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mercredi 21 mai 2014

Un écrivain et dramaturge algérien au mordant exceptionnel : Mohamed Kacimi









Mohamed Kacimi est né en 1955 à El Hamel, ville des hauts plateaux d’Algérie dans une famille de théologiens. Adolescent, il découvre Rimbaud et les surréalistes. Après des études de littérature française à l’Université d’Alger, l’auteur quitte l’Algérie en 1982 pour s’installer à Paris. Là, il rencontre les poètes Bernard Noël et Eugène Guillevic avec qui il publie plusieurs traductions. En 1987, il publie son premier roman "Le Mouchoir". Deux années plus tard, il co-signe avec Chantal Dagron, "Arabe vous avez dit arabe ?" : un florilège des regards que les écrivains d’Occident ont posé sur le monde arabe et l’Islam.
Lauréat du prix Afaa-Beaumarchais : il écrit "la Confession d’Abraham", éditions Gallimard. Le spectacle est sélectionné pour la clôture des journées Beaumarchais au Studio de la Comédie française et programmé à l'ouverture du théâtre au Rond-Point en septembre 2002. Il a conçu pour la Comédie Française, le spectacle "Présences de Kateb" mis en scène par Marcel Bozonnet en 2002, et assuré l’adaptation du roman "Nedjma" de Kateb Yacine mis en scène au studio de la Comédie française la même année. En 2003, il écrit "Babel taxi", éditions Lansman, mis en scène par Alain Timar à Knoxville, Usa et à Avignon.
Lauréat en 2004 des missions Stendhal, l’auteur a reçu le prix de la Francophonie de la SACD en 2005 et obtenu la bourse année sabbatique du CNL. Sa dernière pièce "Terre sainte" a obtenu la mention du jury du grand prix de littérature dramatique. Elle a été crée à Paris, Hambourg, Stokhlom, Vienne, Minsk, Jérusalem. Des créations sont en cours à New-York, Rio de Janeiro et Helsinky.



شوف شوف         

Un texte de Mohamed Kacimi sur le site chouf-chouf.com


Au lendemain de l’Indépendance, Ferhat Abbas, président de l’assemblée constituante algérienne réunit les dirigeants du FLN pour trouver un nom pour la future République algérienne. Il ouvre la séance :
- Mes frères, je vous propose République Algérienne, tout court, c’est simple, c’est beau.
- Oui, dit Ben Khadda, mais on ne doit pas imiter les Français qui disent : République Française, tout court. Moi je suggère : République, algérienne, démocratique. Car nous allons construire un pays de libertés.
- C’est juste, dit Ahmad Mahsas, mais ça ne suffit pas, il faut préciser que notre démocratie ne sera pas une démocratie bourgeoise, mais populaire, donc je propose République algérienne, démocratique et populaire.
- Ah, non s’écrie, Ben Bella, ça ne suffit pas, vous oubliez l’orientation socialiste, mes frères, il faut dire République algérienne, démocratique, populaire et socialiste.
À ce moment, Aït Ahmed lève la main :
- Mes frères, tout cela est bien, République algérienne démocratique populaire et socialiste, je suis d’accord, mais pour signifier au monde que notre pays ne ressemble à aucun autre au monde, je propose qu’on dise : République algérienne, démocratique, populaire, socialiste, magnifique et fantastique…

Ce dictionnaire tente d’expliquer ce qu’il y a de magnifique et de fantastique dans l’Algérie d’aujourd’hui.

ALLEMAGNE : Puissance européenne invincible, battue par l’Algérie, lors de la coupe du monde d’Espagne, le 16 juin 1982, à Gijon, devant 42 000 spectateurs, au score de 2 buts à 1. Buts : Madjer à la 53ème mn, Belloumi à la 68ème mn pour l’Algérie. Rummenigge à la 67ème mn pour la RFA. Ce match historique est très souvent diffusé comme du direct par la chaîne nationale.

AMOUR : Affection bénigne ou chronique qui affecte la virilité de l’homme et détruit la réputation de la femme. Être amoureux est considéré comme un renoncement à la toute puissance phallique et abaisse l’homme à un rapport d’égalité et d’échange avec la femme. L’homme amoureux est de facto considéré comme "efféminé" et la femme comme "pute". La passion amoureuse se vit comme une entrée dans la clandestinité. L’adage populaire dit : "Si tu veux écouter ton cœur, tu n’as qu’à prendre le maquis".

ÂNEGÉRIE : Surnom affectueux donné par les anciens immigrés kabyles à leur pays.

ARABISATION : Maladie dégénérative dépistée depuis l’indépendance. Elle se caractérise par une atrophie, diminution du volume, des lobes frontaux du cerveau. Elle se manifeste également par des troubles de langage et des confusions dans l’expression. Un sujet atteint par cette pathologie désignera, par exemple, les pauvres sous le nom de "fakakir" au lieu de "foukara".

ARBRE : Plante terrestre capable de se développer par elle-même en hauteur. L’espèce est réputée donner l’urticaire aux citoyens, aux municipalités, aux entrepreneurs. Classé par les autorités, comme maladie endémique, à l’instar du paludisme, l’arbre fait l’objet d’un plan national d’éradication confié aux firmes chinoises.

ARCHITECTURE ALGÉRIENNE : Trois garages en bas, un appartement en haut, un balcon, où il est interdit de mettre les pieds, et un toit hérissé de fer torsadé, sans concéder le moindre centimètre à une fleur. Les règles de l’art locales exigent que le maître d’œuvre s’engage à ne jamais achever l’édifice en question. Cette école architecturale, d’avant-garde, qui se distingue par des façades de briques nues, des piliers apparents, et des fourches sur les terrasses, a pour nom "l'inaccomplisme".

