-1962, avec une intention particulière pour les enlevés et disparus et les religieuses et les religieux tués lors de ces troubles. Lors de cette messe Monseigneur Pierre Boz, l'Oranais, a prononcé cette très belle homélie :


Pierre Boz a passé une grande partie de sa vie en Algérie, comme enseignant de la langue arabe, ouvrant sur la lecture du Coran. Initié également au monde berbère par des années passées chez les Pères Blancs à Fort-National (Béni-Iratem), il a vécu d'abord à Alger, et ensuite à Oran, durant les évènements d'Algérie qui ont abouti à son indépendance en juillet 1962. Comme des centaines de milliers de Pieds-noirs et d'Algériens musulmans, qui ne pouvaient plus vivre dans ce pays, il a connu l'Exode et une "fin des temps". Il témoigne.

Monseigneur,

Chers amis « Pieds-Noirs »,

Nous sommes ici ce soir pour le souvenir et la prière d’intercession pour toutes les victimes de la guerre d’Algérie de 1954 à 1962. Le Seigneur les a déjà sûrement prises en grâces et en pitié, quelles que furent leur religion et leur foi.

Nous aurons une intention particulière pour les religieuses et les religieux massacrés durant ces évènements et les hommes, les femmes, les enfants enlevés et disparus à jamais.

S’il nous arrive encore de nous souvenir des drames vécus, des atrocités, des enlèvements et de ne pouvoir encore effacer certaines images qui rendent nos nuits interminables, c’est que nous ne sommes pas totalement guéris de cette fin des temps que beaucoup d’entre nous ont vécue. Comment réparer des blessures, les fêlures irréversibles striées dans nos cœurs et nos vies ? Cela donnera à notre mémoire l’empreinte de la douleur, du mal subi qui nous rendent solidaires de tous les peuples ou communautés victimes de génocide, même si ce mot terrible n’a pas encore é appliqué à notre histoire.

Mais une longue marche, une longue maturation ont été accomplies et assurées depuis cinquante ans par les hommes et les femmes de communautés si diverses qui constituaient notre quotidien sur notre Algérie natale, Ces hommes et ces femmes, nous sommes de ceux-là, juifs, musulmans, chrétiens ou sans aucune religion, furent condamnés à la Dispersion à la suite d’un invraisemblable mélange d’erreurs de jugement, de passions et peut-être aussi de haine et de trahisons. Si pour les décisions au plus haut niveau, si pour les engagements de toutes sortes qui sont à l’origine de notre sinistre destinée, nous n’avons pas été consultés, et délibérément écartés, nous savons du moins comment tout cela s’est passé. Et nous avons eu le temps avec le temps qui passe, de prendre la mesure de nos propres responsabilités comme « pieds-noirs », mais aussi une plus grande clairvoyance sur les responsabilités des autres acteurs du drame qui fut le nôtre.

Et jamais, dans cette quête, aucun sentiment de repentance ou une quelconque demande de pardon ne se sont imposés à nous. Il nous reste l’immense regret de n’avoir pas eu assez tôt la conscience d’une communauté, d’un peuple nouveau qui était en train de naître dans ce pays. Communauté et peuple nouveau que nous n’avons pas pu défendre. Nous fûmes même traités d’assassins lorsqu’il fut question de défendre la terre de nos morts.

Au-delà de toute rancune, au-delà de toute haine, la mémoire de ce passé reste une nécessité absolue pour sa transmission dans les temps à venir, comme une part irremplaçable de l’Histoire de la France, de l’Europe, de notre Mer commune, et aussi de l’Église. Ce passé fait désormais partie de l’héritage spirituel de nos enfants et des générations à venir. Il doit également peser sur notre propre réflexion, pour un retour et la cohérence sur nous-mêmes, la réconciliation avec notre histoire et notre place dans le monde et dans notre nouvelle patrie. Pour aller de l’avant, la réconciliation est nécessaire et signe de notre humanité, avec tout homme de bonne volonté qui a pu être notre adversaire, peut-être même notre ennemi, jusqu’à celui qui, par temps de folie, a tué ou enlevé l’un des nôtres.