AURASSI : Traces d’un attentat commis en 1975 contre l’architecture d’Alger par des terroristes bulgares commandés par un architecte italien.

AUTOROUTE : Voie de circulation rapide ou expresse qu’empruntent les responsables pressés d’ouvrir un compte à Genève ou d’acquérir un pied-à-terre à Neuilly-sur-Seine.

BANANE : fruit exotique, prohibé, on ne sait pour quelles raisons, durant tout le règne de Boumediene. À sa mort en 1978, Chadli lève cette interdiction et en inonde le pays. Cette décision marque un tournant dans l’histoire de l’Algérie contemporaine. Les historiens distinguent désormais la période avant la banane et celle après la banane.

BARREAUDAGE : Du verbe algérien barreauder, né durant les années noires. Action de condamner toutes les issues d’un appartement ou d’un local avec de lourdes grilles en fer forgé et de remplacer les portes en bois par des plaques en acier pour empêcher l’irruption de terroristes. La paix revenue, le barreaudage continue, on le voit souvent aux fenêtres d’appartements situés au douzième étage, sans ascenseur.

BELEMOU : Musicien de génie, né en 1947 à Aïn Témouchent. Initiateur du raï moderne qu’il a porté à des sommets rares de la subversion avant que le raï ne soit converti en chants de Omra par Khaled et Mami.

BEN ALI, ZINE EL ABIDINE : Homme d’État tunisien, président de la République du 7 novembre 1987 au 14 janvier 2011. En maintenant les Tunisiens sous une chape de plomb durant dix-sept ans, Ben Ali a permis à des millions d’Algériens d’aller boire et danser librement et durant dix-sept ans à Hammamet. Il est considéré comme un héros national en Algérie où il a laissé un grand vide.

BEN BADIS : Newton algérien qui a découvert par hasard que le peuple algérien était musulman et arabe.

BEN BELLA : Footballeur né Maghnia en 1916. Il entre dans l’histoire avec un hold-up raté. Passionné de foot, il signe à l’OM où il ne joue qu’un match dans sa vie. Dépité, il s’engage dans l’armée française et reçoit un obus entre les jambes à Monte Cassino. Il rejoint le FLN en 1954 et passe la guerre au château d’Aunoy. En 1962, l’armée en fait le premier président de l’Algérie. Pour lutter contre le sous-développement, il enferme les gamins cireurs et dépouille toutes les femmes de leurs bijoux. Boumediene le renverse en 1965. Libéré par Chadli, il s’exile à Genève. Déçu de ne pouvoir reprendre le pouvoir à Alger, il s’installe, avec armes et bagages au Crillon, à quelques pas de l’Élysée, on ne sait jamais. Il y meurt de vieillesse en racontant en boucle l’unique match de sa vie à l’Olympique Marseille.

BENBOUZID : Ministre de l’Éducation nationale, depuis la nuit des temps, auteur d’une méthode pédagogique révolutionnaire, le "bouzidisme". Cette méthode libère les enfants des pénibles corvées de l’apprentissage de l’écriture et du calcul en confiant simplement leur sort au bon Dieu.

BLED MIKI : Les Chinois utilisent "l’Empire du Milieu" pour désigner leur pays, les Libanais disent le "pays des cèdres" pour le Liban, les Japonais "le pays du soleil levant", le Lesotho dit "le royaume dans les nuages", mais les Algériens appellent leur pays "Bled Miki". Le Pays de Mickey est la périphrase qui désigne l’Algérie et que depuis l’indépendance la vie de ses habitants est un long comic-streep.

BLIDA : Territoire occupé par l’Armée nationale populaire.

BOUMEDIENNE : Tonton flingueur. De son vrai nom, Mohamed Boukharouba, né en 1932 à Guelma. Après des études à la Zitouna et à Al Azhar, il rejoint le FLN en participant à l’aventure désastreuse du détournement du Dina. Il signe de sa propre main l’arrêt de mort de Abane Ramdhane. En 1962, il dirige le coup de force de l’armée des frontières contre les politiques. Il renverse Ben Bella en 1965, en réprimant dans le sang l’opposition. Détenant tous les pouvoirs, il va gouverner le pays selon ses humeurs et sur des coups de tête : il fait arracher, en une nuit, tout le vignoble du pays pour "punir la France". Il arabise en vingt-quatre heures tous les lycées, les collèges et même l’environnement. Il lance les premiers instituts islamiques qui seront les véritables pépinières de l’islamisme. Il décrète que l’Algérie est un pays riche qui n’a besoin de rien et interdit toute importation. Comme le pays ne produisait absolument rien, il va vivre durant treize années une pénurie générale. Son règne est marqué par l’anéantissement de l’agriculture et le développement spectaculaire de la Sécurité Militaire. Boumediene, surnommé "le colonel qui tire plus vite que son ombre" s’est distingué par les liquidations physiques de ses opposants, tels Krim Belkacem, Khider ou Medegheri. Il meurt en 1978, probablement empoisonné par les siens.

BOUTEFLIKA : Président éternel, réputé pour son amour de l’imparfait du subjonctif. Né en 1937 à Oujda au Maroc. Il bat deux records, celui du plus jeune ministre de la planète au 20ème siècle et celui du plus vieux chef d’État au 21ème siècle. Ministre de Boumediene, il quitte l’Algérie à la mort de ce dernier pour s’installer en Suisse. Il rentre en Algérie pour se faire élire à la tête de l’État. Pour ramener la paix, l’homme, sort son chéquier et demande à tout le pays de fermer les yeux sur les 200 000 victimes du terrorisme islamiste. Profitant de la hausse du pétrole, il achète, rubis sur ongle, des métros, des autoroutes, des journaux, des voitures, des islamistes à gogo et une grande partie de l’opposition. Malade, il transfère le centre du pouvoir à l’hôpital du Val de Grâce à Paris, comme DeGaulle quand il avait fait d’Alger la capitale de la France en 1943. L’homme qui dit dépasser Napoléon de 3 centimètres, n’a pas fait la Russie, ni la campagne d’Égypte, ni Iéna, ni Austerlitz, mais il a transporté gratuitement des milliers d’Algériens à Khartoum où ils ont assisté au triomphe de leur équipe de foot face à l’Égypte. Depuis ce miracle, le pays entier prie pour qu’il survive à l’Algérie.

CAFÉ : Espace lacanien conçu pour faire croire à l’Algérien que la femme n’existe pas.

CASBAH : Cœur et quartier historique d’Alger. Édifiée au dixième siècle, la Casbah a résisté à tous les assauts… Elle est soumise en 1510 par les Espagnols, et de nouveau assiégée par eux en 1516 et 1518. Elle est plusieurs fois bombardée sous la Régence par la marine royale française, notamment en 1682. En 1770, une expédition danoise bombarde à son tour Alger. En 1801, elle est également attaquée par l’US Navy. En 1816, elle est bombardée par une flotte anglo-hollandaise. En 1830, elle subit les feux des navires de guerre de Charles X. Le site résiste à 130 ans d’occupation française et subit de nouveau les raids de la Luftwaffe en 1943, avant d’être occupé par les bataillons de Massu et de Bigeard en 1958. Si ces cinq siècles de guerres n’ont pas eu raison de la Casbah, l’administration algérienne, elle, va réussir en quelques années à réduire le site en ruines et poussière.

CHADLI : Troisième président algérien. Surnommé "l'homme qui comptait jusqu’à douze", car au-delà du double six des dominos, son jeu favori, il ne savait pas, disait-on, compter. Chadli Bendjedid, devenu président par hasard à la mort de Boumediene, laisse un bilan faste : des blagues par milliers, la suppression de l’autorisation de sortie, le faux pluralisme, les élections ratées et surtout la réhabilitation de la banane.

CHAÎNE : Sport collectif national, inventé par Boumediene. Sous son ère, glorieuse, chaque citoyen était tenu de faire la chaîne pour tout : acheter du pain, prendre un bus, retirer un passeport, fumer une cigarette, voir le jour ou rendre l’âme.

CHAMA : Cigarette botanique.

CHARIA : Mode d’emploi de la vie qui date du neuvième siècle, et qu’il faut suivre à la lettre pour être de son temps.

CHINOIS : Plombier polonais des Algériens, le Chinois est considéré comme un sale immigré qui vient piquer le sale travail que l’Algérien ne veut pas faire car il tient à rester très propre.

CHKOUPI : Signifie "foutaise", "daube". Vient de l’expression des marins quand ils tirent des filets vides remplis d’algues et d’écume, "chkoupi" ou "rghaoui". L’expression a fini par désigner le n’importe quoi. L’art national qui consiste à faire les choses de travers s’appelle le chkoupisme.

CHRÉA : Station de ski à la retraite. Autrefois, et selon la mythologie algérienne, marque de chemises qui se vendaient à New York plus cher que les YSL.

CHRÉTIENS : 2,355 milliards d’individus qui vivent dans la mauvaise foi totale et font semblant d’ignorer que la seule religion qui détienne la vérité : c’est l’Islam. C’était d’ailleurs écrit dans les Évangiles mais le passage a été effacé. Les Chrétiens sont appelés "adorateurs des planches", ils prient un Dieu fait du même bois que les cageots, ils boivent du vin au lieu de la gazouz. Tous les Chrétiens ont des maîtresses, mais ils hurlent quand un musulman prend plusieurs femmes. La preuve que les chrétiens n’aiment pas assez Dieu c’est qu’ils ne font la prière qu’une fois par semaine, et là, ils sont très loin du compte pour gagner le Paradis.

CINÉMA ALGÉRIEN : Drôle de fiction.

CLUB DES PINS : Réserve naturelle où vivent en liberté les espèces protégées du pays.

COLONIALISME : Catastrophe historique ancienne qui sert à faire pardonner toutes les calamités du présent et même du futur.

COMBREMENT : Nom, féminin singulier, désigne en algérien, un embouteillage. Au pluriel on dit "les combrements".

CONCORDE CIVILE : Semblant d’amnésie générale.

CONSTANTINE : Une des plus anciennes cités du monde. De son ancien nom Cirta, capitale de la Numidie, Constantine est également surnommée la "ville des ponts suspendus". Promise à devenir – peut-être – la capitale arabe de la culture en 2015, la "cité des aigles" qui tombe en ruines à vue d’œil, deviendra sûrement la capitale mondiale de la dépression nerveuse.

CORAN : Livre de Dieu qui contient tout : les dernières données de cosmologie, de physique quantique, d’astrophysique nucléaire, d’embryogenèse, d’organogenèse, de paléontologie systématique, de biologie moléculaire, de granulométrie, d’astrophysique et de planétologie… On se demande alors pourquoi les prix Nobel de sciences ne tombent pas directement sur les minarets de Baraki.

CRÉDIT : Désigne généralement les sommes faramineuses que les Banques d’État attribuent à certains citoyens porteurs de projets ou pas, à condition qu’ils s’engagent à ne jamais le rembourser.