Comme dit l’Écriture, jusqu’en éternité, seront reconnus ceux qui ont « traversé la Grande Épreuve » et qui restent signés du Sang de l’Agneau.

Mais il fallait aussi que Lumière soit faite sur ce passé.

Il fallait à tout prix, extraire de l’histoire, nos communautés d’Algérie, du magma idéologique et tragique dans lequel a baigné pendant des décennies, toute l’Afrique du Nord : fin de l’Empire Ottoman (1917), première revendication d’indépendance de l’Algérie en 1926, à Paris, et les 10 000 Algériens assassinés ou disparus, victimes des combats en France entre partisans algériens du pour ou du contre la France (entre 1945 et 1954), proclamation au temps de la « guerre froide » de la Troisième Internationale du Komintern Soviétique, déclarant que toute colonisation, identifiée à l’exploitation « de l’homme par l’homme », était le crime absolu pour les pays qui en bénéficiaient.

Plus profondément, il fallait séparer la guerre de conquête de l’Algérie, guerre hélas semblable à toutes les guerres durant lesquelles assaillants et assaillis commirent des actes irréparables, séparer la guerre de conquête d’avec l’arrivée sur ces terres africaines, des hommes et des femmes les plus pauvres de la Méditerranée. Les Métropolitains eux-mêmes se rendirent compte, lors du l’Exode imposé en 1961-1962, que les descendants de ces premiers arrivés, appelés « Pieds Noirs » n’avaient aucune ressemblance avec les découvreurs conquérants d’Isabelle la Catholique, revenant des Amériques, sur des galions remplis des trophées et d’or. Plus de cent ans de « colonie » n’avaient pas transformé ces hommes et ces femmes en « maîtres d’esclaves », ni en possesseurs de trésors. Ils n’avaient que le souvenir de leurs morts, leurs ancêtres qui n’ont vécu, la plupart d’entre eux, sur cette terre, que les années de leur jeunesse de pionniers et d’ouvreurs d’espaces nouveaux, tant cette terre était ingrate et dure, et depuis des siècles fermée sur elle-même. Leur existence ne dépassait pas trente cinq ans.

Et pourtant que de liens créés, qui ne nous font que regretter cet immense gâchis de cette fausse guerre d’Algérie, durant laquelle les habitants de ce pays ont failli perdre leur âme et le culte héréditaire de la lumière et de terre et de la mer ! Ce fut une histoire achevée par un simulacre de traité de paix entre des communautés qui avaient déjà appris à vivre ensemble, à faire la fête ensemble, et à mourir ensemble.

Et mourir ensemble aussi pour une Patrie, découverte dans la douleur et dans le doute, mais avec quelle loyauté et quelle générosité. Ceux de nos frères algériens qui sont morts et ont souffert pour notre commune patrie ne sont ni des traitres ni des renégats. Ce sont les meilleurs d’entre nous. Car leur route fut plus longue et souvent plus cruelle que la nôtre, combien semée de malheurs. Mais ils sont avec les « Pieds-Noirs », les annonciateurs de temps nouveaux que nous vivons. Avec le retour parmi nous en « terres d’Occident » de nos frères d’Afrique du Nord. C’est avec eux qu’il faudra construire un monde nouveau. Si le chagrin, surgi de l’abandon de leur terre l’Algérie, a fait mourir prématurément, nombre de nos anciens, lors de leur exil en 1962 en France ou ailleurs en Méditerranée, jamais le suicide pratiqué par nos ancêtres les Donatistes n’a traversé le cerveau d’un « Pied-Noir ». Revenus en Europe, les «Pieds-Noirs » se sont remis à la tâche avec un courage et une persévérance qui étonnèrent les Métropolitains. Ceux-ci eurent du mal à reconnaître en ces hommes et ces femmes, ceux ou celles qui « auraient fait suer le burnous » ou auraient humilié l’ « indigène » comme on disait alors. C’est ainsi que certains observateurs de la vie économique de l’Europe n’hésitent pas à signaler, à décrire le rôle et la part non négligeable prise par les Français d’Algérie, dans l’embellie économique et les progrès acquis durant les « Trente Glorieuses » en France.