CYBER CAFÉ : Le visa des pauvres.

DÉGOUTAGE : Expression qui désigne l’ambiance générale qui règne dans le pays. Ce substantif désigne essentiellement le mal être collectif. "Nous sommes tués par le dégoutage".

DEZ MAAHOUM : Devise officielle de la République algérienne démocratique et populaire. Inspirée du "Honni soit qui mal y pense" britannique, le "Dez Maahoum", plus explicite, signifie en algérien "Qu’il aille se faire foutre celui qui pense du mal de nous".

DRAGUE : Art de détester publiquement la femme qu’on désire. Un jeune Algérien aborde une fille dans ses termes : "Bonjour, la vieille", "Salut, la moche", "Alors, c’est pour quand les funérailles ?", "Va te cacher, va !". Parfois l’approche est plus subtile "Dieu qui t’a donné tant de beauté, peut bien te donner mon portable, le voici".

DRIASSA : Artiste peintre, compositeur et surtout interprète algérien de la musique populaire, du Hawzi et du Sahraoui, né à Blida en 1934. Devenu célèbre pour ses talents de serrurier sous le règne de Boumediene.

ÉBOUEURS : Catégorie de fonctionnaires qui estiment qu’ils ne sont pas payés pour ramasser la merde des autres.

EL JAZIRA : Chaîne de production d’islamistes, ou unité de production d’islamiste à la chaîne.

EMBOUTEILLAGE : Phénomène quotidien de blocage de la circulation, qui affecte douars, villages et villes du pays et qui est provoqué par des regroupements de conducteurs désœuvrés qui prennent leur voiture parce qu’ils ne savent pas quoi faire ni où aller.

FACEBOOK : Téléphone arabe qui prend même des photos de filles.

FEMME : Pathologie lourde, la femme suscite, de par sa seule présence, les symptômes suivants auprès des mâles : violentes céphalées, humeur dysphorique ou dépressive, insomnie, irritabilité, frustration ou colère ; anxiété ; difficultés de concentration ; agitation ; diminution de la fréquence cardiaque, pulsions criminelles et suicidaires, vomissement, convulsions, contractions musculaires involontaires, coordination anormale, hyperkinésie, amnésie, hypoesthésie, troubles du langage, vertiges orthostatiques, migraine, troubles de la libido et éjaculation précoce.

FIS : Association de malfaiteurs, dissoute. Ses responsables sont accusés de braquage du Coran et de détournement de Dieu.

FLEXER : Verbe algérien. Il désigne l’action de transférer entre particuliers des crédits pour le téléphone portable. Le néologisme signifie, par extension, toute opération de transfert ou d’échange. Ainsi un dragueur peut dire à une jeune fille : "tu me flexes ton cœur ?".

FLN : Gang de proxénètes, croulants, moustachus et ventripotents qui font travailler l’Algérie depuis 1962, au son de la derbouka.

FRANÇAIS : Langue étrangère, autrefois très répandue, menacée de disparition par le "bouzidisme" depuis qu’elle est enseignée dès l’école primaire.

FRANCE : Puissance étrangère avec laquelle l’Algérien est dans une relation compliquée au sens facebookien. La France est maudite, quand on pense qu’elle a colonisé l’Algérie. Elle est sympathique, si elle donne un visa. Elle est magnifique quand elle accorde un certificat de résidence. Elle est paradisiaque quand elle offre la nationalité.

GOOGLE : Moteur américain qui, seul, permet à l’Algérien de partir, en cachette, à la recherche du sexe et de l’amour et parfois de les trouver, en catimini.

HAJJ : Station de lavage dégraissage. Un lavage express s’appelle Omra.

HALLAL ou HARAM : Catégories de pensée religieuse qui régissent désormais le comportement de chaque individu. Chaque acte, chaque comportement, chaque produit doit être jugé selon cette grille binaire : est-ce licite ou illicite ? Ce comportement obsessionnel est connu en médecine sous le nom de TOC, troubles obsessionnels compulsifs qui sont des comportements répétitifs et irraisonnés mais irrépressibles. Les obsessions typiques sont la propreté, les germes et la contamination, la pureté, la peur de commettre des actes délictueux. Il s’agit d’une véritable maladie, très handicapante au quotidien, pouvant même empêcher une vie sociale ou professionnelle normale.

HARRAGAS : Aficionados du Grand Bleu qui estiment qu’il fait mieux vivre dans le ventre d’un requin bleu qu’en Algérie.

HÉRITAGE COLONIAL : Le colonialisme a légué à l’Algérie deux catastrophes dont elle a du mal à se remettre : Étienne Dinet pour la peinture et Enrico Macias pour la musique.

HIJAB ou NIQAB : Impôt de capitation, ou taxe de douane que les femmes et les filles acquittent obligatoirement en voiles et tissus afin de pouvoir accéder à l’espace public.

HÔPITAUX : Pompes funèbres.

HÔTELS : Établissements improbables où l’on peut louer des chambres meublées au bonheur la chance, à tarif journalier, pour passer, à coup sûr, des nuits blanches.

HOURIS : Loto orgiaque et islamique.

IBN ARABI : Philosophe andalou, né à Murcie en 1165, mort à Damas en 1240. L’auteur de "l’interprète des désirs" a été tellement mis à toutes les sauces qu’il représente aujourd’hui un islam new age qui allie merveilleusement Coran et cannabis.

INTERNET : Réseau informatique mondial constitué d’un ensemble de réseaux nationaux, régionaux et privés. L’ensemble utilise un même protocole de communication : TCP/IP, (Transmission Control Protocol / Internet Protocol), mais qui en Algérie se dit TéléChkouPi. (voir ce mot.)

JUIFS : Peuple inconnu, fantasmatique, redoutable et redouté mais aux vertus thérapeutiques miraculeuses. Quand un Arabe ou un musulman souffre d’un problème quelconque de cœur, d’argent, de santé ou de politique, il suffit qu’il en attribue la cause aux Juifs pour retrouver aussitôt amour, richesse, santé et liberté.

KABYLIE : Terre de montagnes densément peuplées, la Kabylie est entourée de plaines littorales à l’ouest et à l’est, au nord par la Méditerranée et au sud par les Hauts Plateaux. La Kabylie est peuplée d’indigènes qui font exprès de parler une langue clandestine, le tamazight. Le pays est réputé pour ses oliviers centenaires, ses grenades lacrymogènes, sa musique envoutante, ses balles réelles, son huile d’olive vierge et ses compagnies nationales de sécurité.

KATEB YACINE : Auteur formidable d’un roman magnifique Nedjma que personne n’a lu.

KHARTOUM : Capitale du Soudan, réputée comme l’un des endroits les plus sinistres de la terre, mais où le peuple algérien a connu le bonheur, lors du match Algérie-Égypte, pour la première et dernière fois de sa vie.

KHOROTO : Signifie littéralement "bluffeur" ou "bon à rien", sobriquet donné par les Algériens aux Algériens, "bande de khoroto", "sale khorotos", "y a khi khoroto", "quel khoroto". Bien entendu toute personne qui utilise cette injure ne se considère pas comme tel.

LA MEILLEUSE : Adjectif qualificatif algérien. Néologisme inventé pour corriger l’aberration grammaticale de la langue française, un veilleur, une veilleuse, un tueur, une tueuse. La meilleuse est utilisé essentiellement dans cette expression : "Tu connais la meilleuse ?"

MAROC : Royaume limitrophe géographiquement de l’Algérie, mais situé à ses antipodes dans la réalité. Le pays compte 32 millions d’habitants dont l’activité principale consiste à baiser la main du Roi et à fumer du kif. Le royaume tire ses principales ressources de la vente des charmes de ses garçons et filles aux touristes occidentaux de Marrakech.

MARSEILLE : 9.3 d’Alger.

MASRI : Égyptien, péjoratif. Nationalité donnée d’office à tout arabe du proche, du moyen ou de l’Extrême Orient.

MÉDÉA : Chef-lieu de Wilaya, situé à 80 kilomètres au sud-ouest d’Alger, la ville, peuplée de 130 000 habitants, est célèbre pour ses singes, sa mosquée et ses égorgeurs.

MÉTRO : Moyen de transport moderne placé sous l’égide du FLN. La devise de la régie de transport algérois est : "À parti unique, ligne unique".

MITIDJA : Vaste plaine sublittorale de 1 300 kilomètres carrés, la Mitidja est bordée au nord par les basses collines du Sahel, plus basses encore à l’est d’Alger, et limitée au sud par la haute chaîne du Tell. La Mitidja est célèbre pour ses terres fertiles, on y pratique la culture intensive de briques à neuf trous, du fer à béton, rond torsadé, de tuiles rondes et d’autoroutes équipées de ralentisseurs.

MOSQUÉE : Centre de loisirs. L’Algérie est le pays qui possède le plus grand nombre de mosquées, parmi les pays arabes et musulmans, avec 15 000 mosquées opérationnelles. Elles regroupent 14 millions de fidèles chaque vendredi. Cela équivaut à l’ouverture, en moyenne, de six mosquées par semaine depuis l’indépendance.

MUÉZINS : Seules personnes à accomplir leur travail en respectant les horaires à la seconde près.



"À poil ! à poil… qu'est-ce qu'on va baiser !"
Texte original en arabe de Dalia Taha, palestinienne née à Berlin en 1986… traduction en français par Mohamed Kacimi
interprété par Meryem Zaïmi et Faissal Oberon Azizi, au Théâtre Mohammed V de Rabat

NIQUER : L’expression, loin de désigner le seul acte de copulation, désigne en fait tout acte par lequel l’Algérien acquiert, possède ou jouit d’une chose ou d’une personne : on dit "un tel a niqué une belle villa", "niqué une voiture", "niqué une belle situation", "niqué un beau plongeon", et même "niqué une belle cravate".

NORMAL : Expression algérienne très courante pour désigner ou qualifier l’ensemble des comportements, situations illogiques, aberrants et parfois démentiels que chacun connaît dans la vie de tous les jours. Ainsi on dit : "La police a tiré sur nous, normal". "La fille est sortie de chez elle, il l’a violée, normal". "Le type n’aimait plus sa femme, il l’a égorgée, normal". Normal est une antiphrase qui désigne un dérèglement collectif, pas normal ou normal.

OCTOBRE 88 : On désigne par le nom d’Octobre 88, un ensemble de mouvements et manifestations de jeunes survenus à Alger et marqués par une violente répression policière. C’est au lendemain de ces évènements que le FLN, parti unique alors, a pris la décision de se multiplier par parthénogenèse, donnant naissance à 62 partis.

OFFICIEL : Le rasmi, c’est la vérité que chaque algérien jure détenir de la bouche même du prince. On dit : "je te donne l’officiel" c’est à dire je te livre un secret d’État ou une vérité absolue. L’expression s’applique aux situations les plus complexes comme les plus banales : "Je te donne l’officiel, le café est sucré".