Nos frères des communautés ecclésiales d’Europe furent étonnés de la ferveur, de la chaleur des chrétiens venus d’Algérie dans l’expression de leur foi et aussi de leur expérience et des difficultés de la Rencontre avec l’Autre.

Mais à une autre échelle ou perspective, cette vie commune de plus d’un siècle, et cette rencontre au niveau de la pensée et du comportement quotidien, qui sont les bases de toute rencontre durable au-delà des cultures, cette première rencontre entre Orient et Occident après les Croisades, dans un tout autre contexte, n’a-t-elle pas semé des germes qui ont lentement mûri pour au moins initier ces mouvements profonds qui bouleversent actuellement, dans un sens positif, nous l’espérons de tour notre cœur, le monde arabo-musulman ?

C’est ce rôle qu’ont joué les chrétiens du Moyen-Orient auprès de leurs compatriotes, lors de la « Renaissance » de ce continent à la fin du 19e siècle.

Et commence à se lever au milieu de nous ce souffle, non pas de l’oubli qui serait une trahison pour notre histoire, commence à se lever au milieu de nous, ce Souffle de l’Esprit, ce souffle de l’Espérance, cet espoir qui purifie, qui dégage des horizons nouveaux pour des routes nouvelles, fi sabil lillah, « sur la voie de Dieu » comme on disait autrefois ?

jeudi 21 février 2013

Le minhistrion Montebourg et l'industrie française vus par un patron américain



 En dépit de moult revers, il a toujours bien belle allure… et le verbe haut, le minhistrion à Flanby !!!

La lettre de Titan à Montebourg

« Les Échos » publient aujourd'hui la copie d'un courrier par lequel le président du groupe américain Titan explique au prétendu "ministre" du Redressement productif pourquoi il jette l'éponge sur la reprise de l'usine Goodyear d'Amiens Nord. Applaudissons au réalisme de cet industriel… et souhaitons que ce courrier connaisse la plus large diffusion en Flanbyland, notamment auprès des syndicats…






Alors que le minhistrion à Flanby dans sa superbe reste bouche cousue, le PDG de Titan, dans un entretien accordé à l'AFP, met délibérément sa pédagogie au service des Français… Espérons qu'il soit compris… seulement un peu !!!

Le patron américain de Titan International, Maurice Taylor, revient auprès de l'AFP sur sa lettre au "ministre" français Arnaud Montebourg, souhaitant vivement qu'au lieu de négocier, le gouvernement "déroule le tapis rouge à tous ceux qui veulent mettre de l'argent dans des entreprises en France".

Maurice Taylor a confirmé mercredi avoir écrit au "ministre" français du redressement productif, qui "n'arrêtait pas de m'envoyer des lettres". "Ses lettres étaient très cordiales et tout, mais les politiciens font partie du problème, ils n'ont aucune idée de rien".

"Je n'écris pas de lettres toutes roses", la lettre à Arnaud Montebourg n'est pas "une lettre à une petite amie, on parle d'affaires", insiste M. Taylor, dont la missive, accueillie avec délectations par la grande majorité des Français, a provoqué auprès des syndicats des réactions effarouchées.

Dans ses missives, le ministre français suppliait le patron du groupe américain de "relancer les négociations", raconte, moqueur, M. Taylor en prenant l'accent français. "Je lui ai dit vous êtes dingue", ajoute-t-il. Il n'y a pas de négociations possibles puisque "nous sommes les seuls au monde à avoir voulu mettre de l'argent dans l'usine".

"Nous sommes ceux qui avons le carnet de chèques et vous nous dites que nous devons d'abord rencontrer les syndicats…  Vous êtes dingue", insiste-t-il.