PALESTINE : Cause dont tout le monde se fout royalement, mais pour laquelle chacun se dit prêt à mourir, juste pour emmerder les juifs.

PARADIS : Plan épargne pour logement haut standing.

PARKINGUEUR : Emploi fictif. Métier exercé dans les villes algériennes par des jeunes chômeurs qui se font payer quand ils indiquent à un automobiliste une place libre dans le quartier.

PAYSAGE : Le paysage algérien se compose de 57% de constructions anarchiques, de 3% de nature en voie d’extinction et de 40% d’ordures en pleine expansion.

PÉTROLE : Ressource naturelle qui fait le bonheur du régime et cause tous les malheurs du pays.

PLAGE : Bain maure, réservé aux hommes.

POLISARIO : Mouvement de libération nationale que l’Algérie soutient, sans fléchir, juste pour empêcher le roi du Maroc de dormir.

POUTINE, Vladimir Vladimirovitch : né le 7 octobre 1952 à Leningrad, est un homme d’État russe, président de la Fédération de Russie. "Un homme, un vrai, comme on en fait plus". Chaque Algérien prie Dieu pour qu’il lui donne longue vie et surtout qu’il lui donne la possibilité et la force de ressusciter la divine URSS qui défendait la veuve et l’orphelin, l’arabe et le musulman et faisait surtout la joie de tous les croyants en donnant des sueurs froides à ces couillons d’Occidentaux.

PRESSE : En Algérie, tous les journaux sont entièrement libres de vivre exclusivement de l’aide que leur apporte l’État.

PRIÈRES : Principale ressource spirituelle du pays dont le volume de production est en progression constante. Si la production pétrolière du pays menace d’épuisement, et risque de le priver de toutes ressources, sa production considérable de prières lui assure une confortable éternité.

PRINTEMPS ARABE : Complot américano-sioniste, soutenu par le Qatar et visant à libérer les peuples arabes de la dictature. Cependant, comme les Algériens sont un peuple plus intelligent que tous les autres, et plus nationaliste, ils ont décliné ce printemps arabe importé de l’étranger, pour se contenter de leur propre dictature.

QALBALOUZ : Pâtisserie nationale algérienne, dite "cœur de l’amande", faite de semoule et de sucre, mais en dépit de toutes les analyses on n’y a jamais décelé la moindre trace d’amandes.

RAI : Musique née dans les bas-fonds de l’Oranie, morte d’une overdose de danse du ventre dans les salons parisiens.

RÉFLÉCHIR : Acte délictueux, et répréhensible, susceptible de menacer la paix sociale, surtout qu’il peut entraîner un individu à s’abîmer dans ses pensées. "Ma tkhamamch", "ne réfléchis surtout pas". C’est l’injonction que les Algériens se donnent les uns aux autres à chaque fois que quelqu’un se trouve confronté à un problème. Réfléchir peut avoir de lourdes conséquences : résoudre le problème et là ce ne serait plus "normal".

RIAD EL FETH : Monument en béton armé, sur les hauteurs d’Alger, dessiné en forme d’épluchure de banane. Il commémore l’avènement de la banane sous le règne de Chadli.

SAHARA : Territoire inconnu dont le pétrole fait vivre tous les algériens, et où aucun algérien ne voudrait vivre pour tout l’or du monde.

SEXE : Application impossible qui bouffe tout le disque dur de chaque algérien.

SOUFISME : Islam bio, inventé pour les touristes amoureux de Marrakech, Formentera et Grenade qui ont le cœur sensible et l’estomac fragile. Ce mouvement spirituel a deux maîtres à penser, le philosophe, baba-cool, Ibn Arabi et les Pink Floyd.

SOUK EL FELLAH : Chaîne de grandes surfaces créées au temps du socialisme et qui avait pour mission de vendre la pénurie aux consommateurs.

STADES : Ultime espace public où un citoyen peut crier à tue-tête : "One Two Three, viva l’Algérie", sans être pris pour un fou. Cependant cette inconscience a des limites, elle dure 90 minutes chrono.

SUBSAHARIENS : Réfugiés, maliens, tchadiens ou sénégalais qui échouent en Algérie dans l’espoir de rejoindre l’Espagne. Qualifiés de "négros", "d’esclaves", de "kahlouch", les Noirs d’Afrique qui découvrent l’Algérie disent regretter amèrement le Klux Klux Klan et les champs de coton du Tennessee avant l’avènement de Lincoln.

TAMANRASSET : Ville du sud algérien, située à 1900 km au sud d’Alger et qui n’existe que dans le journal télévisé le jour de l’Aïd.

TARAWIH : Prières surérogatoires qui représentent les uniques heures supplémentaires effectuées par les Algériens.

TÉLÉVISION : Bunker soviétique, la chaîne nationale, l’ENTV (ex-RTA), est appelée "l’Unique" ou "l’Orpheline" ou "l’Inévitable", elle émet dans le vide depuis que les millions d’Algériens regardent les chaînes satellitaires. Selon ses responsables, l’Unique n’évoque les problèmes que lorsqu’ils sont résolus.

THÉÂTRE : Art dramatique qui consiste à aligner ou à disposer en demi-cercle plusieurs comédiens qui balancent un texte face au public. On peut éventuellement enrichir la mise en scène en plaçant un bendir, côté cour ou jardin.

TIMGAD : Cité antique, romaine, dans l’Est algérien, fondée par l’empereur Trajan en 100. Le site a été classé patrimoine mondial par l’UNESCO. Pour fêter cet évènement, les autorités l’ont équipé récemment d’un immense théâtre en béton qu’elles ont attribué à l’empereur Trajan.