"Les ouvriers français travaillent bien mais le problème", c'est que "la journée d'un ouvrier français fait sept heures payées mais les ouvriers prennent une heure pour déjeuner et faire des pauses, ils travaillent trois heures, et les trois autres heures ils s'assoient ou se promènent et discutent".

"Quand j'ai dit ça au président du syndicat, il m'a dit, c'est comme ça en France. Je lui ai dit que les ouvriers (de l'usine Goodyear d'Amiens) étaient parmi les plus payés de France, ils ont de très bons salaires et de superbes prestations sociales", confirme-t-il. 

Les ouvriers français, "on ne peut pas les suspendre, on ne peut pas les licencier", déplore-t-il.

"Non seulement vous êtes parmi les plus chers, mais votre gouvernement autorise les Indiens et les Chinois à vendre leurs pneus en France", alors qu'ils sont "subventionnés par leurs gouvernements" et que leur coûts de production sont moins élevés. À l'inverse, regrette-t-il, "les Français n'ont pas le droit de vendre leurs pneus en Chine".

"Les fermiers français veulent un bon rapport qualité-prix pour leurs pneus" agricoles, spécialité de Titan International, et du coup "ils achètent ces pneus" chinois ou indiens.

Goodyear a annoncé fin janvier que l'usine d'Amiens Nord allait fermer, menaçant 1 173 postes. Des négociations entre le groupe et Titan International, un groupe établi dans l'Illinois, au nord des Etats-Unis, ont échoué à l'automne dernier après plusieurs années de discussions.

Arnaud Montebourg "me dit  - on ne sait pas si on veut que vous veniez produire en France, vous devez d'abord parler aux syndicats, je lui dit - mais qu'est-ce que c'est stupide !", raconte-t-il. "Il faudrait dérouler le tapis rouge à toutes les entreprises qui veulent investir de l'argent en France". Et maintenant les ouvriers d'Amiens "vont tous perdre leur emploi, et ils ne seront jamais payés autant qu'ils le voudraient".

"Bientôt, même Michelin ne produira plus de pneus en France parce que c'est trop cher. Aux États-Unis aussi c'est difficile, mais la différence c'est que les ouvriers américains travaillent huit heures, ils ont une heure de pause, on peut compter sur six heures et demi de travail effectif".

"Je reviens d'Australie, j'y ai rencontré de jeunes Français et Espagnols qui y ont déménagé parce qu'il pouvaient y trouver du travail. C'est pour ça qu'en France, bientôt, tout le monde sera assis dans des cafés à boire du vin rouge mais on ne gagnera plus d'argent", conclut M. Taylor.


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Le Wall Street Journal approuve sans réserve le PDG de Titan et dans un éditorial sous-titré "Un PDG américain dit la brutale vérité à l'État français” rappelle que : « M. Taylor a construit Titan à partir de rien, en a fait un important fabricant mondial de pneus pour le matériel agricole. Quand Goodyear a voulu vendre son usine d'Amiens Nord, Titan a été la seule entreprise à faire une offre. Mais l'usine est contrôlée par la CGT, syndicat d'extrême gauche que M. Taylor nomme, non sans raison, le syndicat communiste. »

L'éditorial n'épargne pas le minhistrion du Redressement productif, Arnaud Montebourg : « Pas un mois ne passe sans qu'une nouvelle usine ferme, ou que M. Montebourg ne menace un patron qui menace de fermer une usine, ou bien qu'il supplie un patron (parfois le même) de rester en France ». L'éditorialiste suggère finalement de rebaptiser Arnaud Montebourg « ministre du déclin industriel ».