TUNISIE : Pays dont la superficie est inférieure à celle de la Wilaya de M’sila qui produit essentiellement des beignets et de l’harissa et qui ne se chauffe et s’éclaire que grâce au gaz algérien. La Tunisie était un pays magnifique, propre et sûr au temps de Ben Ali. Chaque année deux millions d’Algériens y allaient pour goûter la liberté. Cependant, les Tunisiens, au lieu de retenir la leçon algérienne, ont provoqué des élections démocratiques qui ont donné, bien sûr, le pouvoir aux Islamistes. Depuis 38 millions d’Algériens suivent avec attention ce qui se passe dans le pays frère, et à chaque fois que leurs voisins sont confrontés à un problème, ils leur crient : "Chah fikoum", "bien fait pour votre gueule".

UNIVERSITÉS : Établissements publics où exercent des armées d’enseignants qui ne savent rien et qui ont la flemme d’enseigner quoi que ce soit à des bataillons d’étudiants qui ne veulent rien savoir.

VENDREDI : Couvre-feu islamique. Jour où chaque algérien ne fait pratiquement rien, car il a passé la semaine à se crever à ne presque rien faire.

VISA : Potion magique, très recherchée, elle est réputée faire oublier à chaque Algérien et à jamais le chemin du retour vers l’Algérie.

YASMINA KHADRA : Miliaire de carrière et auteur prolixe de polars, célèbre pour ses titres romantiques et lyriques : "Les portes n’attendent rien des fenêtres", "Jamais la pizza n’aura de larmes pour la mayonnaise", "Ce que les frites doivent aux merguez". Yasmina Khadra est considéré par Amazone comme le Céline Dion de la littérature maghrébine.

ZAOUIAS : Établissements religieux très anciens, animés par Radio Nostalgie.

ZATLA : Drogue, cannabis, substance prohibée que les malheureux Algériens sont obligés de consommer, sans modération, parce que les salauds de Marocains la leur vendent en quantité et pour pas cher.

ZIDANE : Joueur de foot, algérien, kabyle originaire du village d’Aguemoune Ath Slimane. Il est entré dans l’histoire pour avoir fait sortir la France de l’anonymat.

ZKARA : Mot d’origine berbère : zkara ; zekroun ; verrou : quelque chose qui bloque, obstacle. La Zkara est un mode de pensée, ou plutôt un trait de caractère qui définit l’homo-algerianus. La Zkara est l’art et la manière de se faire du mal, de se mettre en péril pour le plaisir de nuire à son prochain. Exemple de Zkara… Dans tous les pays du monde si un conducteur est furieux contre la contravention que vient de lui poser un flic sur le pare-brise, il peut prendre le papier, le déchirer et le jeter par terre. En Algérie, les règles ancestrales de la Zkara exigent une autre réponse : le conducteur regarde le policier, calmement il siphonne son réservoir, il arrose le pare brise de sa BMW à 30 000 euros d’essence, il prend son briquet, il allume une cigarette qu’il jette sur le pare-brise. Et pendant que la BMW flambe il propose une cigarette au policier, normal !


Sur chouf-chouf.com, un autre texte de Mohamed Kacimi à propos d'Alger aujourd'hui… Tout aussi intéressantes les réactions à cet article…

L’incroyable et inimaginable histoire d’un homme qui voulait prendre une bière à Alger

Réponse de l’auteur de l’homme qui voulait prendre une bière à Alger

Mohamed Kacimi - Bouteflika réélu : l’Algérie ou le cadavre encerclé

Facebook : Mohamed Kacimi

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Sites de rencontres musulmans

Le business de l’amour « halal »

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Meet arabic, Inchallah, Mektoube, Lehlal ou muslima.com, des sites aujourd’hui très fréquentés sur le Net par des âmes seules cherchant le prince charmant pour peu qu’il soit musulman. Très islamisés, ces sites donnent le ton sur la recherche typifiée de l’autre : le respect, la religion et les valeurs ethniques communes. Sollicités dans tout le Maghreb, ces réseaux de rencontres prisés donnent de l’espoir à de nombreux célibataires des deux sexes.

Les sites de rencontres pour les musulmans connaissent un grand succès sur le Net. De nombreux Algériens et Algériennes se sont laissés tenter, espérant trouver, si Dieu le veut, l’âme sœur sur la Toile. « Vous êtes musulman et vous recherchez un musulman ou une musulmane pour un mariage musulman… » Là, au moins, il n’est pas possible de s’y tromper : la récurrence des mots « islam », « valeurs » et « traditions » sont suffisamment distillées dans les pages du site Meetarabic pour attirer des jeunes qui cherchent l’âme sœur sans offenser leurs principes.
Les sites de rencontres à consonance maghrébine font florès sur le Net. Ils portent des noms tels que Inchallah, Mektoube, Lehlal, muslima.com, meetarabic.Le design est moderne et le discours est simple : tous promettent aux célibataires maghrébins de leur faire rencontrer la perle rare afin de « partager » leur vie dans « le respect, la religion et des valeurs ethniques communes ».

« Valeurs communes »

« Sur les autres sites, on ne trouve pas les profils recherchés, il y a beaucoup de plaisantins. Là au moins il y a des gens sérieux, des Algériens et des Maghrébins avec lesquels nous avons beaucoup de choses en commun », nous explique Naïma, 27 ans et célibataire. Inscrite au site Inchallah depuis près de deux mois, elle n’y a pas encore trouvé l’amour. « Je ne désespère pas », dit-elle dans un grand sourire.
C’est que dans ce genre de sites, il est d’usage de mentionner ses préférences, ses hobbies, mais aussi son rapport à la religion. Certains sites de rencontres, à l’exemple de e-moqabala, (qui devra être mis en ligne très bientôt), soumettent un questionnaire à leurs inscrits pour savoir s’ils auraient recours à l’usure, à la zakat, ou s’ils ont déjà consommé un verre d’alcool. Le visage encadré par un foulard bariolé, la jeune assistante de direction nous confie : « Je ne m’imagine pas épouser un homme qui ne fait pas la prière, c’est mon principal critère de sélection. » Les sites de rencontres dits musulmans prennent ainsi le soin de confectionner des slogans sur mesure. Celui de Lehlel.com proclame qu’il s’agit d’un site réservé aux « relations sérieuses et halal ».
« Notre volonté première, dit Rachid Dhimane, gérant de Lehlel.com, est de permettre à des personnes de faire des rencontres, et ce, dans le respect de valeurs communes. Effectivement, la religion fait partie des critères de certains inscrits et notre équipe d’administrateurs veille au quotidien à ce que certaines règles et bonnes mœurs soient strictement respectées. Ainsi, toutes les annonces et photos sont visionnées une par une avant d’être publiées. En cas d’annonces suspectes ou de photos douteuses, lehlel.com se réserve le droit de refuser l’inscription. »
L’idée de créer un site communautaire dédié à la recherche de l’âme sœur lui est venue à l’observation de son entourage. « Je me suis rendu compte, souligne-t-il, que l’on était loin de l’époque de nos parents où l’on pouvait rencontrer son mari ou sa femme à 18 ans, échanger quelques mots et se marier dans les mois qui suivent. Aujourd’hui, les personnes de ma tranche d’âge, les 25-35 ans, finissent leurs études de plus en plus tard, pensent davantage à leurs loisirs, à s’amuser, à voyager. Ils ne pensent pas à rencontrer sérieusement une personne pour construire leur vie. »
Le fait est, d’après lui, que les hommes et les femmes sont plus « exigeants » voire « méfiants » et laissent moins de place à la rencontre lorsqu’ils sont abordés dans la rue.

La part du destin

« Beaucoup de personnes dans mon entourage me disent ne pas savoir où rencontrer des personnes de confession musulmane qui répondraient à tous leurs critères, dans un cadre sécurisé, et ce, sans que cela prenne des années », explique-t-il, précisant que les Algériens ou les émigrés d’origine algérienne présents sur le site lehlel.com représentent environ 35% des inscrits. « Le point commun à toutes ces personnes est qu’elles ont toutes des critères bien définis pour cette rencontre. Autrement dit, elles savent ce qu’elles veulent et surtout ce qu’elles ne veulent pas. Certains sont attirés par les grands, d’autres par les petits. Certains apprécient les bruns, tandis que d’autres les blonds », explique Rachid Dhimane en réfutant l’appellation « site communautaire » : « L’origine et la communauté auxquelles appartiennent les inscrits ne sont que des critères parmi tant d’autres. Il ne faut pas voir dans notre site autre chose qu’un lieu permettant la rencontre de personnes qui savent déjà très bien ce qu’elles recherchent, nous ne faisons que leur apporter notre aide avec un lieu sécurisé facilitant l’échange. Notre participation s’arrête ici, le reste c’est le destin ! »
Sur la Toile, la concurrence est rude et le nombre de sites de rencontres spécialisés est croissant. Le site Inchallah serait, à en croire Nissaf Hajaj, 37 ans, directeur de la société CAJIS qui l’édite et l’agence Comsore, leader en Algérie, revendiquant pas moins de 2,5  millions de membres depuis la création du site en 2010. Il compte environ 300 000 inscrits en Algérie et 600 000 inscriptions d’origine algérienne.
Le responsable du site Inchallah dénombre, en moyenne, 57 unions observées par jour, d’après un calcul assez particulier réalisé par sondage auprès des membres qui suppriment leur compte. Qui peut-on croiser sur ces sites ? Il y aurait, à en croire Nissaf Hadjadj, deux types de profils : d’un côté, des personnes âgées entre 18 et 30 ans jamais mariées qui recherchent pour 83% d’entre elles le mariage. Ils représentent environ 80% des inscrits. De l’autre, les personnes de plus de 45 ans qui cherchent une deuxième chance en amour après un premier divorce…
« Ces personnes en tant que musulmanes et souhaitant transmettre cette religion à leurs enfants ont pour la plupart l’exigence de se marier avec quelqu’un de la même religion. Cette exigence correspond à une conviction et absolument pas à l’appartenance à une quelconque communauté », précise le patron d’Inchallah.
Les concepteurs du site insistent sur le fait que l’islam auquel ils adhèrent n’est point celui qui est « instrumentalisé de part et d’autre, politisé ou même commercialisé ». L’explosion des sites religieux ne répondrait aucunement, d’après Nissaf Hajaj, à une « explication sociologique » : « Il s’agit simplement, dit-il, d’une tendance de fond observée sur le web qui tend à la spécialisation des sites. On l’observe aisément sur les sites de e-commerce qui se spécialisent fortement. Les sites de services n’échappent à cette règle et on voit apparaître des sites pour toutes les religions et plus globalement pour toutes les convictions (religieuse, politique…). »
Derrière l’aspect religieux, le business reprend vite ses droits. Le site Muslima.com est géré par Cupid Media, leader international des sites de rencontres et basé en Australie. La compagnie possède pas moins de 35 sites de niches, dont un site de rencontres pour les parents célibataires, l’un pour les chrétiens et un autre pour les Noirs.
Amel Blidi




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