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Le New York Times titre « Quel Brouhaha ! », en français dans le texte, et considère que la lettre du PDG a « touché au nerf » les Français. « L'inquiétude sur la baisse de la compétitivité et la politique fiscale clivante du gouvernement Hollande ont conduit certains économistes à se demander si la France ne risquait pas de devenir le prochain grand malade d'Europe. » Pour le quotidien new-yorkais, « la semaine de 35 heures, le marché du travail rigide et l'influence des syndicats sur le marché du travail ont longtemps été source d'aggravation des affaires ».

lundi 18 février 2013

Le Ratanakiri aujourd'hui…


Le Petit Futé, pas plus tard que dans son édition de 2004, présentait encore le Ratanakiri comme "le jardin secret du vieux royaume"… Une province qui, il y a encore bien peu de temps, ne pouvait que faire rêver les amoureux d'Asie… Adieu la forêt… Adieu éléphants, ours malais, tigres, sangliers, gaurs, aigles pêcheurs… Le goudron est arrivé… Touristes et ONG s'y ébattent éhontément… Planteurs et exploitants étrangers pillent et détruisent… des destructions irrémédiables… encore bien plus néfastes que les effets des guerres sauvages dont ce coin d'Indochine a aussi subi les ravages…

RATANAKIRI

Province montagneuse située à l’extrême Nord-Est du Cambodge, Ratanakiri est un peu le jardin secret du vieux royaume. Oubliée parce qu'enclavée, elle est quasiment déserte, peuplée pour l’essentiel de tribus proto-indochinoises telles que Kroeung, Tampoun, Jaraï, Brou, Katcha… minorités dont la culture et le mode de vie sont restés pratiquement inchangés depuis la préhistoire. Ratanakiri est une zone de hauts plateaux où alternent jungles et forêts claires. La région est truffée de chutes d’eau, de grottes, de lacs, de mines d’or et de pierres précieuses. L’éléphant y remplace souvent le camion et les animaux sauvages abondent, tels l’ours malais, le tigre, le sanglier, le gaur, l'aigle pêcheur, et toutes sortes d’oiseaux colorés.

Ratanakiri, c'est une nature somptueuse, des paysages grandioses, des cultures authentiques, mais également des pistes défoncées et une poussière rouge qui vous colle à la peau. Pour pleinement goûter un séjour à Ratanakiri, il faut avoir le temps. Les liaisons aériennes sont parfois fluctuantes et un billet de retour n’est pas toujours synonyme de place dans l'avion... Banlung, la « ville rouge », est la capitale de la province. Elle succède en cela à Lomphat qui, située plus au sud, sur la rivière Sré Pok, a été détruite par les bombardements US pendant les années 1970 et n’est plus de nos jours qu’un gros village endormi. Durant toute la saison sèche, un épais nuage de poussière de latérite flotte au-dessus de cette ville du bout du monde, très « western », avec ses grandes rues à angle droit et ses maisons uniformément rouges.

Un vieux chasseur kroeung…  avec en mémoire bien des drames…
Ses longues oreilles percées ont longtemps porté ses trophées de chasse

À l'ombre des anacardiers, un trou noir et étouffant profond de 10 mètres… avec peut-être tout au fond quelques rares tout petits cailloux

Inlassablement, des tas de terre rouge remontée du fond du puits puis filtrée à mains nues dans l'espoir de quelques cailloux dits "précieux"…

Plus d'une semaine de travail pour une bande de tissu qu'un touriste "généreux" paiera à peine 5 dollars…

Les ONG sont passées par là… Un puits, avec une pompe évoquant un linga et une vasque d'écoulement qui pourrait être un yoni…

Du plaisir de faire ostensiblement la charité… Et on se fait copieusement photographier !!!

La distribution faite, certains de recevoir les bénéfices d'une bonne action… encore une belle photo de groupe…
avec ces pauvres enfants sans lesquels cette jubilation orgueilleuse de la compassion ne leur serait pas donnée…

Adieu la forêt… une pépinière d'hévéas qui, avec les anacardiers, bouleverseront les paysages…

À perte de vue ces pépinières d'hévéas… au fond la forêt irrémédiablement condamnée…

Insouciant, il est déjà entré dans un autre monde…

samedi 16 février 2013

Le Journal de Syrie





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